Incendis, Wajdi Mouawad
Commentaire de texte : Incendis, Wajdi Mouawad. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar TOM CORBIERE • 3 Février 2021 • Commentaire de texte • 2 571 Mots (11 Pages) • 1 256 Vues
Français lecture linéaire: Incendies
Tom Corbière, 1ereGA
NAWAL. Réfléchis, Sawda! Tu es la victime et tu vas aller tuer tous ceux qui seront sur ton chemin, alors tu seras le bourreau, puis après, à ton tour tu seras la victime ! Toi tu sais chanter, Sawda, tu sais chanter.
SAWDA. Je ne peux pas ! Je ne veux pas me consoler, Nawal. Je ne veux pas que tes idées, tes images, tes paroles, tes yeux, ton amitié, toute notre vie côte à côte, je ne veux pas qu’ils me consolent de ce que j’ai vu et entendu! Ils sont entrés dans les camps comme des fous furieux. Les premiers cris ont réveillé les autres et rapidement on a entendu la fureur des miliciens! Ils ont commencé par lancer les enfants contre le mur, puis ils ont tué tous les hommes qu’ils ont pu trouver. Les garçons égorgés, les jeunes filles brûlées. Tout brûlait autour, Nawal, tout brûlait, tout cramait! Il y avait des vagues de sang qui coulaient des ruelles. Les cris montaient des gorges et s’éteignaient et c’était une vie en moins. Un milicien préparait l'exécution de trois frères. Il les a plaqués contre le mur. J’étais à leurs pieds, cachée dans le caniveau. Je voyais le tremblement de leurs jambes. Trois frères. Les miliciens ont tiré leur mère par les cheveux, l’ont plantée devant ses fils et l’un d’eux lui a hurlé : « Choisis ! Choisis lequel tu veux sauver. Choisis! Choisis ou je les tue tous ! Tous les trois! Je compte jusqu’à trois, à trois je les tire tous les trois ! Choisis ! Choisis ! ». Et elle, incapable de parole, incapable de rien, tournait la tête à droite et à gauche et regardait chacun de ses trois fils ! Nawal, écoute-moi, je ne te raconte pas une histoire. Je te raconte une douleur qui est tombée à mes pieds. Je la voyais, entre le tremblement des jambes de ses fils. Avec ses seins trop lourds et son corps vieilli pour les avoir portés, ses trois fils. Et tout son corps hurlait : « Alors à quoi bon les avoir portés si c’est pour les voir ensanglantés contre un mur! » Et le milicien criait toujours: « Choisis! Choisis !» Alors elle l’a regardé et elle lui a dit, comme un dernier espoir : « Comment peux-tu, regarde-moi, je pourrais être ta mère ! » Alors il l’a frappée : «N’insulte pas ma mère ! Choisis » et elle a dit un nom, elle a dit « Nidal. Nidal ! » Et elle est tombée et le milicien a abattu les deux plus jeunes. Il a laissé l’aîné en vie, tremblant ! Il l’a laissé et il est parti. Les deux corps sont tombés.La mère s’est relevée et au cœur de la ville qui brûlait, qui pleurait de toute sa vapeur, elle s’est mise à hurler que c’était elle qui avait tué ses fils.Avec son corps trop lourd, elle disait qu’elle était l’assassin de ses enfants!
NAWAL Je comprends, Sawda, mais pour répondre à ça on ne peut pas faire n’importe quoi. Écoute-moi. écoute ce que je te dis : le sang est sur nous et dans une situation pareille, les souffrances d’une mère comptent moins que la terrible machine qui nous broie. La douleur de cette femme, ta douleur, la mienne, celle de tous ceux qui sont morts cette nuit ne sont plus un scandale, mais une addition, une addition monstrueuse qu’on ne peut pas calculer. Alors, toi, toi Sawda, toi qui récitais l’alphabet avec moi il y a longtemps sur le chemin du soleil, lorsque nous allions côte à côte pour retrouver mon fils né d’une histoire d’amour comme celle que l’on ne nous raconte plus, toi, tu ne peux pas participer à cette addition monstrueuse de la douleur. Tu ne peux pas.
___: débat entre Nawal et Sawda
___: description du traumatisme
___: Nawal raisonne Sawda
Wadji Mouawad, grand dramaturge du XXIe siècle, quitte son pays natal, le Liban, à ses 10 ans à cause des guerres civiles et se réfugie à Paris puis se dirige à Montréal en 1983. Son nom commence à se faire connaître puis il écrit des scènes de théâtre dont une tétralogie d'œuvres nommée Le sang des promesses sur le thème de l’héritage. Incendies, deuxième volet de cette tétralogie connaît le plus grand succès. L’extrait que nous allons étudier est un dialogue entre Sawda qui est une réfugiée traumatisée depuis qu’elle a assisté à un incendie dans un autobus provoqué par des soldats ayant massacré les passagers et Nawal son amie qui essaie de la consoler et de la raisonner.
Ainsi nous pouvons nous demander: En quoi ce dialogue est un conflit entre la raison et la passion?
Dans un premier temps nous analyserons le débat entre Nawal et Sawda, puis la description du traumatisme et enfin nous finirons par Nawal qui raisonne Sawda.
1) “ Réfléchis, Sawda! ” imperatif et le point d'exclamation montre l'engagement de Nawal envers le bien être de son amie. Appel à la raison.
“ Tu es la victime et tu vas aller tuer tous ceux qui seront sur ton chemin, alors tu seras le bourreau, puis après, à ton tour tu seras la victime ! “ les verbes au futur servent de succession d’anticipations séparées par des virgules avec l’adverbe et la conjonction de coordination “et après” qui montrent la chronologie des événements.
“Toi tu sais chanter, Sawda, tu sais chanter. ”répétition + sujet séparé de virgules montrent l’insistance sur le fait qu’elle sache chanter.
“ Je ne peux pas ! Je ne veux pas me consoler, Nawal. “ répétition de la négation + point d’exclamation montre le refus catégorique de Sawda.
“ Je ne veux pas que tes idées, tes images, tes paroles, tes yeux, ton amitié, toute notre vie côte à côte, je ne veux pas qu’ils me consolent de ce que j’ai vu et entendu! “ Il y a une gradation qui renforce la négation précédente. De plus, cela accentue l’ampleur de la situation.
“ Ils sont entrés dans les camps comme des fous furieux “ il y a une hyperbole du sujet avec fous furieux cela montre la dangerosité des individus.
2)“ Ils sont entrés dans les camps comme des fous furieux “ il y a une hyperbole du sujet avec fous furieux cela montre la dangerosité des individus.
“ Les premiers cris ont réveillé les autres et rapidement on a entendu la fureur des miliciens! “ le sens de l'ouïe est sollicité avec des cris de fureur que l’on peut donc imaginer, cela nous fait nous mettre dans la peau de ceux qui les
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