Commentaire d'arrêt du 13 décembre 2011
Commentaire d'arrêt : Commentaire d'arrêt du 13 décembre 2011. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar apeja • 6 Février 2018 • Commentaire d'arrêt • 2 946 Mots (12 Pages) • 847 Vues
TD Droit Pénal Séance 5
Il n’a jamais été contesté que celui qui se défend contre une agression injuste ne doit pas être puni ou doit l’être du moins sévèrement, Cicéron voyait la légitime défense comme un principe de droit naturel.
Dans un arrêt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation du 13 décembre 2011, on retrouve une exception du principe de la légitime défense.
En l’espèce, M.X a tiré avec une arme à feu sur M.Y, qui celui-ci c’était introduit dans le jardin de sa propriété. De plus, il a également tiré sur M.Z qui le menaçait avec un marteau. Ainsi, M.Y et M.Z ont eu une incapacité de travail supérieur à huit jours. Alors, M. Y et M.Z tente une action en justice, M.X conteste la décision en faisant appel.
La Cour d’Appel de la 21ème chambre de Versailles, le 15 novembre 2010 statue en faveur de M.Y et M.Z. Elle ne retient pas la légitime défense dans cette affaire car il y a une disproportion entre l’atteinte au bien et les moyens employés par M.X. En effet, M.X avait été informé le soir même qu’à 20h des individus comme le fils de M.Z pourraient venir chercher un objet, une barque chez ce dernier. De plus, aucun indice montre que M.X et sa famille encourait un danger, qui plus ait celui-ci étant chasseur savait pertinemment que se servir d’une arme à feu est dangereux. Par ailleurs, le prévenu M.X est de mauvaise foi, car celui-ci dément le fait d’avoir tiré librement dans les jambes de M.Y.
Ainsi, M.X se pourvoit en Cassation. La Cour de Cassation rejette le pourvoi de M.X le 13 décembre 2011. Celle-ci estime qu’il y a une absence de présomption, une absence de danger grave et imminent et que la réaction de M.X était disproportionné face à ses victimes. De plus, la Cour de Cassation se basse sur les motifs invoqués par la Cour d’Appel en reprenant les critères classiques de la légitime défense et donc elle reste indifférente à la légitime défense putative, elle a une appréciation objective.
C’est pourquoi, on se demandera dans quelles mesures la légitime défense peut exonérer une personne de sa responsabilité pénale ?
Cet arrêt permet de connaître l’appréciation des critères de la légitime défense, de comprendre la menace putative et sa prise en compte, comprendre le refus de la légitime défense contre une infraction putative.
Tout d’abord, on verra dans une première partie que la légitime défense constitue un fait justificatif dont la mise en œuvre repose sur des conditions précises (I) puis qu’elle génère des conséquences légales qui sont dans la continuité de la jurisprudence (II).
I) Les conditions précises de la légitime défense comme fait justificatif
Dans cette première partie, on va voir le champ d’application de la légitime défense (A) puis les conditions d’exercice de cette légitime défense (B).
A) Le domaine d’application large de la légitime défense
L’ancien Code Pénal de 1810 ne prévoyait la légitime défense qu’en cas d’agression contre l’intégrité physique mais la jurisprudence a étendu ce fait justificatif à toutes les agressions contre la vie ou l’intégrité corporelle, mais aussi à celles contre la vertu, la pudeur et l’honneur. L’article 328 du Code Pénal ne visait que l’attaque contre les personnes. Cette limitation était incompatible avec le fondement assigné par le Code à la légitime défense. La légitime défense est un droit en cas d’agression, mais aussi un devoir de participation à la défense de l’ordre social troublé par l’agression. Ainsi, dans un arrêt de la chambre des requêtes du 25 mars 1902, on a étendu la légitime défense an cas d’attaque contre un bien. Cette extension n’est pas considérée comme dangereuse pour l’ordre social, la défense devait être proportionnée à l’attaque pour pouvoir être admise en tant que fait justificatif, arrêt de la chambre criminel du 4 aout 1979. En l’espèce, dans notre arrêt M.X a utilisé une arme à feu « un fusil à pompe de type Mossberg » pour s’en servir sur M.Y et M.Z. « s'est introduit, de nuit, par escalade, dans le jardin de la propriété de M. X. » La Cour d’Appel comme la Cour de Cassation a estimé selon l’arrêt que « le prévenu a eu une réaction disproportionnée face au comportement de ses victimes qui ne constituait pas un danger grave et imminent ». En effet, il est évident qu’un propriétaire qui tue celui qui lui dérobe des fruits ne peut pas être justifié par la légitime défense. Le nouveau Code pénal a clairement précisé cette position. En ce qui concerne les actes de défense des bien, l’article 122-5 alinéa 2 du Code Pénal exclut tout acte de défense consistant dans un homicide involontaire et cet acte doit être strictement nécessaire au but poursuivi. Il appartient aux juges du fond de se prononcer sur ce point. En l’espèce, « le prévenu est de mauvaise foi quand il affirme avoir tiré dans le sol sur du béton qui aurait fait ricocher la balle ce qui s'est démenti par les constatations médicales sur les blessures de la victime qui font apparaître au contraire qu'il a parfaitement maîtrisé son tir dans les jambes », M.X a donc bien visé volontairement M.Y. De plus, celui-ci savait pertinemment sur qui il tirait « M. X..., quand il a tiré sa seconde cartouche, savait sur qui il faisait feu ; qu'à ce moment-là il s'était rendu compte qu'il avait blessé M. Y...ce qui lui permettait, à supposer qu'il ne l'ait pas déjà compris, de réaliser qui étaient ses « visiteurs » ». D’une part, M.X n’avait aucune excuse car le cadre était en sa faveur étant donné qu’il était sur sa propriété et que « la lumière était allumée » et « que de plus comme il l'indique lui-même, il a vu M. Z...debout sur un des piliers de sa clôture, qui l'insultait et qui a jeté une bouteille dans sa direction, ce dont attestent ses deux filles ». Enfin, avant le code de 1994, la chambre criminelle de la Cour de Cassation du 16 février 1967 avait limité l’application aux seules infractions volontaires au motif que la légitime défense était inconciliable avec une infraction non intentionnelle, qui est incompatible avec l’existence d’une riposte. Cette conception a été critiquée car elle tend à confondre le caractère volontaire de l’acte et la volonté de transgresser la loi pénale, ce qui suppose vouloir le dommage. Cette jurisprudence s’est maintenue dans un arrêt du tribunal correctionnel de Troyes du 24 mai 1978.
Cette cause d’irresponsabilité pénale repose sur des conditions strictes et rigoureuses, elles concernent les actes d’agression et les acte de défense (B).
B) La subordination des actes de légitime défense à des conditions strictes
Qu’elle soit dirigée contre la personne ou contre les biens, l’attaque ne peut justifier l’acte délictueux accompli en défense, que si elle actuelle et injuste. La condition d’actualité de l’agression suppose que l’attaque doit avoir eu lieu dans le même temps que l’agression. L’agression doit consister dans un mal éminent qui n’a pas être écarté qu’en commettant un délit, chambre criminelle de la Cour de Cassation du 17 juin 1927. Ce mal éminent doit être objectivement vraisemblable et ne doit pas exister seulement dans l’imagination de la personne, arrêt du 9 octobre 1979. C’est ce qu’on appelle l’atteinte putative, c’est une mauvaise appréciation de la réalité. Dans notre cas, M.X a tiré sur M.Y en pensant craindre un danger pour lui et sa famille alors « qu'il n'avait aucune raison de tirer sur lui et qu'il a fait feu sans le reconnaître ». De plus, il y a une divergence des versions entre M.X et M.Z « d'abord le lieu où se trouvait M. Z...au moment du tir, ensuite la question de savoir si M. Z...menaçait M. X... avec un marteau ». Effectivement, pour M.X, M.Z se trouvait à 5 mètres de lui et il était sur sa propriété alors que l’arrêt énonce le contraire « M. Z...soutient qu'il n'est pas entré dans la propriété, qu'il se tenait à l'extérieur, derrière le portail ; qu'en outre, il affirme qu'il n'avait pas de marteau ». Il y a donc une mauvaise appréciation de la réalité puisque des éléments matériels ne corroborent pas la version de M.X « que des traces de sang ont été trouvées dans l'allée derrière le portail, par ailleurs la nature de ses blessures laisse penser qu'il était relativement éloigné de M. X... l'expertise balistique mentionnant qu'en tout cas il était à plus de 3 mètres de lui ».
De plus, l’appréciation du caractère actuel de la défense appartient au juge. En cas de réaction contre un acte passé lorsque l’agresseur s’est retiré, il n’y a pas légitime défense, mais vengeance. Il n’a pas d’avantage légitime défense en cas de menace d’un mal futur. Celui qui est l’objet de menaces graves, art 222-17 et 222-18 du CP doit en informer et faire poursuivre les auteurs devant les tribunaux, il ne peut se faire justice soi-même. En l’espèce, M.X a tiré un coup de feu après un acte passé de M. Z, ce n'est donc pas de la légitime défense mais une riposte « M. Z... debout sur un des piliers de sa clôture, qui l'insultait et qui a jeté une bouteille dans sa direction, ce dont attestent ses deux filles ». De plus, l’erreur d’appréciation ne doit pas être trop inexcusable, par exemple, un père qui tue son fils pour l’avoir pris pour un voleur, c’est inexcusable.
Par ailleurs, l’agression doit également présentée un caractère injuste pour permettre de justifier l’acte de légitime défense. Ce caractère suppose que l’agression n’est pas fondée en droit, n’est ni autorisée, ni ordonnée par la loi. Lorsqu’elle est opérée par la loi ou le commandement de l’autorité légitime ou lorsqu’elle est conforme au droit, l’agression est juste et la défense n’est plus légitime. Ainsi, en état de légitime défense, celui qui s’est soustrait par la violence à des mesures de contrôle d’identité et d’arrestation effectués par un commissaire en vertu d’un mandat ou celui qui résiste à une arrestation opérée par un simple particulier qui conformément à l’article 73 CPP a qualité pour appréhender l’auteur d’un crime ou d’un délit flagrant est puni d’une peine d’emprisonnement, arrêt du 1er octobre 1979 de la chambre criminelle de la cour de cassation. Puis, on va voir les conditions tenant à l’acte de défense. L’agression peut être actuelle et injuste sans que la défense puisse constituer un fait justificatif exonératoire de responsabilité pénale. Il faut également que la défense réponde à deux conditions : la nécessité et la mesure. La légitime défense des personnes doit avoir été « commandé par la nécessité » dans l’ancien droit l’acte était considéré nécessaire que lorsque l’acte accompli constituait le seul moyen de se défendre contre l’agression ainsi le délinquant ne pouvait justifier son acte lorsqu’il avait eu la possibilité de prendre la fuite. Contrairement à l’Ancien droit, la défense sera jugée nécessaire même lorsque celui qui à d’autres moyens que la commission de l’infraction, pour résister à l’attaque puisque la légitime défense repose sur un droit et peut être même un devoir. En l’espèce, l’arrêt énonce « la riposte du prévenu aux actes de provocation de M. Z...apparaît largement disproportionnée et exclut la légitime défense ». Toutefois, la nécessité de la légitime défense sera plus difficilement admise, s’il s’agit de blessures graves causées par un adulte à un enfant qui l’avait attaqué ou lorsque l’agresseur l’a atteint dans le dos, arrêt du 11 mai 1995 de la chambre criminelle de la cour de cassation. En ce qui concerne la défense des biens, l’acte doit être « strictement nécessaire au but poursuivi ». Les juges doivent donc apprécier tout spécialement cette nécessité. Cette expression contemporaine est interprétée pour certains auteurs, dont M. Desportes et le Guennec comme la nécessité que la riposte choisie soit l’unique moyen d’interrompre l’exécution d’une infraction dirigée contre un bien. Dès lors toute riposte qui serait précédée de sommations susceptibles de pouvoir éviter les violences semble étrangère au domaine de la légitime défense. En outre, la mesure doit être mesurée, c’est-à-dire proportionnée à la gravité de l’attaque. L’appréciation de la proportion est une question de fait appréciée par les juges. Par exemple, celui qui tue quelqu’un pour avoir reçu une gifle dépasse la mesure. Mais la défense mesurée ne signifie pas que le mal causé par celui qui s’est défendu ne soit pas plus grave que le mal qui serait résulté de l’agression, exemple la femme qui tue l’homme qui voulait la violer, constitue un état de légitime défense. Toutefois, en cas d’attaque contre les biens, la proportion entre la défense et l’attaque doit être plus rigoureuse, car la loi énonce expressément que la défense d’un bien ne peut légitimer un homicide involontaire. Il peut être loisible de considérer le fait que le législateur n’ait pas exclu du domaine de la légitime défense des biens d’autres infractions telles que les violences ayant entrainer la mort sans intention de la donner ou encore les violences ayant entrainer une mutilation ou une infirmité permanente.
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