Dissertation sur le patrimoine

Dissertation de droit civil : L’unité du patrimoine.

        Denis Heudré déclarait en 2014 « il faudrait inscrire l’humour au patrimoine immatériel mondial de l’Unesco ». Cette déclaration montre que les limites du patrimoine sont difficilement définissables, et que la question de l’évolution de la notion de patrimoine est de plus en plus récurrente

        Le patrimoine n’est pas défini dans le code civil, il n’y a pas d’allusion au patrimoine pour le définir. Plusieurs lois parlent du patrimoine et la diversité de ces lois témoignent de la large application du terme patrimoine. Il existe différent types de patrimoine, tel que le patrimoine culturel, le patrimoine national, le patrimoine mondial de l’Unesco etc. La législation offre donc une définition floue et diverse, c’est donc la doctrine qui a défini le terme de patrimoine en droit français et particulièrement les auteurs tels que Aubry et Rau qui sont issus du 19eme siècle. Ces deux auteurs du 19eme siècle définissent le patrimoine comme l’ensemble des rapports de droits appréciables en argent et parle de compartiment passif et actif. Le patrimoine est donc l’enveloppe où se trouvent ces deux compartiments. L’unité de ce patrimoine signifie, selon cette théorie classique du 19eme siècle que la personne physique ne devrait avoir qu’un seul patrimoine, les patrimoines d’affectation sont donc prohibés.

        Cette question à caractère économique s’intéresse également au régime juridique du patrimoine et son unité. Le but de ce sujet et d’analyser si au regard des modèles allemands et anglo-saxon, la théorie classique de l’unité du patrimoine serait en train d’évoluer ou si le droit français maintient fermement un patrimoine unique pour chaque personne. Ainsi nous répondrons à la problématique suivante : l’unité du droit français est-elle une thématique encor d’actualité dans la position actuelle du droit français ? La première partie exposera la théorie de l’unité du droit et les critiques qu’elle suscite (I). La deuxième partie analysera les aménagements progressifs de l’unité du patrimoine (II).

1. La théorie classique de l’unité du droit critiquable :

Le patrimoine entretient un lien très fort avec la personnalité humaine (physique), selon Aubry et Rau. Cette idée est l’essence de la théorie classique de patrimoine (A). Cependant cette théorie suscite de plus en plus de critiques (B).

1. La perception du patrimoine comme l’émanation de la personnalité :

Dans leur traité sur le patrimoine, Aubry et Rau l’exposent comme une universalité de droit, cela veut dire que les biens à l’intérieur de ce droit ne sont pas identifiables. Le patrimoine est ainsi l’enveloppe formant un tout global. Pour les deux auteurs de Strasbourg, il y a un lien étroit et indéfectible entre la personne et le patrimoine. Seules les personnes peuvent avoir un patrimoine, tout ce qui n’est pas qualifiable de personne humaine n’a pas de patrimoine. Toutes les personnes ont un patrimoine, même un nouveau-né. Les personnes ont toutes le même contenant, c’est le contenu qui diverge entre les personnes. Le patrimoine et l’émanation de la personnalité car le patrimoine dure autant de temps que la personnalité juridique d’une personne. Le patrimoine s’acquiert, en même temps que la personnalité juridique et se perd également à la mort de la personne. La clé de voûte de la théorie classique du patrimoine est l’unicité du patrimoine, une personne ne peut avoir qu’un seul patrimoine. Lorsque l’on nait on possède un patrimoine qui est unique est à vie. La cour de Cassation retient cette théorie, comme on a pu le constater lors de son arrêt rendu le 7 Avril 2004. Lors du litige concerné, un entrepreneur se défend d’être mis en faillite pour ses deux entreprises, du fait de l’unité du patrimoine. La Cour de cassation retient cette solution, et donc fait appel à la notion d’unité du patrimoine.

Cette théorie est aujourd’hui assez critiquée, au profit d’un patrimoine unique, comme le patrimoine d’affectation.

1. La critique de la théorie classique :

Parmi les critiques de la théorie classique du droit, le fait qu’elle soit trop abstraite a rendu les personnes sceptiques. La théorie de l’unité du droit est également remis en cause par la personnalité morale. Effectivement, la personnalité morale peut avoir son propre patrimoine, sachant qu’il suffit seulement de deux personnes physiques pour créer une personne morale. Certains disent que le patrimoine de la personne morale serait en réalité le patrimoine professionnel de la personne physique et son patrimoine unique serait son patrimoine personnel. Cependant la procédure pour fonder une personne morale est très complexe. Seulement cette théorie est dangereuse pour les entrepreneurs. Etant donné que si l’entrepreneur échoue dans son projet, il devra rembourser à son ou ses créanciers de lourdes sommes qui risquent de mettre en périls la totalité des biens de son patrimoine tel que sa maison. La théorie inverse de la théorie classique est la théorie allemande, qui est pratiqué dans de nombreux pays anglo-saxons. C’est la théorie du patrimoine d’affection, elle signifie qu’une personne pourrait créer autant de patrimoine qu’elle le désire et l’affecter à une activité particulière. L’entrepreneur ne risque ainsi pas la saisie de la totalité de ses biens, mais cela rend le remboursement à crédit plus difficile à réaliser pour les banques.

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