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Impact différencié des acteurs des mouvements sociaux en Amérique latine

Dissertation : Impact différencié des acteurs des mouvements sociaux en Amérique latine. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  21 Septembre 2020  •  Dissertation  •  3 884 Mots (16 Pages)  •  528 Vues

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Ensayo final

Que ce soit en Amérique Latine et plus généralement dans le monde entier, les acteurs de la sphère politique sont inégaux. La classe dirigeante dispose de tous les pouvoirs et moyens de communication tandis que la société civile, le peuple, doit se faire entendre. Il n’existe aucune démocratie totalement participative et pour conséquence, le poids des citoyens se limite plus ou moins au vote et à la participation politique légale ; les manifestations, associations, groupes de réflexion etc. ainsi qu’à toutes les formes de désobéissance civile, que ce soit les grèves et manifestations illégales, les graffitis etc. Or, même au sein de la désobéissance civile, les différents acteurs sont inégaux. On se demande alors Dans quelle mesure y-a-t ’il un impact différencié des acteurs des mouvements sociaux en Amérique latine en fonction du genre, de l’origine social, des moyens utilisés etc. ? Nous verrons dans une première partie la variété d’acteurs des mobilisations sociales et les différences qu’engendre leur genre, origine socio-culturelle etc. sur l’entente de leurs revendications. Puis nous verrons comment les moyens utilisés peuvent être plus ou moins acceptés ou rejetés par la classe dirigeante.

I/L’impact différencié des acteurs au sein des mobilisations sociales

Chaque individu connait un processus d’apprentissage et de politisation différent. Cela passe par l’éducation reçue, ce que l’on appelle la socialisation primaire au sein de la famille, puis la socialisation secondaire au sein de l’école, les associations sportives ou artistiques et le monde professionnel. Chaque milieu dans lequel nous évoluons nous apprend des codes de conduites, des normes à respecter, un ensemble de valeurs et principes différents d’un milieu à l’autre. Si grandir dans un milieu ne veut pas forcément dire que nous allons avoir les mêmes opinions politiques que nos proches, il y a de très grandes chances que ce soit le cas. Ainsi, les individus sont différemment éduqués et politisés. Nous allons voir pourquoi cela peut avoir des conséquences sur leur impact au niveau politique.  

  1. La question du genre de l’acteur au sein des mouvements sociaux

Premièrement, nous allons aborder la question du « genre ». Le « genre » est l'identité construite par l'environnement social des individus, c'est-à-dire la « masculinité » ou la « féminité », que l'on peut considérer non pas comme des données naturelles, mais comme le résultat de mécanismes extrêmement forts de construction et de reproduction sociale, au travers de l'éducation. Elle a trait aux comportements, pratiques, rôles attribués aux personnes selon leur sexe, à une époque et dans une culture donnée. Ainsi, les hommes doivent être masulins, c’est à dire forts, insensibles, courageux etc. Tandis que les femmes doivent être douces, jolies, obéissantes etc. Acquérir ces caractéristiques passe par l’éducation genrée, c’est à dire une éducation différenciée entre les garçons et les filles. On apprend aux garçons à se battre pour leurs désirs et aux filles à être calme et silencieuses. Si cette éducation est avec le temps, de plus en plus remise en question avec plus ou moins d’intensité selon les regions du monde, elle a un effet direct sur les comportements des hommes et des femmes. Et cela a des répercussions partout, y compris dans les manières de faire de la politique. Ainsi, dans son article « Lo personal es politico : las madres de la plaza de mayo » Marysa Navarro (2001) explique que la participation des femmes aux manifestations illégales sous le régime autoritaire argentin (1976-1982) de Jorge Rafael Videla a été clef dans l’affaiblissement du régime. Ces femmes, appelées Les Mères de la Plaza de Mayo demandant le retour de leurs fils disparus, étaient des femmes, en Argentine, à la fin du XXème siècle. Elles et elles seules participèrent à ces manifestations à cause du genre qu’il leur a été attribué depuis toujours, tout comme l’absence des hommes au sein du mouvement était également du au genre qu’on leur attribuait. De fait, les femmes sans leurs fils, perdent leur role de mère et le sens de leur vie, le refus de perdre leurs enfants était une expresión de leur “socialisation, de su aceptación de la división sexual del trabajo dominante y de su propia subordinación dentro de ella”. Elles avaient plus de temps que les hommes qui travaillaient, et de plus, elles n’étaient pas considérées comme des dangers politiques et étaient protégés par leur rôle de femme et de mère dans une société très catholique où la mère était sacrée. Ainsi, elles ne sont pas considérées comme des acteurs politiques important, bien qu’elles peuvent être actives en politique. C’est ce qui leur a permis de braver l’interdiction politique de manifester et au fil du temps, de fragiliser le régime en place. Si aujourd’hui, les choses ont changé ; l’influence du catholicisme a diminué ainsi que le sacre de la mère, les stéréotypes de genre ont de moins en moins d’importance etc. En Amérique Latine et dans le reste du monde, on peut toujours utiliser le genre comme un moyen de faire de la politique. En France par exemple, on a pu voir le 8 mars dernier lors des manifestations féministes, que les policiers n’hésitent plus à utiliser la violence envers les femmes. Cependant l’instrumentalisation du genre peut encore servir à faire avancer des causes. Par exemple, récemment en France, une étudiante a fait le choix de s’afficher sur les réseaux sociaux, sans protection hygiénique lors de ses menstruations. Elle a utilisé le fait de choquer certains internautes en se montrant à l’opposé de ce à quo ion s’attend d’une femme : qu’elle soit coquette, discrète etc. Pour faire passer une demande : le remboursement des protections hygiéniques par l’Etat.  

Ainsi, si l’appartenance sexuelle et le genre ont pu être dans le passé, un obstacle à la participation politique, on peut voir qu’ils sont aujourd’hui utilisés au profit de diverses causes. Nous allons ensuite voir de quel manière l’origine socio-culturel peut être un avantage ou un frein à l’action politique.

  1. Le niveau de politisation et d’accès à la sphère politique selon la position sociale

La position sociale joue grandement sur le niveau de politisation. En effet le niveau de capital économique semble lié au degré d’intérêt à la politique. La position sociale reflète l’intégration sociale, qui conditionne la participation politique. Nous allons voir que le désintérêt pour la politique peut être analysé comme la conséquence d’une exclusion sociale, et non comme une ‘faute morale’. Sébastien Michon travaille sur l’influence des trajectoires sociales sur la politisation des étudiants. Il montre que plus les parents sont politisés, plus l’enfant le sera. En effet, la position sociale définit le degré de politisation avec le capital économique et surtout culturel. On a pu voir par exemple dans le livre “Estado y sociedad en América Latina 1850-1930” de Marcello Carmagnani à quel point l’origine sociale était déterminante dans la participation politique. En effet, il décrit un contexte dans lequel dominent les oligarchies et propriétaires terriens qui sont présentes au sein des instances gouvernementales et propriétaires des moyens de travail, contexte dans lequel les classes inférieures n’existent pas puisqu’elles n’ont pas consciences d’elle mêmes (notion de Karl Marx qui différencie la conscience en soit et la conscience pour soi). On observe qu’alors même qu’elles prennent conscience d’elles-mêmes, les classes inférieures et prolétaires -et en particulier les prolétaires- ne disposent pas d’assez de moyen pour avoir un fort impact politique. Elles réussiront néanmoins avec le temps à gagner des droits politiques. Le niveau d’étude fait également varier le niveau de politisation et reflète les disparités des propriétés socioculturelles des étudiants. Posséder un diplôme fait voter : souvent corrélé au niveau de revenus, aux catégories socioprofessionnelles, à l’ampleur du patrimoine, le niveau de diplôme reste surdéterminant dans le rapport à la politique en général, jusque dans les dispositifs alternatifs de démocratie participative. Alors, posséder un diplôme accroît nettement les chances de voter, de s’intéresser à la politique et de suivre les campagnes. Le niveau de participation tend à augmenter avec niveau de diplôme. A l’inverse les moins diplômés sont systématiquement sous-représentés dans les urnes. Cependant rien ne permet d’assurer que l’effet diplôme ne dissimule pas celui des positions sociales héritées. Pour vérifier l’influence de la position sociale sur la politisation, Michon étudie des variations suivant les propriétés économiques et culturelles, puis les catégories socioprofessionnelles. La participation politique des étudiants est tout d’abord la plus élevée pour les plus dotés en « capital économique », mesurable ici par les revenus de leurs parents. Mais, le « capital culturel » paraît davantage clivant. L’enquête tend à confirmer qu’au niveau des étudiants comme du reste de la population, plus le volume de capital culturel s’accroît, plus la participation politique s’intensifie. C’est ce qui explique que les intellectuels de gauche évoqués par Jorge Castañeda (1993) dans “La utopía desarmada” prennent une place si importante dans la sphère politique, que ce soit au sein des mouvements sociaux mais également au sein des sphères de changement sociales et des sphères dirigeantes et ici, dans le processus de démocratisation en Amérique Latine. De plus, plusieurs classes d’âges sont exclues politiquement, car elles le sont socialement. Ce phénomène d'exclusion se produit pour différentes classes d'âges : Anne Muxel (2002), dans La participation politique des jeunes soubresauts, fractures et ajustements (2002), a étudié la participation en fonction du cycle de vie. Les jeunes votent moins que les personnes âgées (surtout moins que les quinquagénaires). Entre 18 et 35 ans, il y aurait une phase de suspens de la participation électorale régulière. C’est la période de construction personnelle où on entre plus tardivement sur marché du travail, on bouge entre plusieurs lieux de résidence, c’est une phase d'entrée dans la conjugalité... Alors les intérêts politiques sont tenus à distance, en partie parce qu'on est soumis à toute une série d'influences de socialisation, potentiellement contradictoires, qui évoluent et alimentent un sentiment de désorientation, d'incompétence politique (qui disparaît à mesure qu'on s'installe dans vie professionnelle, conjugale...). L'apogée de la participation est pendant la quarantaine. Les personnes du troisième âge votent beaucoup jusqu'à la dépendance physique qui fait alors remonter l'abstentionnisme. Le désintérêt pour la politique ne relève pas d’une faute morale mais d’une exclusion sociale, en effet il faut être intégré socialement pour participer. Gaxie montre que ceux qui participent sont les plus privilégiés, les autres se sentent incompétents politiquement, donc s’autoexcluent du jeu politique. Il met en évidence l'apathie citoyenne. À travers son expression « cens caché », il veut signifier que le cens légal (le payement pour participer politiquement) a laissé place à un cens social, réel car certaines personnes sont exclues de la participation politique. En regardant leur catégorie socioprofessionnelle, il constate que ces gens sont en fait exclus socialement de la vie politique entière. Il distingue une minorité participante : un groupe essentiellement formé par l'agrégation des cadres supérieurs, des professions libérales. Puis une majorité non participante : ceux qui sont le plus dépourvu de ressources sociales, les moins fortunés, les moins diplômés, les plus isolés. Daniel Gaxie conclu que « le champ politique transpose les oppositions sociales dans un réseau de relations concurrentielles spécifiques et les transmet en oppositions politiques ». Néanmoins ce processus n’est pas mécanique, le sentiment d’appartenance au groupe compte davantage que l’appartenance au groupe elle-même. Encore une fois, c’est la dimension subjective de l'appartenance au groupe qui compte (idée de conscience de classe de Karl Marx). Selon Daniel Gaxie, ce qui compte ce n'est pas la compétence, mais le sentiment de compétence politique, c'est ça qui va être déterminant dans la participation. Ce dernier renvoie à certaines connaissances, mais surtout à l'image que les autres renvoient de notre capacité à tenir des propos politiques.

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