La monarchie de l'Ancien Régime était-elle absolue ?
Dissertation : La monarchie de l'Ancien Régime était-elle absolue ?. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar bartontheflux • 5 Décembre 2017 • Dissertation • 4 383 Mots (18 Pages) • 1 037 Vues
INTRODUCTION :
Du milieu du XVIe siècle jusqu’au début du XVIIe siècle, règne un climat d’insécurité et de violence sur le royaume français. Durant le règne de François Ier, de 1515 à 1547, une fracture se fait au sein de la religion chrétienne. Des penseurs dénoncent la vénalité de l’Eglise catholique et veulent se détacher de la papauté, c’est la naissance du protestantisme par le biais d’un mouvement mené par Luther puis plus tard Calvin, nommé la Réforme. Cette séparation religieuse est mal vue par la royauté qui va réprimer ce nouveau courant jusqu’à entrainer huit guerres de religion, particulièrement dévastatrices, qui dureront jusqu’à la fin du XVIe siècle. Ces guerres vont entrainer une certaine révolte face à la monarchie avec les régicides des rois Henri III, en 1589, et de son successeur Henri IV en 1610. Le pouvoir royal est mis à mal, la population ne se sent plus protégée par son monarque. Des intellectuels comme Bodin ou Bossuet vont donc émettre des raisonnements portant sur le renforcement des pouvoirs de la monarchie afin d’obtenir une paix civile ; ce sont les premiers théoriciens de l’absolutisme.
On pourrait définir la monarchie comme un régime intrinsèquement absolue de par son étymologie grecque monos qui signifie seul et archè signifiant commander ; pourtant il existe plusieurs variantes de ce système politique où le prince en charge des pouvoirs est parfois limité par des externalités propres au contexte et à l’époque. Ici, on veut distinguer l’absolutisme monarchique des autres systèmes de monarchie. On peut parler d’absolutisme au sein d’une monarchie, lorsque tous les pouvoirs disponibles sont réunis et exercés par le prince et seulement lui, et surtout lorsqu’il n’a de comptes à rendre à personne, qu’il est totalement détaché de normes ou lois pouvant entraver ses pouvoirs.
Ici on s’intéresse au régime monarchique, en France, sous l’Ancien Régime. L’Ancien Régime est une période difficilement définie dans le temps, ce terme est utilisé pour la première fois par les révolutionnaires à la fin du XVIIIe, juste avant la Révolution, pour désigner le régime politique qu’ils veulent abolir. Ils prennent en compte ici le règne de Louis XVI mais aussi de ses prédécesseurs, jusqu’à Louis XIII.
Etudier le régime politique en France du XVIe au XVIIIe permet, d’une part d’analyser le fonctionnement des statuts juridiques de tout un chacun mais aussi des institutions existant sous la monarchie dite absolue, et d’autre part de comprendre l’assise du pouvoir monarchique, qui selon les périodes sera soutenue ou décriée.
Seulement peut-on dire que la monarchie sous l’Ancien Régime était absolue ? On répondra à cette question en voyant tout d’abord comment la monarchie a pu renforcer ses pouvoirs grâce à l’immobilité sociale et sociétale qui favorisait l’installation d’un certain absolutisme d’une part, et de quelles manières la monarchie s’est détachée de toutes contraintes d’autre part pour, dans un second temps voir la faiblesse de la monarchie face à ses sujets et ses institutions en décrivant en premier lieu la non-évolution de la société des privilèges qui fait apparaitre de nouvelles oppositions au sein de son peuple et en second lieu la résistance des parlements face au pouvoir royal.
- L’absolutisme monarchique : sources et application
Lorsqu’une société se construit, il faut pouvoir assurer au peuple un certain degré de sécurité d’une part, mais aussi de subsistance. A cette époque, on peut aussi ajouter la notion de réconfort moral et spirituel. C’est autour de ces trois besoins nécessaires au bon fonctionnement d’une société que la division sociale et juridique entre les individus s’est faite.
- L’immobilité sociale et sociétale favorable au renforcement du pouvoir royal
On peut opérer une première distinction entre les individus, les croyants et les non-croyants, la société de l’époque étant totalement régie par la religion, les non-croyants perçus comme hérétiques étaient tout simplement exclus de la société. Au sein des croyants on peut distinguer trois ordres distincts avec des droits privés, appelés privilèges, immensément différents selon l’appartenance d’un individu à un ordre. Cette répartition hiérarchisée des individus peut être vue comme une tripartition assez complémentaire. D’une part, au sommet de la pyramide des privilèges, on trouve le clergé ; les religieux étant la seule partie de la population sachant lire et écrire, ils détiennent donc le savoir et l’intellect. De plus, le clergé assurant le bien-être moral du peuple par le biais par exemple de l’accès au paradis des fidèles, s’est très vite fait attribuer un statut particulier : les clercs ne paient pas d’impôts et ne peuvent être jugés que dans un tribunal de l’Eglise. A leur côté on retrouve les nobles qui assurent la sécurité de la population, leur statut est aussi particulier puisqu’ils ont le droit exclusif de porter une arme et sont aussi jugés dans leurs propres tribunaux par leurs pairs. Le dernier ordre de la société qui regroupe quasiment toute la population, c’est le tiers, ceux qui produisent et permettent la subsistance de chacun, c’est sur eux que pèse tous les impôts. On observe dans chacune des fonctions de ces ordres une certaine complémentarité, aucun ordre ne peut perdurer sans les deux autres ; Charles Loyseau dira dans son Traité des ordres en 1610 : « il faut qu’il y ait de l’ordre en toutes choses, et pour la bienséance, et pour la direction d’icelles […] Car nous ne pourrions pas vivre en égalité de condition.». Cette segmentation a pour conséquence une quasi immobilité sociale ; la noblesse étant un droit de naissance, le statut et les privilèges en découlant sont inaccessibles ; on peut seulement devenir clerc mais c’est inaccessible pour une majorité du tiers qui eux n’évolueront sans doute jamais. Cette non-évolution va permettre à la monarchie d’installer un pouvoir incontestable, non pas par la force, mais bien par l’inertie de la structure sociétale, chaque ordre ne cherchant pas à atteindre un autre ordre ou bien le mettre à mal mais voulant l’accès à de nouveaux privilèges pour soi et son ordre.
On retrouve cette recherche de privilèges pour soi et les siens dans la division faite entre les gens de campagne et des villes mais aussi entre les différents corps de métiers. L’émergence des villes près des châteaux des seigneurs va créer de nouvelles divisions entre le tiers, puisque si l’on est habitant d’une ville, on devient immédiatement roturier, c'est-à-dire une personne libre contrairement aux serfs, individus du tiers ayant un statut de dépendance par rapport à leur seigneur. On peut aussi ajouter que les villes ont un statut juridique distinct, avec des règlements inhérents à la ville faits par des magistrats municipaux mais aussi une certaine liberté politique, avec la possible instauration d’impôts locaux mais aussi, dans certains cas, un droit de guerre. Ajouté à cela on peut distinguer des privilèges propres à un certain métier par le biais de l’émergence des statuts corporatifs, ce sont des statuts juridiques et règles de droit fixant l’appartenance à tel ou tel métier. Selon son métier, on doit respecter un ensemble de normes fixant l’accès au métier, mais aussi un modèle de comportement et d’exercice du métier qui doit être respecté pour continuer à faire partie de ce corps de métier. Ces corporations prennent de plus en plus d’importance et viennent augmenter encore plus les divisions sociétales et sociales entre les individus. En plus de faire partie d’un certain ordre, le tiers en l’occurrence, on peut se retrouver dans la catégorie des serfs ou des roturiers, puis faire partie d’un certain corps de métiers, et donc avoir un statut et des privilèges différents de son voisin. Toutes ces divisions permettent à la monarchie d’avoir une large marge de manœuvre ; s’ajoute à cela la dimension religieuse qui régit toute la société, aussi bien la société d’ordres que de corps.
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