Les Directives Européennes et le droit interne
Mémoire : Les Directives Européennes et le droit interne. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Louma22 • 10 Mars 2014 • 2 237 Mots (9 Pages) • 765 Vues
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Les directives européennes et le droit interne
PAR NICOLAS ROUSSEAU le MARDI 31 JANVIER 2012 • ( 1 )
« Cohn-Bendit est mort ! ». C’est par cette acclamation que le professeur Pierre Delvolvé a accueilli l’arrêt d’Assemblée du Conseil d’Etat du 30 octobre 2009Mme Perreux. Cet arrêt n’annonçait pas réellement le décès de Dany le Rouge, devenu vert ; il marquait seulement la fin de la jurisprudence homonyme du Conseil d’Etat datant de 1978. Cet arrêt Mme Perreux a mis le point final à une relation tumultueuse qu’ont entretenu les directives européennes et le droit interne, illustrée par les oppositions de jurisprudence entre le Conseil d’État et la Cour de Justice de l’Union Européenne.
Les directives européennes sont des normes européennes de droit dérivé définies par l’article 288 du Traité sur le Fonctionnement de l’Union Européenne : "La directive lie tout État membre destinataire quant au résultat à atteindre, tout en laissant aux instances nationales la compétence quant à la forme et aux moyens."
La procédure d’élaboration de ces directives est normalement la procédure législative ordinaire qui se traduit par une adoption conjointe par le Parlement et le Conseil, sur proposition de la Commission. Les directives occupent une place centrale dans la vie de l’Union : elles lui permettent notamment de légiférer dans les domaines de compétences partagés qu’elle détient conjointement avec les États-membres. Ainsi l’Union leur laisse une certaine marge de manœuvre tout en fixant les objectifs principaux. On le voit avec les différents exemples de directives célèbres : la directive Services, la directive Retour ou encore la directive Recours.
Après cette élaboration au niveau de l’UE, comment les directives entrent-elles en vigueur ? Elles n’ont pas force de loi dès leur publication, contrairement aux traités internationaux. Elles doivent être transposées. Elles n’entrent en vigueur dans l’ordre juridique interne qu’après cette transposition. C’est la particularité de ces directives, qui constituent ainsi une exception flagrante à la conception moniste de l’ordre juridique interne de la France.
Les rapports entre directives européennes et droit interne sont conflictuels depuis près de 50 ans. Il est difficile de leur trouver une place dans la hiérarchie des normes. Quel est leur rapport avec normes de droit interne avant leur transposition ? Après ? Que se passe-t-il à l’expiration du délai de transposition ? Existe-t-il des mécanismes de contrôle des États-membres ? Sont-elles invocables par les particuliers ? Les questions sont innombrables. Néanmoins, il faut essayer de répondre à la majorité des problèmes que suscite cette catégorie de normes en constatant deux phénomènes. Tout d’abord les directives ne sont contrôlées que de manière restreinte lors de leur transposition dans l’ordre juridique national (I). Ensuite, ce sont elles qui permettent désormais un contrôle entier des normes de droit interne (II).
I. Les directives ne sont contrôlées que de manière restreinte lors de leur transposition dans l’ordre juridique national
A – La position des directives dans la hiérarchie des normes est difficile à déterminer
Les directives européennes sont des normes européennes. Ces normes de droit dérivé sont-elles supérieures aux normes constitutionnelles ? Pour la Cour de Justice de l’Union Européenne, il semble que ça soit le cas : par l’arrêt Simmenthal du 9 mars 1978, qui reprend la solution dégagée par l’arrêt Costa c/ Enel pour les directives, la CJCE estime que les normes européennes priment toutes les normes de droit interne, qu’elles aient un caractère constitutionnel ou non. On pourrait donc penser trouver au sommet de la hiérarchie des normes les normes de droit européen, parmi lesquelles les directives. Il n’en est pourtant rien.
En effet, tant le Conseil d’État (CE 30 octobre 1998 Sarran et Levacher), que la Cour de Cassation (Cour de Cassation Mlle Pauline Fraisse 2 juin 2000) et le Conseil Constitutionnel (décision n°2004-496 DC du 19 juin 2004 Loi pour la confiance dans l’économie numérique) ont affirmé que dans l’ordre juridique français la Constitution restait la norme suprême. Les traités et les actes de droit dérivé n’auraient donc pas une valeur supérieure à la Constitution. Ces jurisprudences semblent opposées mais elles ne le sont pas réellement : la CJUE considère en fait qu’aucun État-membre ne peut se retrancher derrière ses normes de droit interne pour ne pas appliquer les directives. Ainsi, les jurisprudences sont conciliables : la Constitution conserve bien la suprématie. Toutefois il n’est pas possible de repousser l’application des directives car elles seraient contraires à une disposition constitutionnelle.
B – Cette position ambiguë entraine un contrôle de constitutionnalité restreint des normes de transposition des directives
Cette position ambiguë a poussé le Conseil Constitutionnel à adopter une jurisprudence inédite et peut-être même contestable au regard des exigences posées par la Cour de Justice de l’Union Européenne. Par deux décisions (n°2004-496 DC du 19 juin 2004 Loi pour la confiance dans l’économie numérique et n°2006-540 DC du 27 juillet 2006 Loi relative au droit d’auteur), le Conseil a estimé que l’obligation de transposition des directives n’était pas seulement une obligation communautaire mais également une obligation constitutionnelle issue de l’article 88-1 de la Constitution. Il en a déduit, que s’il ne lui appartenait donc pas de contrôler la constitutionnalité d’une loi transposant les dispositions précises et inconditionnelles d’une directive – car cela reviendrait à contrôler la constitutionnalité de la directive, rôle qu’il a toujours refusé – il existait deux réserves à cette position. Il s’est déclaré compétent pour interpréter la loi selon la méthode des réserves d’interprétation et surtout, il a affirmé qu’il accepterait de juger une loi de transposition inconstitutionnelle si celle-ci méconnaissait "les règles et principes inhérents à l’identité constitutionnelle de la France". Le contrôle de constitutionnalité de la loi de transposition est donc en principe exclu, sauf exception, qui pour l’instant, n’a jamais trouvé à s’appliquer.
Que se passe-t-il dans le cas d’une transposition de la directive
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