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Commentaire : Tribunal administratif de Cergy-Ponoise, 10 juillet 2014, M.Abdelkader T., N°1109251

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Par   •  11 Octobre 2016  •  Commentaire d'oeuvre  •  1 723 Mots (7 Pages)  •  1 012 Vues

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Commentaire : Tribunal administratif de Cergy-Ponoise, 10 juillet 2014, M.Abdelkader T., N°1109251

Adolphe Thiers disait : « l’Etat n’indemnise jamais des malheurs de la guerre ; il n’indemnise que des dommages volontaires, intentionnels, réfléchis, dont il est l’auteur ». Cette citation reflète la position du juge administratif, qui pendant longtemps s’est refusé à reconnaitre la responsabilité de l’administration pour des faits de guerre, et notamment pour les actes de persécutions perpétrés sous Vichy durant la Seconde Guerre mondiale. Ce n’est qu’au terme d’une très lente maturation des esprits que le juge administratif a admis la responsabilité juridique de l’Etat Français du fait de sa participation active aux activités de déportations sous l’Occupation (CE, 12 avril 2002 - Papon). A partir de là le CE a donc été plus directement interrogé sur les conditions dans lesquelles la responsabilité de l’Etat pouvait être engagée du fait des déportations de personnes juives. Il avait notamment répondu dans un avis Mme Hoffman-Glemane, CE, 16 février 2009.

C’est ainsi dans la continuité de cet avis que s’inscrit l’arrêt du 10 juillet 2014 rendu par le tribunal administratif de Cergy-Pontoise.

En l’espèce, M.T a saisi le tribunal administratif de Cergy-Pontoise d’une action en responsabilité dirigée contre l’Etat. Le requérant demande la réparation à hauteur de 1 million d’euros en réparation du préjudice subi par l’abandon de l’Etat français des harkis à l’époque de l’indépendance et dans les conditions d’accueil des harkis et de leurs familles rescapées dans des camps en France.

Le tribunal administratif devait donc déterminer si la responsabilité de l’Etat pouvait être engagée et à quelles conditions.

Le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a jugé que l’État français avait commis une faute engageant sa responsabilité en ne prenant pas les dispositions nécessaires pour « éviter totalement ou du moins minorer de manière sensible et significative […] les massacres et les emprisonnements perpétrés contre les anciens supplétifs dès le cessez-le-feu » mais a néanmoins rejeté la requête.

Selon une jurisprudence constante depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale, le Conseil d’Etat refusait de reconnaître la responsabilité de la « République Française » à raison des actes antisémites commis par le Gouvernement de Vichy pendant l’occupation. Son raisonnement était basé sur l’ordonnance du 9 août 1944 relative au rétablissement de la légalité républicaine, laquelle constatait la nullité de tous les actes juridiques émanant de « l’Etat français ». Cette constatation revêtant nécessairement une portée rétroactive, les actes individuels pris sur la base de tels textes été regardés comme « dépourvus de toute base juridique ». Par conséquent, aucune indemnisation ne pouvait être accordée aux victimes de persécutions antisémites (CE, Ass., 4 janvier 1952 : Epoux Giraud) tout comme la responsabilité de l’Etat ne pouvait être engagée en raison des activités de la milice française (CE, Ass., 25 juillet 1952 - Dlle Remise). Finalement, cette position du Conseil d’Etat revenait à assimiler le régime des dommages nés des actes dits lois émanant de « l’Etat Français » à celui des dommages de guerre, lequel se caractérise par une extrême sévérité : l’Etat est irresponsable par principe, sauf si le législateur a expressément instauré un régime de réparation.

Le Conseil d’Etat renonce finalement à cette jurisprudence par l’arrêt Maurice Papon, CE, 12 avril 2002 et reconnaît la responsabilité de l’Etat. L’arrêt qui nous intéresse aujourd’hui est le prolongement de cette jurisprudence.

C’est pourquoi il conviendra de s’intéresser à la reconnaissance de la responsabilité de l’Etat à l’égard des harkis (I) qui ne permettra cependant pas la réparation des préjudices (II).

I/ La reconnaissance de la responsabilité de l’Etat à l’égard des harkis.

Si on observe le raisonnement adopté par le juge, ce dernier reconnait la faute de la France à deux étapes distinctes. D’une part, l’abandon de la France des harkis au moment de l’indépendance (A) ainsi que les conditions d’accueil et de vie indignes des harkis et de leur famille dans les camps d’accueil (B).

A/ La reconnaissance de la responsabilité de l’Etat lors du démobilisement des troupes.

« … il est constant que les autorités françaises qui avaient connaissance des massacres et des emprisonnements perpétrés contre les anciens supplétifs dès le cessez-le-feu, comme en atteste le rapport du sous-préfet d'Akbou, M. Robert, adressé au vice-président du Conseil d'Etat, M. Parodi, en mai 1963, n'ont pas pris les dispositions nécessaires qui auraient permis sinon d'éviter totalement du moins minorer de manière sensible et significative les conséquences de tels agissements tout en prenant les dispositions nécessaires pour faire face à la menace terroriste liée à une telle situation ; qu'en contribuant ainsi, même indirectement, à rendre effective une telle situation, l'Etat français a commis une faute engageant sa responsabilité »

Ici, le tribunal administratif reconnait clairement la responsabilité de l’Etat français au regard de sa mauvaise volonté dans son organisation pour le rapatriement des harkis; alors même qu’une circulaire du secrétaire d’Etat aux rapatriés prévoit les dispositions pour le rapatriement des français musulmans.

Cette « mauvaise organisation » pouvant aussi être qualifiée d’abandon, a ainsi contribué aux massacres et emprisonnements qu’ont subi les harkis une fois les troupes démobilisées en Algérie.

On remarquera que le tribunal administratif dans cette première partie, aborde seulement la dimension collective aux moyens de travaux d’historiens précis et étayés qui rendent la

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