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Commentaire d'arrêt civil

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Par   •  12 Avril 2018  •  Commentaire d'arrêt  •  2 968 Mots (12 Pages)  •  590 Vues

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Commentaire Civ.1ère, 3 juin 2010 

Il s’agit d’un arrêt de la première chambre civile en date du 3 juin 2010 reposant sur le défaut d’information du médecin. L’article 35 du Code de déontologie médical dispose qu’« il doit à la personne qu'il examine, qu'il soigne ou qu'il conseille, une information loyale, claire et appropriée sur son état, les investigations et les soins qu'il propose ».

Par cet arrêt rendu le 3 juin 2010 la Cour de cassation a opéré un revirement de jurisprudence permettant une meilleure indemnisation des victimes en ce qui concerne la déficience de l'information médicale. La Cour de cassation affirme que l’absence d’information du patient cause, en elle-même, un préjudice indemnisable, sur le fondement de la responsabilité délictuelle. Un nouveau dommage moral est reconnu : le préjudice « d’impréparation ». En effet la première chambre civile, jusqu'à présent hermétique à une solution de plus en plus réclamée par la doctrine, a rendu un arrêt selon lequel le défaut d'information constitue un préjudice indemnisable en soi, c'est-à-dire indépendamment de toute perte de chance pour la victime.

En l'espèce, un patient subit, au mois d’avril 2001, une intervention chirurgicale, plus précisément une adénomectomie de la prostate, et c’est alors que ce dernier se plaint de  troubles dont il prétend ne pas avoir été préalablement informé.

Il met alors en avant la responsabilité du médecin ayant pratiqué l’intervention chirurgicale et se fonde, notamment, sur la violation de l’obligation d’information préalable qui lui revenait. La cour d’appel, après avoir constaté le manquement du médecin à son devoir d’information, écarte sa responsabilité et rejette la demande du patient, à savoir la demande d’indemnisation. Pour statuer comme tel, les juges du fond ont notamment relevé qu’au regard des risques auxquels l’exposait sa maladie, le patient n’avait pas d’autre alternative que de subir l’intervention chirurgicale à laquelle il n’aurait pas pu renoncer.

Dès lors, l’intervention étant incontournable, le patient ne pouvait reprocher au médecin de lui avoir fait perdre une chance d’éviter les troubles qui en étaient résulté.

La Cour de cassation, saisie du pourvoi formé par le patient, était alors appelée à se prononcer sur les conséquences de l’inexécution par le médecin de son obligation d’information préalable.

Cependant , suite à un revirement de jurisprudence, la première Chambre civile de la Cour de cassation casse l'arrêt d'appel, au visa des articles 16, 16-3, alinéa 2 et 1382 du Code civil, au motif « qu’il résulte des deux premiers de ces textes que toute personne a le droit d’être informée, préalablement aux investigations, traitements ou actions de prévention proposés, des risques inhérents à ceux-ci, et que son consentement doit être recueilli par le praticien, hors le cas où son état rend nécessaire une intervention thérapeutique à laquelle elle n’est pas à même de consentir ; que le non-respect du devoir d’information qui en découle, cause à celui auquel l’information était légalement due, un préjudice, qu’en vertu du dernier des textes susvisés, le juge ne peut laisser sans réparation ».

L’intérêt du sujet serait alors d’analyser plus précisément l'apport de cet arrêt afin de comprendre l’existence d’un tel revirement de jurisprudence.

Nous pourrions donc nous poser la question, à savoir : le professionnel de santé peut-il voir sa responsabilité délictuelle engagé pour l'unique préjudice de défaut d'information à son patient ?

La réponse que donne la Cour de cassation est ainsi sans ambiguïté : l’inexécution par le médecin de l’obligation d’information qui lui incombe cause un préjudice au patient que le juge doit réparer. Ce faisant, la Haute juridiction opère un double revirement. Elle reconnaît la responsabilité du médecin qui manque à son obligation d’information sur un fondement nouveau (I) dont elle tire la présomption, elle-même nouvelle, d’un préjudice réparable du patient (II)

A) L’absence de sanction pour préjudice de défaut d'information consacrée par un régime antérieur

        De prime abord, dans le cas où l’obligation de rapporter la preuve pèse sur le médecin et qu’il a effectivement délivré une « information loyale, claire et appropriée » (art. L. 1111-2 du Code de la santé publique), il revient au patient de prouver que son dommage est en lien direct et certain avec cette faute, ainsi que personnel. Nonobstant, le médecin qui ne rapporte pas la preuve de l'information donnée au patient sur le risque d'une opération ou d'un traitement qui s'est réalisé, commet une faute de nature à engager sa responsabilité civile. Il reviendrait alors au patient de prouver non seulement de son préjudice réel mais en outre le lien de causalité entre la faute et le préjudice.

Tout d'abord, afin de rapporter la preuve du lien de causalité existant entre le défaut d'information et le préjudice réellement subi du fait du risque qui s'est réalisé, le patient doit prouver qu'informé, il aurait certainement refusé l'opération. Si cette preuve est rapportée, le dommage réellement subi par le patient devra être intégralement réparé. Néanmoins, ce cas de figure est exceptionnel. Le plus souvent il existe un doute relatif à l'attitude du patient dans l'hypothèse où il aurait été correctement informé. Dans ce cas, le lien de causalité entre le préjudice réel et la faute du médecin, à savoir le défaut d'information, n'est plus certain. Dans ces hypothèses, la jurisprudence a recours à la théorie de la perte de chance. La réparation de la perte d'une chance est utilisée par la jurisprudence dans l'hypothèse où le lien de causalité entre la faute et le préjudice effectivement subi est faible. Elle accepte alors de réparer un autre préjudice, la simple perte de chance d'éviter le préjudice effectivement subi, lequel est en rapport de causalité certaine avec la faute commise. Le préjudice réparable n'équivaut plus alors à l'intégralité des dommages subis par le patient du fait du risque qui s'est réalisé. Le préjudice né du défaut d'information consiste simplement dans la perte d'une chance d'échapper au risque dont le patient n'a pas été informé. Il s'agit simplement de réparer la perte de chance qu'aurait eue le patient de ne pas subir de dommages en refusant l'intervention ou les soins s'il avait  été correctement informé. Le principe avait été affirmé dans un arrêt de la première chambre civile du 7 février 1990. Ce principe a par la suite été à nouveau réaffirmé par deux arrêts du 8 juillet 1997. Pour évaluer ce préjudice, les juges se livrent à un raisonnement fictif. Ils évaluent les chances qu'aurait eues le patient de refuser l'opération s'il avait été correctement informé. Plus ces chances sont grandes et plus le montant de la réparation est élevé et se rapproche du préjudice réellement subi du fait du risque qui s'est réalisé. Inversement le montant est de faible importance lorsque les chances de refuser les soins sont minimes.

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