De Tripoli à Alep, que reste-t-il du concept de la responsabilité de protéger ?
Dissertation : De Tripoli à Alep, que reste-t-il du concept de la responsabilité de protéger ?. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar lucash06 • 13 Mars 2017 • Dissertation • 2 203 Mots (9 Pages) • 902 Vues
De Tripoli à Alep, que reste-t-il du concept de la responsabilité de protéger ?
Dans son rapport du Millénaire de 2000, Kofi Annan, le Secrétaire général d'alors et prix Nobel de la paix, rappelant les échecs du Conseil de sécurité pour agir avec décision au Rwanda et en ex-Yougoslavie, a lancé un défi aux États Membres : "Si l’intervention humanitaire constitue en fait une attaque inacceptable sur la souveraineté, comment devons‐nous réagir face à un nouveau Rwanda, à un nouveau Srebrenica, à une violation flagrante et systématique des droits de l’homme qui porte atteinte à tous les préceptes de notre humanité commune ?" Kofi Annan pose ici une problématique qui est toujours d'actualité avec les conflits en Libye et plus récemment en Syrie.
Tripoli est la capitale de la Libye. Avec une population de 1,68 million d'habitants, Tripoli est la plus grande ville, le principal port et le plus grand centre industriel et commercial de Libye. C'est aussi le siège du gouvernement. Alep est une ville de Syrie, chef-lieu du gouvernorat d'Alep, le gouvernorat de Syrie le plus peuplé, situé dans le nord-ouest du pays. Avec une population de 2 millions 132 100 habitants en 2004, Alep était la ville la plus peuplée du pays et du Levant avant l'arrivée de la guerre civile.
Toutes deux ont fait l'objet de guerres civiles internationalisées, avec la différence qu'en Libye elle a duré moins d'un an, alors qu'en Syrie le conflit entamera au printemps sa septième année. L'impuissance de l'Organisation des Nations Unies (ONU) paraît manifeste et traduit, au regard des victimes civiles, un certain malaise quant à l'efficacité du concept de la responsabilité de protéger, l'"arme pacifique" de la communauté internationale.
Le concept de la responsabilité de protéger est, comme son nom l'indique, un principe abstrait destiné à responsabiliser les grandes puissances de ce monde mais aussi les pays concernés dans la protection des populations civiles. Le concept est historiquement né du « droit d’ingérence » humanitaire conçu en réponse aux massacres de masse de populations civiles au Rwanda et en Bosnie-Herzégovine. Il se distingue néanmoins du « droit d’ingérence » par l’affirmation d’un devoir d’intervention, et non plus seulement d’un droit soumis à certaines conditions précises et limitatives. Le concept de la responsabilité de protéger trouve sa consécration internationale dans le Document final du Sommet mondial de 2005
Dans son rapport du Millénaire de 2000, Kofi Annan, le Secrétaire général d'alors et prix Nobel de la paix, rappelant les échecs du Conseil de sécurité pour agir avec décision au Rwanda et en ex-Yougoslavie, a lancé un défi aux États Membres : "Si l’intervention humanitaire constitue en fait une attaque inacceptable sur la souveraineté, comment devons‐nous réagir face à un nouveau Rwanda, à un nouveau Srebrenica, à une violation flagrante et systématique des droits de l’homme qui porte atteinte à tous les préceptes de notre humanité commune ?".
L'intervention humanitaire constitue un enjeu d'une grande ampleur, aussi bien au regard du droit humanitaire qu'aux valeurs auxquelles s'identifient les Etats de la communauté internationale. Dès lors, le concept de la responsabilité de protéger, outil de la communauté internationale pour tenter de faire respecter les droits de l'homme, nécessiterait une pleine application.
Ainsi, nous pouvons nous demander si le concept de la responsabilité de protéger trouve aujourd'hui une réelle effectivité.
Si de nombreux outils permettent l'applicabilité théorique du concept de la responsabilité de protéger (I), force est de constater la difficulté pratique du concept de la responsabilité de protéger (II).
I. L'applicabilité théorique du concept de la responsabilité de protéger
La notion de la responsabilité de protéger a été rendu efficace grâce au renforcement de ce conception par des principes juridiques (A), mais également par l'autorité maintenue des institutions internationales (B).
A. Le renforcement du concept par des principes juridiques
Le débat sur l'intervention humanitaire qui est survenu dans les années 90 trouve son origine dans l'arrêt de la Cour internationale de Justice (CIJ) Affaire des activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci de 1986, faisant état d'une coutume en évolution. Dans cet arrêt, la Cour énonce que la pratique des Etats tend vers une sorte de droit général, l'établissement d'une nouvelle coutume qui autoriserait les Etats à intervenir pour appuyer l'opposition interne d'un autre Etat, dont la cause paraîtrait digne en raison de valeurs politiques et morales avec lesquelles l'Etat s'identifierait.
Des principes de droit humanitaire viennent également renforcer le concept de la responsabilité de protéger. Dans l'avis consultatif Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaire de 1996, la Cour énonce que le recours à l'arme nucléaire dans le cadre de l'exercice du droit à la légitime défense doit satisfaire aux exigences du droit applicable dans les conflits armés, dont les principes et règles du droit humanitaire.
Enfin, des principes protecteurs tel le devoir de protection ont émergés à l'issue de l'Assemblée Générale de l'ONU. Dans son Document final du Sommet mondial de 2005, un consensus a permis d'établir que le concept de la responsabilité de protéger est renforcé par le devoir qui incombe aux Etats de protéger les populations du génocide, des crimes de guerre, du nettoyage ethnique et des crimes contre l’humanité.
B. L'autorité maintenue des institutions internationales
La Cour internationale de Justice dispose d'une certaine appréciation souveraine et indépendante des Etats lui ayant confié le règlement de certaines affaires. Dans l'Affaire des Plates-formes pétrolières de 2003, c'est la Cour qui détermine si une action relève de la légitime défense. En effet, il revient à l'appréciation de la Cour et non à l'appréciation subjective de la partie intéressée de déterminer si une action de légitime défense au regard de l'article XX de la Charte des Nations Unies pouvait être qualifiée de nécessaire et proportionnée. En l'espèce, la Cour devait examiner si les attaques des Etats-Unis contre l'Iran relevaient de la légitime défense.
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