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Charte des droits et libertés

Thèse : Charte des droits et libertés. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  20 Septembre 2016  •  Thèse  •  3 642 Mots (15 Pages)  •  795 Vues

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Introduction

Au Québec, depuis 1975, la protection des droits fondamentaux est assurée par la Charte des droits et libertés de la personne[1]. Avant cela, ils étaient protégés par les règles de droit commun applicables en cas de recours en responsabilité civile, soit par l’article 1053 du Code civil du Bas-Canada[2] (aujourd’hui remplacé par l’article 1457 du Code civil du Québec[3]). Une des grandes différences entre ces deux protections législatives est que la Charte québécoise, en vertu de son article 49, alinéa 2, autorise l’octroi de dommages-intérêts punitifs s’il y a une atteinte intentionnelle à un de ses droits protégés Le libellé de l’article 49 est le suivant :

« 49. Une atteinte illicite à un droit ou à une liberté reconnu par la présente Charte confère à la victime le droit d'obtenir la cessation de cette atteinte et la réparation du préjudice moral ou matériel qui en résulte.

En cas d'atteinte illicite et intentionnelle, le tribunal peut en outre condamner son auteur à des dommages-intérêts punitifs. »

Cette sanction a été notamment interprétée par la Cour suprême en 1996, dans l’arrêt Béliveau St-Jacques c. Fédération des employées et employés[4]. Dans cette décision, la Cour précise qu’un recours en vertu de la Charte québécoise est un recours en responsabilité civile. Une quinzaine d’années plus tard, dans l’arrêt de Montigny c Brossard (Succession)[5], la Cour suprême a affirmé que les tribunaux québécois avait interprété trop restrictivement la décision Béliveau St-Jacques[6]. Ce jugement, rédigé par le juge LeBel modifie l’état du droit puisqu’il autorise les recours pour des dommages-intérêts-punitifs en vertu de l’alinéa 2 de l’article 49, et ce, même lorsque des dommages-intérêts compensatoire en vertu de l’alinéa 1 sont impossibles[7]. Pour expliquer sa décision, il s’appuie sur la quasi constitutionnalité de la Charte québécoise[8] et précise notamment que la décision d’octroyer des dommages-intérêts punitifs est rendue dans le but de dissuader les contrevenants et de les punir[9], même lorsque la victime ne peut obtenir réparation du préjudice subi. La présente note de recherche a donc pour objet de savoir en quoi l’autonomie conférée à l’article 49, alinéa 2 de la Charte québécoise dans l’arrêt de Montigny empiète-t-elle sur le champ de compétence du fédéral en matière de droit criminel par son effet recherché de dissuasion et de prévention des crimes et qu’elles en sont les conséquences.

Notre recherche qui dressera donc l’état du droit des dommages-intérêts punitifs à la suite de l’arrêt de Montigny s’adresse bien humblement aux praticiens du droit et plus particulièrement aux étudiants en droit qui pourront se faire une opinion des réels effets de cet arrêt.

À notre avis, l’autonomie accordée à l’article 49, alinéa 2 n’a pas eu de conséquences importantes dans les décisions subséquentes puisque selon nous les cas où seuls les dommages punitifs sont possibles sont pratiquement inexistants dans la jurisprudence. Nous croyons qu’il y a un empiétement lorsqu’il n’y a pas de dommages compensatoires octroyés dans un recours civil, mais seulement des dommages punitifs. En revanche, nous pensons que cet empiétement ne porte pas atteinte à l’équilibre du partage des compétences. En effet, même si la législation provinciale « touche » la spécificité fédérale d’un sujet fédéral, cela ne suffit pas pour affirmer que la Charte québécoise ne s’applique pas. Il faut regarder si « la loi provinciale entrave l’exercice, par le fédéral, d’une activité relevant du cœur de sa compétence »[10], ce qui n’est pas le cas à notre avis.

Notre recherche concerne l’application des dommages-intérêts punitifs en droit civil, mais comme nous le verrons cette application n’est pas complètement dissociable du régime de common law. Notre recherche nous a mené à lire beaucoup d’ouvrages de doctrine à la fois sur la décision de Montigny, mais également sur la responsabilité civile et ses sanctions de façon plus générale. Nous avons également parcouru beaucoup de décisions judiciaires rendues après l’arrêt de Montigny. Il a d’ailleurs fallu nous rendre à l’évidence que de ce côté, l’exhaustivité était impossible.

  1. État de la situation des dommages-intérêts punitifs en droit civil québécois

Tout d’abord, il importe de réaliser un bref portrait de l’historique et des conditions d’application de ceux-ci en droit civil québécois. Ensuite, nous procéderons à un résumé des deux arrêts de la Cour suprême préalablement cités qui constituent la base jurisprudentielle de notre recherche.

  1. Historique et objectifs des dommages-intérêts punitifs

Les dommages-intérêts punitifs ont toujours fait parties des armes des juges de common law. Ils sont utilisés pour dénoncer le caractère outrageant d’un acte et ils ont pour but de punir et de dissuader[11]. Ce type de dommage n’a pas pour objectif de compenser le préjudice subi par la victime. Le responsable se retrouve alors condamné au versement d’un montant supplémentaire et distinct des dommages-intérêts compensatoire. Il s’agit d’une punition. C’est ce caractère d’amende[12], ce rapprochement avec le droit pénal et cet objectif de punition qui ont toujours tenu ce type de dommage loin du droit civil[13]. Le second objectif des dommages-intérêts punitifs est de dissuader, à la fois le responsable[14], mais également toute personne qui pourrait possiblement se trouver coupable de la même infraction. La mixité du droit québécois a permis à de tels dommages de trouver maintenant application en droit civil, mais cela reste en dehors du droit commun ce qui diffère des juridictions de common law. En effet, l’article 1621 du Code civil du Québec[15] précise que l’octroi de tels dommages est possible seulement lorsque la loi le permet et il éclaire le tribunal sur les critères d’application puisque leur octroi demeure discrétionnaire.

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