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Muriel DARMON, « Des jeunesses singulières. Sociologie de l’ascétisme juvénile », Agora débats/jeunesses, vol.3, n°56, 2010, p.49-62.

Fiche de lecture : Muriel DARMON, « Des jeunesses singulières. Sociologie de l’ascétisme juvénile », Agora débats/jeunesses, vol.3, n°56, 2010, p.49-62.. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  6 Février 2018  •  Fiche de lecture  •  1 374 Mots (6 Pages)  •  3 268 Vues

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Fiche de lecture :

Muriel DARMON, « Des jeunesses singulières. Sociologie de l’ascétisme juvénile », Agora débats/jeunesses, vol.3, n°56, 2010, p.49-62.

Muriel Darmon est une sociologue française, chargée de recherche au CNRS à l’université Lyon II. Elle travaille notamment sur la socialisation, le corps et la santé et les institutions. Elle a publié sur l’anorexie :

  • « Traitement de l’anorexie et clivages de genre », in ECKERT H., FAURE S. (dir.), Les jeunes et l’agencement entre les sexes, La dispute, coll. « Le genre du monde », Paris, 2007, pp. 95-111. ;
  • Devenir anorexique. Une approche sociologique. La Découverte, coll. « La Découverte poche », n°270, 2008 [2003].

Elle a aussi publié sur la socialisation :

  • La socialisation, Armand Colin, coll. « 128 », Paris, 2010 [2006].

Ce texte qui se découpe en 4 parties est une étude de Muriel Darmon parue dans la revue Agora débats/jeunesses qui comme son nom l’indique est spécialisée dans la jeunesse. Son étude se différencie des autres dans la mesure où elle se focalise sur l’ascétisme juvénile, concept emprunté à son collègue sociologue Julien Bertrand, et c’est à travers deux exemples comparés, celui de l’anorexie (recherche passée) et celui des classes préparatoires (recherche en cours) qu’elle va tenter de répondre à sa problématique, à savoir si l’ascétisme juvénile est disposition(s) ou dispositif.

Concepts abordés :

Ascétisme, Ascétisme juvénile, Ascétisme dispositionnel, Ascétisme institutionnel, régime de vie, ascétisme élitiste, ascétisme préparatoire, mise en condition, socialisation silencieuse, micropénalité de l’activité, micropénalité du temps, système de gratification, étiquetage déviant.

II. Méthodologie :

Muriel Darmon a mené une première recherche (passée) sur l’anorexie principalement en conduisant des entretiens avec des personnes anorexiques et des observations à l’hôpital. Elle a mené une deuxième recherche sur les classes préparatoires en observation participante pendant 2 ans (elle tient un journal de terrain), elle participe notamment aux réunions d’accueil et certains cours, elle a également conduit des entretiens avec des enseignants.

Elle a comparé ces deux études pour en faire apparaitre les convergences et les divergences en termes d’ascétisme juvénile et pour en faire ressortir les pratiques propres à chacun.

III. Thèse :

  1. L’anorexie : un ascétisme dispositionnel. (p.50-53)

Dans cette partie, l’ascétisme semble « individuel, autoproduit, et auto-imposé » (p.50) c'est-à-dire que l’anorexie serait une contrainte, un effort que l’on s’impose à soi par un « régime de vie » particulièrement strict qui prend ses formes dans l’alimentation mais aussi le sport, le rapport au corps et la culture. Les différents entretiens montrent ainsi que cette vie est « rythmée », « réglée », « planifiée », cette organisation minutieuse du temps laisse peu ou pas de place au plaisir et à la spontanéité. Ces personnes sont constamment en train de travailler sur leurs dispositions dans un but précis. L’auteure cite Durkheim qui compare cette forme d’ascétisme au religieux comme une transformation du commun ou profane vers le sacré. C’est « Dompter sa nature », faire l’effort de changer pour être accepté et trouver sa place dans « l’espace social ». En effet, l’auteure reprenant Bourdieu nous explique que les pratiques anorexiques auraient pour finalité une « mobilité ascendante » dans cet « espace social », s’éloignant des classes populaires (qui se nourrissent pour « la substance, la force ») et se rapprochant des classes moyennes et supérieures (qui se nourrissent en accordant beaucoup plus d’importance à « la forme et aux formes »). C’est en cela que « l’ascétisme anorexique » est qualifié « d’élitiste » car il tend vers un goût distingué du populaire. Cet ascétisme est aussi dispositionnel (car il joue sur les dispositions individuelles et celles-ci sont ajustées par soi-même comme une « règle à soi même prescrite » (p.53)) et dirigé car il semble toucher les individus selon des variables sociales de genre, de classe et d’âge bien particulières, c’est à dire surtout les jeunes filles des classes moyennes et supérieures qui seraient plus réceptives aux « injonctions de transformations » véhiculées par la « norme ».

  1. Les classes préparatoires : un ascétisme institutionnel. (p.53-57)

Dans cette partie on voit que contrairement à « l’ascétisme anorexique » où la norme est implicitement imposée, quasiment invisible et auto-administrée, « l’ascétisme préparatoire », lui, est imposé par une « institution scolaire » qui contraint ses membres à cet « ascétisme institutionnel ». Ainsi il prend ses formes premières dans les cérémonies d’admission où tout est fait pour bombarder les nouveaux venus d’injonctions au travail et à la discipline, leur faisant comprendre que 100% leur temps doit être consacré uniquement aux cours et non aux loisirs. Les autres années sont calquées sur le même modèle disciplinaire avec toujours un peu plus d’urgence dans les injonctions. Comme pour l’anorexie, c’est un contexte d’extrême tension qui laisse peu ou pas de place au repos et au plaisir. Pour accentuer cette tension tout est surveillé, contrôlé et sanctionné, de la présence au retard, notes et comportement (« micropénalité de l’activité, du temps et système de gratification et de sanction par les notes et le rang »), à l’instar de l’espace social bourdieusien il y a aussi au sein des institutions scolaires un système de classement et de jugement. Aussi l’ambiance préparatoire est spéciale du fait que le corps enseignant dispose de moyens de pression sur les élèves pour les « mettre au travail ». L’auteure cite une nouvelle fois Durkheim pour comparer les classes préparatoires au collège jésuite dans L’évolution pédagogique en France : les deux sont similaires car ils poussent les élèves à l’effort constant et constamment rappelé et évalué. Les comportements sont robotisés la aussi dans un but précis de « mobilité ascendante » et c’est sans doute ce dernier point qui constitue le moyen de pression le plus fort de ces institutions scolaires.

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