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Le juge administratif face à l'affaire Dieudonné

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Par   •  18 Octobre 2018  •  Dissertation  •  2 534 Mots (11 Pages)  •  619 Vues

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Le juge administratif face à l’affaire Dieudonné

Selon l’article 10 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyens : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, mêmes religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi »

Afin de concilier l’ordre public et les libertés individuelles, le juge administratif reprend, en premier lieu, l’arrêt Benjamin du Conseil d’Etat de 1933. Sieur R.Benjamin, était un partisan proche de l’extrême droite. Il a voulu tenir de nombreuses conférences et meeting pour promouvoir ses idées. Des membres de l’éducation ont voulu rendre impossible à Sieur de poursuivre son but. De là, le Conseil d’Etat va définir les statuts de l’ordre public d’un première manière : le principe de liberté doit être préservé si l’ordre public n’est pas dérangé. L’ordre public est une expression vaste, d’abord défini dans l’ordre législatif par la loi de 1884, puis reprise dans le code général des collectivités territoriales, article L2212-1 : il confère à la municipalité la charge de la police rurale qui « a pour objet d’assurer le bon ordre, la sureté, la sécurité et la salubrité publique ». Dans le temps et au fil des jurisprudences, la notion de dignité humaine apparaît, en même temps que celle d’une certaine moralité générale. La dignité humaine est aussi très difficile à définir, entre l’humanité (être humain), la personnalité (l’autonomie). La dignité et la moralité semblent être des notions servant à forger, renforcer et enrichir un droit. Ainsi, comme ce sont les polices municipales qui gardent et veillent sur l’ordre public, c’est l’institution représentante de l’Etat qui prend les mesures pour le maintien de l’ordre public. Le juge administratif apparaît lorsque le contentieux est disproportionné ou inadapté sur l’affaire. Dans le cadre de l’affaire de Dieudonné, les prises de décisions se sont faites en plusieurs temps et à plusieurs échelles. En effet, tout est parti de la décision du Tribunal Administratif de Nantes le 9 janvier 2014 en réponse à la circulaire ministérielle du 6 janvier 2014 qui visait de manière maladroite, l’interdiction des spectacles de Dieudonné en se justifiant par une jurisprudence qui condamne l’interdiction sans trois principes régit par l’arrêt Morsand sur Orge d’octobre 1995 : l’interdiction « s’inscrit dans la suite de spectacles ayant donné lieu à des infractions pénales » ; ces infractions ne sont pas des « dérapages » isolés, mais sont délibérées ; les propos sont susceptibles de porter atteinte au respect dû à la dignité de la personne humaine.

L’interrogation opposant Manuel Valls (Ministre de l’intérieur à l’époque) et la société les productions de la plume et Dieudonné M’Bala M’Bala est de savoir en quoi le spectacle pourrait porter atteinte au principe de dignité humaine et de troubles à l’ordre public. Sachant que ce trouble peut être matériel comme immatériel. Première question : pourquoi le Tribunal administratif et le Conseil d’Etat rendent-ils un avis contradictoire ? On peut soit douter de la véracité du Conseil d’Etat et de la possible influence du Ministre sur la décision. Car pour toute personne ayant étudié le droit administratif, la question devait vite être entendu en suspendant et annulant les arrêtés municipaux et préfectoraux. La circulaire du 6 janvier semblait être un peu seule au début, il existait douze décisions du juge administratif antérieures aux ordonnances du juge des référés du Conseil d’ Etat des 9 et 10 janvier 2014 qui avaient suspendues et annulées des arrêtés d’interdiction de spectacles de Dieudonné.

Ainsi, on peut se demander si la « jurisprudence Dieudonné » a établi un nouvel ordre entre liberté individuelle et ordre public ? La police administrative incompétente après l’annulation de la décision du Tribunal administratif de Nantes, le juge administratif a-t-il raison de considérer lui même l’ordre public ? Et dernièrement, il faut souligner la dangerosité de cette nouvelle jurisprudence, mal utilisé, elle pourrait porter gravement atteinte aux libertés individuelles. Comment la contenir ?

La délimitation de l’activité de la police administrative par le juge administratif (I), le nécessaire contrôle juridictionnel du juge administratif des libertés individuelles (II).

I- La délimitation de l'activité de police administrative par le juge administratif

Les fondements juridiques de la circulaire ministérielle ainsi que du recours du tribunal administratif de Nantes se basent sur la notion d'ordre public (A) et sur une interprétation extensive de celle-ci par le juge administratif qui met en cause Dieudonné. (B)

A – L'ordre public, finalité de la police administrative

        La mission de maintien de l'ordre public fonde la compétence des autorités en charge de la police administrative. Il s'agit bien là d'une mission préventive, qui vise au maintien et à la préservation de cet ordre pour le bien-être des citoyens. Il est classique de définir la notion d'ordre public par le trio qui la compose, c'est à dire la sûreté, la salubrité et la tranquillité. En ce sens, Maurice Hauriou parle d'un « ordre public matériel et extérieur ». La police administrative désigne ainsi l'action de l'administration pour maintenir et sauvegarder cet ordre public, seule condition à l'exercice de leurs libertés par les citoyens. Selon l'article L2112-2 du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT), c'est au profit du maire, du préfet, et du président du conseil général qu'est établi ce pouvoir au niveau régional et au profit du 1er ministre à niveau national. L'action de chacun d'entre eux est placée sous le contrôle du juge administratif.

À l'origine, la trilogie de ces composantes de l'ordre public apparaît dans le code des communes, puis, en 1996, dans le code général des collectivités territoriales

Dans le cas de l'affaire Dieudonné, c'est cette finalité de l'ordre public qui est au cœur de l'affaire. Il s'agira, tout au long de l'affaire, de savoir si le spectacle « Le Mur » représente ou non un trouble à l'ordre public, et si oui quels sont les moyens que celle-ci nécessite de déployer.

Dès le début de cette affaire, c'est une jurisprudence notoire du droit administratif qui est convoquée dans la circulaire ministérielle, celle de l'arrêt Benjamin datant de 1933. Dans cet arrêt qui oppose le Conseil d'État au Sieur Benjamin, l'ordre public est proclamé comme étant un motif nécessaire pour tout acte de police administrative sans quoi celui ci se verra annulé. La menace à l'ordre public ainsi que l'impossibilité à déployer des moyens pour la prévenir fonde l'action de la police administrative.

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