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Le droit de disposer de son corps

Dissertation : Le droit de disposer de son corps. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  4 Janvier 2021  •  Dissertation  •  2 069 Mots (9 Pages)  •  6 212 Vues

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Séance : les Droits-Libertés

Sujet : le droit de disposer de son corps  

“Le corps est l’une des données constitutives et évidentes de l’existence humaine : c’est dans et avec son corps que chacun de nous naît, vit, meurt; c’est dans et par son corps que l’on s’inscrit dans le monde et que l’on rencontre autrui (...). Le corps est notre destinée”

-Michela Marzano, La philosophie du corps, 2010

        Le droit de disposer de son corps est définit comme le fait d’être le seul maître de son corps et d’en disposer comme on l’entend, dans la limite du respect de l’ordre public et des bonnes mœurs. Cela implique également qu’autrui ne peut disposer de mon corps sans que j’y consente. Ce fut l’un des premiers droits clairement reconnu. Dans un premier temps, il a été reconnu dans un grand texte qui est l’Habeas Corpus (1679) où il est cité “ton corps t’appartient” (traduction). En France, le droit de disposer de son corps est plutôt récent. À titre d’exemple, nous pouvons citer la loi Veil datant de 1975 portant sur le droit à l’avortement. Nous pouvons également citer la loi Léonetti portant sur le droit de choisir ses traitements médicaux et relative aux droits des malades et à la fin de vie.

        L’indisponibilité de l’état des personnes permet de justifier les limites à la liberté de l’individu vis-à-vis de lui-même. Ces limites peuvent être nécessaires et justifiées mais peuvent devenir problématiques lorsqu’il s’agit d’un choix de l’individu concernant sa propre personne. Ces limites peuvent être dangereuses pour les libertés individuelles. Le principe d’indisponibilité de l’état des personnes a été consacré par la Cour de Cassation dans un arrêt rendu en Assemblée Plénière le 31 mai 1991, l’indisponibilité du corps humain est une expression utilisée pour dénommer ce qu’elle qualifie de “principe essentiel du droit français” selon lequel le corps humain ne serait pas une chose pouvant faire l’objet d’un contrat ou d’une convention posant ainsi des limites à la libre disposition de soi. La libre disposition du corps signifie que l’individu est laissé libre de ses choix, dans l’usage qu’il entend faire de son corps, de sa personne. Elle renvoie aux libertés fondamentales s’attachant à la sauvegarde de la personne : le droit de disposer de son corps et le droit à l’intégrité physique.

        Le pouvoir politique en France ne cesse de poser des limites à la libre disposition du corps, notamment en prenant en charge la définition de la “dignité humaine” en cherchant donc à protéger l’individu contre lui-même. Ce droit, garanti par l’article 8 de la CESDH, a une portée bien plus important que la simple protection de l’intégrité physique et son autonomie personnel pose aujourd’hui de nombreuses interrogations.

        Dès lors, on se pose la question si réellement une personne peut-elle disposer de son corps, agir contre lui-même ou encore porter atteinte à son intégrité physique et si elle est réellement libre de ses actions. C’est pourquoi nous pouvons nous demander si le droit de disposer de son corps est-il un droit absolu?

Pour ce faire, nous verrons que le droit de disposer de son corps existe (I) mais celui-ci connaît des limites rendant inefficace la volonté de l’individu (II).

  1. L’existence d’un droit de disposer de son corps au détriment de l’intégrité physique

        Le principe du droit de disposer de son corps doit être subordonné par un consentement tout en respectant la dignité humaine (A) et permet également de reconnaître l’existence d’une réelle liberté sexuelle (B) à savoir la liberté de changer son identité sexuelle, la liberté d’orientation sexuelle et enfin la liberté de commerce sexuel du corps.

 

  1. Le principe subordonné par le consentement au respect de la dignité humaine

  • De nombreux sujets font l’objet d’atteinte à l’intégrité corporelle de la personne en étant subordonné qu’au consentement du sujet et non forcément à l’intérêt médical. Par exemple les opérations de chirurgie esthétique, traitements expérimentaux, prélèvement d’organes, etc... Ces pratiques dénaturent le corps humains puisqu’elles le modifient. Elles semblent donc contrevenir au principe de la libre disposition de son corps. Les pratiques ne peuvent pas être considérées comme indigne en elles-même, alors que l’utilisation qui en est faite peut l’être.
  • En ce qui concerne la chirurgie, on distingue la chirurgie réparatrice et la chirurgie esthétique. L’État a tardé à encadrer ces pratiques et le statut du corps humain sera donc consacré qu’à partir de la loi du 4 mars 2002 relative à la chirurgie esthétique. Par exemple, dans un jugement du 24 juillet 2016, le tribunal correctionnel de Montpellier a condamné l’esthéticienne ayant pratiqué la pratique d’un peeling total
  • Concernant la stérilisation à visée contraceptive, la Cour de cassation a considéré “qu’une atteinte à l’intégrité du corps humain (...) pratiquée en dehors de toute nécessité thérapeutique, et à des fins strictement contraceptives, était prohibée par l’article 16-3 du code civil”. Depuis, la stérilisation féminine est considérée comme un moyen de contraception. Depuis la loi du 4 juillet 2001, la stérilisation volontaire est légalement autorisée avec un délai de réflexion de quatre mois.
  • Pour les opérations de collectes et prélèvements d’organes, les opérations doivent être autorisés par la loi à savoir dans l’intérêt thérapeutique direct d’un receveur et à des fins thérapeutiques ou scientifiques s’ils sont effectués sur une personne décédée (art L.1231-1 CSP). Le consentement préalable du donneur est une condition indispensable (art L.1211-2 CSP).

B) L’existence reconnue d’une réelle liberté sexuelle

  • Liberté de modifier son identité sexuelle : appelé aussi transsexualisme définit comme une discordance entre le sexe anatomique et le sexe psychologique. Il apparaît plus aisé d’assouvrir sa volonté de changer son identité sexuelle dans notre société actuelle. Il n’est pas nécessaire d’avoir suivi de traitement médical ou d’avoir été opéré. La demande est faite au niveau du tribunal.
  • Liberté d’orientation sexuelle : figure à l’art 14 de la CESDH protégeant le droit à la non discrimination mais également à l’article 21 de la Charte des droits fondamentaux de l’UE interdisant toute discrimination sur un motif d’orientation sexuelle.
  • Liberté de commerce sexuel du corps : une loi du 13 avril 1946, sous l’impulsion de Marthe Richard, permet de fermer les maisons closes qui malheureusement n’éradiquera pas la prostitution. Le droit de disposer de son corps peut se traduire par le choix pour une personne de se prostituer volontairement, de simplement consentir à des satisfactions sexuelles à un nombre de personnes indéterminé contre rémunération. Ce choix devrait être considéré comme une réelle liberté de commerce sexuel sur son corps
  • Contraception : cela se traduit par le choix de procréer ou de ne pas procréer. Pendant longtemps, le recours à des moyens de régulation des naissances par les contraceptifs était interdit. Il faudra attendre la loi du 28 décembre 1967 qui permet l’extension du champ d’application de la loi aux bénéfices des mineurs et sans autorisation parentale. Il faudra attendre 1974 pour que celle-ci soit prise en charge par la Sécurité sociale.
  • IVG : le débat porte sur le droit pour toute femme de disposer librement de son corps en choisissant de procréer ou non et la clause de conscience dont les médecins peuvent se prévaloir pour refuser de pratiquer une interruption volontaire de grossesse. Dans certains pays comme la Chine, viennent réglementer la liberté de procréer par exemple la règle de l’enfant unique sous peine d’amende. Bien que la volonté de l’individu semble avant tout être l’essence des libertés fondamentales, elle n’est parfois pas suffisante dans la mesure où il existe des limites au droit de disposer de son corps.

II) Les limites qui s’imposent à la libre disposition de son corps

        On s’aperçoit que le droit de disposer de son corps n’est pas un droit absolu. En ce sens, la liberté de disposer de son corps a été remise en question concernant la protection d’intérêts supérieurs (A) mais également concernant l’indisponibilité du corps humain (B).

  1. Un droit remis en question en vertu de la protection d’intérêt supérieurs

  • La dignité de la personne humaine est le prinicpe selon lequel une personne ne doit jamais être traité comme un objet ou un moyen mais comme une entité intrinsèque. La notion de dignité de la personne humaine a été introduite dans la DUDH de 1948 qui reconnaît que tous les êtres humains possèdent une “dignité inhérente” (préambule). Cela englobe un ensemble de droits inviolables tel que le droit à la vie,  le droit à l’intégrité physique et mentale, le droit de ne pas subir de torture, etc...
  • Limites posées par la protection de l’ordre et de la santé publique : par exemple concernant les pratiques sado-masochistes qui entraînent des dommages et risques corporels graves mais également l’interdiction de la cryogénisation qui est une limite au droit de disposer de son corps mort. Le Conseil d’État a refusé de considérer la cryogénisation comme un mode de sépulture.
  • Limites posées au nom de la protection de la vie humaine: par exemple les interventions chirurgicales urgent. C’est le cas des transfusions sanguines effectuées par le médecin malgré le refus du patient mais dans l’intérêt de celui-ci et en raison de son obligation de soin (art L.111-4 CSP). Autre exemple concernant l’euthanasie où l’individu ne peut choisir de mettre fin à sa vie par une autre personne. L’interdiction d’euthanasie constitue l’une des applications du prinicpe d’indisponibilité du corps humain qui contredit la liberté de disposer de son corps. Une affaire récente connu sous le nom de l’affaire Vincent Lambert démontrer ce type de situation. “La cour reconnaît qu’à partir du moment où les médecins estiment qu’ils sont en obstination déraisonnable de soins ou d’acharnements thérapeutique, si le patient a exprimé une volonté de ne pas prolonger les soins, alors le médecin doit suivre l’avis du patient, y compris si celui-ci n’est plus en état de consentir”.
  1. L’indisponibilité du corps humain : un principe édifié en vertu du droit de procréer
  • PMA : on se demande si le désir d’enfant ne se transforme pas en une demande qui traduirait l’idée d’un droit à l’enfant. Le cadre juridique de l’assistance médicale à la procréation a été posé par les lois de 1994 et les lois du 6 août 2004 et 7 juillet 2011. La PMA est un droit à la procréation qui peut être vu comme une limite au droit de disposer de son corps notamment pour les femmes seules. En France, la PMA n’est pas encore ouverte aux couples de femmes homosexuelles et aux femmes seules. Cependant, l’Assemblée Nationale a voté le 27 septembre 2019 en faveur de l’ouverture de la PMA à toutes les femmes. D’ailleurs, le Président de la République s’est dit favorable à l’ouverture de la PMA aux couples de femmes homosexuelles et aux femmes seules.
  • GPA : la Cour de Cassation utilise l’expression “indisponibilité du corps humain” pour affirmer le principe selon lequel le corps humain ne serait pas une chose pouvant faire l’objet d’un contrat ou d’une convention. Ce principe pose par conséquent des limites à la libre disposition de soi. Le principe d’indisponibilité du corps humain serait une règle non écrite mais affirmé par la Cour de cassation depuis 1975 et repose sur la notion de dignité humaine. On ne pourrait donc pas vendre ou louer une partie ou l’ensemble de son corps ce qui veut dire que la GPA est interdite à ce titre (Cass, 31 mai 1991). La GPA est assimilée à une marchandisation du corps de la femme et une chosification de l’enfant à naître. D’ailleurs, la Cour de cassation a également affirmé que le recours à la GPA à l’étranger ne faisait pas obstacle à l’adoption de l’enfant par l’époux du père biologique.
  • Par exemple dans une affaire célèbre, affaire Mennesson, la Cour considère que le refus de transcription de la filiation en France d’un enfant né de mère porteuse à l’étranger est une violation du droit au respect de la vie privée des enfants (article 8 CESDH). Donc la Cour fait prévaloir l’intérêt supérieur de l’enfant. Donc malgré l’interdiction de la GPA en France, cela ne doit pas faire obstacle à une reconnaissance de l’enfant du lien de filiation avec ses parents d’intentions (Cass, 4 octobre 2019)

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