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Arrêt du Conseil d’État du 15 mai 2013, Ville de Paris

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Par   •  13 Octobre 2016  •  Dissertation  •  2 040 Mots (9 Pages)  •  1 698 Vues

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Arrêt du Conseil d’État du 15 mai 2013, Ville de Paris

        Le 7 janvier dernier, le journal Les Echos titrait sur une fusion probable entre l'américain CBS Outdoor et le français JC Decaux. Pourtant les deux géants de l'affichage se sont longtemps affrontés avant d'envisager un rapprochement. En témoigne cette décision du Conseil d’État en date du 15 mai 2013.  

        Par une délibération du 26 septembre 2005, le Conseil de Paris a autorisé le maire de Paris a signer une convention avec la Société JC Decaux ayant pour objet l'installation et l'exploitation ,sur le domaine public de la ville, de colonnes et mâts porte-affiche.  

        Le tribunal administratif, saisi par la société CBS Outdoor, annule cette délibération ; il accueille la demande de la société Outdoor au motif que la convention présente le caractère d'une délégation de service public. Elle doit donc, en tant que telle, être soumise à une procédure préalable de publicité et de mise en concurrence. La Ville de Paris, campant sur ses positions et estimant que la convention litigieuse est une convention d’occupation temporaire du domaine public, interjecte appel. La solution retenue en appel requalifie une nouvelle fois la convention litigieuse, lui attribuant la nature d'un marché public lequel emporte comme conséquences une obligation d'appel d'offre, publicité et mise en concurrence. La Ville de Paris se pourvoit alors en cassation. La Conseil d’État, en application de l'article 821-2 du Code de justice administrative décide de juger l'affaire au fond : il fait droit à la demande de la Ville de Paris en validant la délibération du 26 septembre 2005.

        Dans cette affaire, le Conseil s'est penché sur la qualification d'une convention d'occupation du domaine public, laquelle peut présenter des caractères proches de ceux d'une délégation de service public ou d'un marché public. Dans un souci de pédagogie et de clarification, il caractérise la nature de la convention d'occupation du domaine public (I) avant d'en préciser son régime (II).

I La qualification tendancieuse du contrat de convention d'occupation du domaine public

        Le Conseil d’État, en empruntant une troisième voie pour qualifier la convention litigieuse déjoue les pronostics : si la délégation de service public est logiquement écartée (B) la nature de marché public, favorite, est coiffée au poteau par la qualification de convention d'occupation du domaine public (A).  

A La mise à l'écart imprévue de la qualification de marché public

        En admettant que la « convention devait être regardée comme un marché public conclu pour répondre aux besoins de la Ville », la cour d'appel a commis « une erreur de qualification ». Le Conseil d’État s'attache ainsi dans un premier temps à démonter l'inexactitude des critères qui ont conduit la juridiction du fond à accorder à la convention litigieuse la nature de marché public. En effet, l'article 1er du Code des marchés publics dispose que « les marchés publics sont des contrats conclus à titre onéreux entre les pouvoirs adjudicateurs […] et des opérateurs économiques publics ou privés, pour répondre à leurs besoins en matière de travaux, de fourniture ou de services ».

Était-il possible de considérer, qu'en l'espèce, l'objet du contrat était de répondre aux besoins de la Ville de Paris en matière de travaux, fourniture ou de service ? Plus précisément, était-il envisageable d'admettre que le fait de stipuler expressément dans la convention qu'une partie du mobilier serait affecté à des tarifs préférentiels pour l'affichage des théâtres, cirques ou films art et essai permettait d'assouvir un besoin de la Ville de Paris ? La haute juridiction ne l'a pas entendu ainsi estimant que la promotion de ces activités culturelles ne répondait pas à des « activités menées par les services municipaux ni exercées pour leur compte » et que, « pour ce seul motif » ne pouvait recevoir la qualification de marché public. Cela dit en passant, il existe à Paris des salles de spectacle qui sont gérées directement par la municipalité. Il faut également noter qu'une partie du spectacle vivant ou du cinéma, qui plus est, « art et essai », est subventionné ; la Ville de Paris participe à ces subventions : en témoignent les logos de la Ville qui fleurissent ici ou là sur les différentes affiches des spectacles ou films. Renier ce lien ne serait pas fair play. Donc, au delà du fait que la « promotion des activités culturelles» « répond à un intérêt général » de valorisation de son domaine, elle participe également à la mise en œuvre du plan de communication de la municipalité parisienne. Indirectement donc, cet affichage participe aux besoins de la Ville et de ses services en terme de communication. Ce lien reste somme toute discutable et bien évidemment, n'entre pas en ligne de compte dans cet arrêt. Ce qu'il faut en retenir, c'est qu'une activité qui n'a pas pour objet de répondre directement aux besoins d'une collectivité publique ne peut faire l'objet d'un contrat de marché public.

B La mise à l'écart prévue de la qualification de délégation de service public

        Dans son considérant 7, le Conseil reprend l'article L. 1411-1 du Code général des collectivités territoriales qui défini la délégation de service public. Cet article précise que la délégation de service public est un contrat par lequel une personne publique confie la gestion d'un service public dont elle a la responsabilité à un délégataire. Or, il ressort du dossier que, d'une part, la « Ville n'a pas entendu créer un service public de l'information culturelle » et, d'autre part, que la convention « ne concerne pas des activités menées par les services municipaux ni exercées pour leur compte ». Il n' y a donc pas, à proprement parler, de transfert d'un service public à un délégataire.  La convention est simplement sous-tendue par la volonté d' « utiliser [le] domaine conformément aux prescriptions légales » Le Conseil écarte donc la qualification établie en première instance par le tribunal administratif et opte pour la qualification de convention d'occupation du domaine public. Le domaine public peut être utilisé à titre collectif ou privatif. Privatif, quand il prive la majorité des contribuables de son utilisation au profit d'un tiers. Le tiers va donc utiliser le domaine public à son profit exclusif. Cependant, l'occupation du domaine public n'est pas automatique : elle est soumise à une autorisation qui peut être unilatérale ou conventionnelle. Dans les deux cas, l'autorisation doit être conforme à l'affectation du domaine public ou, tout du moins ne pas être incompatible (CE 22 janvier 2007, Association Les Amis des Tuileries). Or en l'espèce, la conformité de l'utilisation du mobilier urbain d'affichage trouvait sa raison d'être dans le respect des dispositions du Code de l’environnement (articles R. 581-45 et 46) lesquelles précisaient que les colonnes étaient « exclusivement destinées à recevoir l'annonce de spectacles ou de manifestations culturelles » et que les mâts étaient « exclusivement utilisables pour l'annonce de manifestations économiques, sociales, culturelles ou sportives ». Dans le cadre de sa mission de promotion de la culture et de sa diversité, la Ville de Paris a donc souhaité utiliser son domaine public « conformément » à son affectation et consenti une convention d'occupation dans le respect de cette affectation (article L. 2121-1 CGPPP).

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