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UE402 – Psychologie du Travail

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Par   •  9 Mai 2023  •  Cours  •  1 840 Mots (8 Pages)  •  272 Vues

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UE402 – Psychologie du Travail

Étude de cas

Consigne :

- Analyser le cas en mobilisant les concepts vus lors des cours, vous pouvez vous référer à vos documents relatifs à ces cours (vos prises de notes des cours, vos fiches de lecture des ouvrages conseillés, etc) :

  • Les particularités du cas en termes de travail prescrit (la tâche) et de travail effectivement réalisé (l’activité),
  • Le point de vue sociologique sur l’organisation du travail,
  • Le repérage de la souffrance au travail à partir des 6 indicateurs de risques psychosociaux.

Extraits d’un entretien avec une personne occupant le poste d’Agent des Services Hospitaliers (ASH), réalisé en Janvier 2019, dans un EHPAD (Etablissement d’Hébergement de Personnes Agées Dépendantes).

Eléments de contexte

Depuis 2001 les maisons de retraite médicalisées changent de statut pour devenir progressivement des EHPAD. Un EHPAD est une structure médicalisée habilitée par l'Etat à recevoir des personnes de plus de 60 ans, en perte d'autonomie, pour des séjours permanents ou spécifiques (hébergement temporaire, accueil de jour, accueil Alzheimer, etc.), et à leur dispenser des soins. Une convention tripartite est conclue entre le directeur de l’EHPAD, le directeur de l'agence régionale de santé (ARS) et le président du conseil général ; elle fixe, pour une durée de cinq ans, les objectifs de qualité de la prise en charge et les moyens financiers de fonctionnement. Ce qui veut dire que la direction de l’EHPAD n’a pas toute latitude concernant les moyens, c’est en fonction du nombre de résidants que les moyens sont attribués. Les ressources financières sont de trois natures et sont très précisément réglementées : les subventions du Conseil Général pour la partie « dépendance », le tarif « hébergement » à la charge du résidant ou de sa famille, la prise en charge de l’Assurance Maladie pour la partie « soins ». L’établissement, dans lequel s’est déroulé l’entretien, est un EHPAD public qui accueille 60 personnes âgées dont les chambres sont réparties sur deux niveaux de 30 chambres chacun. Le personnel de l’établissement est composé d’infirmières, d’ASH qui s’occupent en principe uniquement de l’hygiène des locaux, du service hôtelier (repas, goûter, petit-déjeuner), d’AS (aides soignantes), de cuisiniers, de personnel administratif, d’un médecin coordonnateur (pour les résidants), d’un médecin du travail (pour le personnel), des animatrices, de personnel d’entretien technique (maintenance technique, des locaux et des jardins), … soit 50 salariés pour 60 résidants. L’établissement comprend quatre pôles :

  • La Direction (2 personnes) ;
  • L’Administratif (5 personnes) ;
  • Les Services Généraux (administration générale, hôtellerie, cuisine, lingerie, ateliers) composé de 13 personnes);
  • Les Soins (ou Médical & Paramédical) composés de 30 personnes.

Entretien

Je suis dans cet établissement depuis février 2010, je suis en CDD (contrat à durée déterminée) renouvelé chaque mois, ce qui fais que je ne sais jamais si je serais là le mois suivant. Je suis encore là parce qu’ils n’ont pas fini leur ménage…

Leur ménage ?

Oui c’est à dire faire partir ceux qui étaient là … qui ont vécu le suicide de notre collègue … ceux qui considèrent la direction comme responsable de ce suicide…  Pour essayer de rester, j’ai passé le concours d’ASHQ (Agent des Services Hospitaliers Qualifié), je ne l’ai pas eu à cause de l’entretien individuel. Ils n’ont pas posé le même type de questions à l’entretien à tout le monde, c’était plus facile pour certains que pour d’autres. Moi on ne m’a pas parlé de mises en situation en rapport avec mon métier par exemple, on ne m’a posé que des questions sur des choses administratives, « c’est quoi le CODIR (COmité de DIRection ? C’est quoi la réglementation sur les temps de récupération ? etc… ». Je pense qu’ils savaient qui ils voulaient, ils préféraient des personnes venant d’arriver pour nous remplacer par des touts neufs qui n’avaient pas été choqués par le suicide d’une collègue et qui n’étaient pas en colère contre la direction. Ils ont de drôles de pratiques, j’ai une collègue on lui a dit qu’elle aurait peut être le poste en CDI d’une collègue qui est en arrêt maladie pour harcèlement ... parce qu’ils pensent qu’elle ne reviendra pas… Mais la direction a aussi fait miroiter le même poste à une autre collègue du service hôtellerie. En ce moment il y a  3 Aides Soignantes en arrêt maladie pour dépression … Ici le travail, c’est très dur, on est minuté, on fait du boulot qu’on devrait pas faire, je fais des toilettes pour aider les aides soignantes alors que je suis là pour faire du ménage seulement. On a 12 mn pour faire la toilette d’une personne âgée, alors même si cette personne a encore un peu d’autonomie, qu’elle pourrait se laver le visage seule, … on peut pas la laisser faire, on prend le gant et on y va ! on rend les gens plus dépendants alors que ça devrait être le contraire, on devrait maintenir leur indépendance, c’est très dur à avaler !

Après avec ceux qui sont vraiment dépendants comment faire en 12 mn la toilette d’une personne qui n’a plus toute sa tête, qui se débat, qui entrave votre travail … on s’arrange avec les règles d’hygiène, on laisse de côté certaines prescriptions pour les escarres par exemple parce qu’on n’y arrive pas… parce que c’est dur pour le dos, c’est dur pour les nerfs, on perd patience… mais on tient les 12 mn attendues par la direction pour pouvoir faire toutes les toilettes de la matinée …c’est triste… on a le sentiment de mal faire notre boulot, de maltraiter les personnes âgées… le résultat est pas terrible ! ça fait des personnes de plus en plus mal et de plus en plus dépendantes. On est minuté pour tout, toilettes, ménage des chambres, service des repas, temps de repas, … et j’en passe, bientôt on va nous demander de ne plus adresser la parole aux résidants, eux qui ont tant besoin de parler ! Moi je suis plutôt avenante, j’aime discuter, plaisanter, je leur donne les petites nouvelles du jour, je leur demande comment ils vont… mais ça ne plait pas, il faudrait qu’on travaille comme des robots, soi disant ça nous distrait de notre travail ces discussions avec les résidants, selon la direction ça nous ralenti. Je veux bien faire ce qu’on me demande mais il faut me donner les moyens et je veux pouvoir le faire à ma façon c’est à dire ne pas laisser ma manière d’être au placard. Après ce système où il faut faire vite vite tout, ça nous met en compétition, les unes vont plus vite que les autres, et sans ça on a aussi beaucoup de tension qui se répercute sur les relations entre collègues… ça tire de tous les côtés, c’est très dur, il y a des clans, l’ambiance est nulle. En plus, il nous manque souvent des choses, du matériel, rupture de stock et autres qui nous compliquent la tâche, on doit se débrouiller alors des fois je prends un drap usé que je découpe pour faire serpillère quand les résidants renversent quelque chose. Tout va vite et on fait des bêtises, nous devons distribuer les médicaments le soir avec les repas parce que les infirmières partent à 17H30. Alors bien sûr elles nous préparent les piluliers pour chaque chambre mais une fois on était à fond et on s’est trompé de chambre ! C’est grave, on a eu très peur, finalement ça s’est bien terminé. Après aucune reconnaissance, aucun espoir d’avancer, de progresser dans la structure, tu arrives là et tu y restes, même tu deviens moins bonne au fur et à mesure que le temps avance parce que tu es dégoûtée, c’est ce que disent les anciennes ! Nous avons une lourde charge de travail, 30 lits par étage, dans la matinée on doit faire prendre le petit déjeuner, faire la toilette, faire le ménage de la chambre et nous sommes 2… les infirmières ne s’occupent que des soins, il faut aussi faire avec leur présence… Pour les petits déjeuners on a l’impression de maltraiter certains résidants, les uns sont réveillés très tôt et contents de nous voir arriver à 7H15 mais les autres qui aimeraient dormir un peu plus, on les réveille brusquement ! Pourtant normalement dans le projet de vie individualisé du résidant, qui est construit à son entrée, ils disent s’ils aiment dormir tard ou pas, s’ils souhaitent prendre le petit déjeuner au lit ou dans la salle à manger, etc … mais tout ça est balayé à cause de la charge de travail, on est dans une routine qui fait que l’on va d’une chambre à l’autre dans l’ordre sans se préoccuper d’autre chose. C’est triste quand on y réfléchit… Je rentre chez moi énervée, fatiguée dans mon corps et dans ma tête, j’ai du mal avec ma famille, avec mes enfants qui sont petits et demandent beaucoup d’attention, je suis crevée, je ne pense qu’à me poser, à dormir, au silence… alors mon mari est tendu lui aussi parce qu’il doit mettre la main à la pâte un peu plus, pour les enfants, pour les devoirs, pour le repas, etc. ça grince, ça crie, nous sommes en ébullition quand j’ai travaillé la journée, par contre quand je suis de nuit, je prends mon service à 18H jusqu’à 6H, j’ai les tracas du boulot mais pas de la famille, le matin quand je rentre ils partent et j’ai la journée tranquille, mais justement à cause des gosses et de mon mari je ne fais que 2 ou 3 nuits par mois. Ce qui est très dur aussi c’est parfois enchainer nuit et jour quand quelqu’un est absent et il faut remplacer ou alors on vient de rentrer à la maison et 2H après on vous appelle ou alors vous êtes de repos et à 6H du matin on vous demande de remplacer quelqu’un ! Il y a sans arrêt des changements de planning et c’est rude pour l’organisation familiale. On ne tient pas compte de nos demandes par exemple quand on a besoin de tel week-end parce qu’on a un mariage dans la famille ou un mercredi pour l’anniversaire d’un petit, … Voilà comment on arrive au suicide d’une collègue qui était là depuis 25 ans… Je suis stressée par plein de choses, donner les médicaments, regarder sans arrêt la pendule pour savoir si je suis dans les temps ou en retard sur mon travail, on a aussi des AS et ASH non formées dans les équipes (en contrat jeune) qui n’ont même pas la formation premier secours, on se sent pas soutenue. Il y a des soirs où il y a une seule AS et le reste c’est des personnes non formées … La fin de journée c’est impossible de terminer à l’heure, il m’arrive de ne pas noter dans l’ordinateur ce que j’ai pu noter chez le résidant parce que je suis très en retard, c’est comme la garde administrative de week-end qui est de la responsabilité de la direction, des fois on appelle parce qu’il y a un problème et on n’a pas de réponse.

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