Protection a priori du consentement
Commentaire d'oeuvre : Protection a priori du consentement. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar graffiti123 • 4 Avril 2016 • Commentaire d'oeuvre • 1 786 Mots (8 Pages) • 1 091 Vues
La protection a priori du consentement
Commentaire d’arrêt :
L’arrêt que nous allons étudier est un arrêt de cassation rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 3 mai 2000, publié au bulletin, et porte sur la question de l’obligation d’information et de la réticence dolosive.
En l’espèce, Mme Y vend en 1986 aux enchères publiques cinquante photographies de Baldus au prix de 1000 francs chacune. En 1989, elle retrouve le même acquéreur, M. Z et lui revend quatre-vingt-cinq photographies de Baldus au même prix. Ultérieurement, elle apprend que Baldus est un photographe de très grande notoriété et qu’elle a vendu les photographies bien en dessous de leur valeur. Mme Y porte plainte devant une juridiction pénale pour escroquerie contre son acquéreur. Une ordonnance de non-lieu ayant été rendue, Mme Y assigne alors M. Z devant une juridiction civile et réclame l’annulation de la vente pour dol dont elle estime avoir été victime. La cour d’appel de Versailles, par un arrêt du 5 décembre 1997, fait droit à cette demande annulant la vente pour réticence dolosive et condamne l’acquéreur au paiement de la somme de 1 915 000 francs représentant la restitution de la valeur des photographies vendues après déduction du prix de vente d’un montant de 85 000 francs encaissé par la venderesse. M. Z forme un pourvoi en cassation, il est donc demandeur au pourvoi.
La Cour d’appel de Versailles estime que l’acquéreur savait qu’il contractait à un prix dérisoire par rapport à la valeur des photographies, elle considère donc qu’il a manqué à son devoir de contracter de bonne foi et qu’il a commis une réticence dolosive en incitant Mme Y à conclure la vente qu’elle n’aurait pas envisagée si elle avait eu connaissance des informations que lui-même possédait.
Le problème de droit se posant dans cet arrêt est de savoir si le fait pour l’acquéreur d’un bien de ne pas informer le vendeur du décalage existant au détriment de ce dernier entre le prix réclamé pour la chose et sa valeur réelle bien supérieure, constitue-t-il une réticence dolosive susceptible de conduire à l’annulation du contrat ?
La Cour de cassation considère qu’aucune obligation d’information ne pesait sur l’acquéreur, elle casse et annule l’arrêt rendu le 5 décembre 1997 par la cour de Versailles.
Afin de mieux comprendre cet arrêt, il convient d’une part d’analyser le rejet de l’obligation d’informer (I) que la Cour de cassation pose ici en principe, avant d’étudier d’autre part, les conséquences à la fois générales et particulières qui en découlent (II).
I. Le rejet de l’obligation d’information
Dans cette première partie nous nous intéresserons tout d’abord à l’obligation de bonne foi entre les parties lors de la formation du contrat (A), puis nous étudierons la réticence dolosive (B).
A. Le viol de l’obligation de bonne foi dans la formation du contrat
Le contrat repose sur l'autonomie de volonté. Il sera supposé juste en vertu de ce principe. En effet, les parties peuvent s'accorder librement au cours d'une phase de négociation en vue d'aboutir à un accord commun, ce qui débouche sur un contrat. La négociation, phase précontractuelle, est censée garantir la bonne foi et la liberté contractuelle. Lors de cette phase les parties sont supposées s'accorder l'une en fonction de l'autre, en prenant en considération leurs capacités (principe de bonne foi). Dans cet arrêt, Mme Y réclame l’annulation de l'acte de vente pour réticence dolosive de la part de M. Z. Elle reproche en effet à l’acheteur, M. Z, de ne pas lui avoir signalé la valeur des photographies vendues alors qu’elle en proposait un prix dérisoire. Ce silence est fautif, il est constitutif de mauvaise foi dans la formation du contrat. Cette thèse est accueillie par la Cour d’appel qui condamne l’acheteur car elle estime que celui-ci savait qu’il contractait à un prix dérisoire et que, de ce fait, il a manqué à son obligation de contracter de bonne foi, obligation qui pèse sur tout contractant et qui est violée par la réticence à faire connaître la valeur des photographies à son vendeur. Il existe en effet un devoir d'information entre les parties, visant à garantir la loyauté entre celles-ci. Si une partie détient une information considérée comme pertinente (pouvant déterminer le consentement d'autrui) elle doit la communiquer à son cocontractant.
Cependant, la Cour de Cassation s’écarte de cette approche et considère que le comportement de l’acheteur n’est pas de mauvaise foi et qu’aucune obligation d’information ne pesait sur lui. L’acquéreur d’un bien n’a donc pas besoin d’informer le vendeur sur la valeur réelle de la chose qu’il vend. Cette position de la Cour de cassation rompt ainsi avec une approche plus solidariste du contrat. On voit donc qu’ici, la partie faible ne serait pas protégée de son acquéreur de mauvaise foi.
Après avoir étudié le non-respect de l’obligation de bonne foi dans la conclusion du contrat de vente (A), nous allons maintenant nous intéresser à la réticence dolosive qui a été écartée dans cet arrêt (B).
B. L’écartement de la réticence dolosive
L'obligation d'information est censée garantir la loyauté et la bonne foi entre les parties. On estimera qu'une obligation d'information existera si l'information concernée est considérée comme pertinente, c’est-à-dire que sa connaissance par son partenaire doit avoir été de nature à modifier son comportement. De même, on est en présence d’une obligation d’information si le créancier de celle-ci fait part d’une ignorance légitime. L'ignorance est considérée comme légitime si le créancier de l’obligation de l’information est dans l’impossibilité de découvrir par lui-même le fait dissimulé alors que son partenaire y avait accès. L'ignorance sera également considérée comme légitime s’il existe une relation de confiance qui unit le créancier de l’obligation d’information à son partenaire.
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