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Faut-il vivre d’abord et philosopher ensuite ?

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Par   •  15 Décembre 2019  •  Dissertation  •  3 933 Mots (16 Pages)  •  2 822 Vues

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Faut-il vivre d’abord et philosopher ensuite ?

Si nous pensons, c’est d’abord dans l’optique d’une vie pratique. Vivre indique premièrement le fait de tout vivant de pouvoir non pas subir le milieu extérieur mais l’adapter à ses propres besoins et selon une temporalité et un rythme qui lui sont propres. En cela, la philosophie, qui serait l’étude laborieuse et scrupuleuse des différents courants philosophiques, serait bien l’activité qui passerait à côté de la vie non seulement parce que le philosophe, ne produisant rien, dépendrait des autres quant à ses besoins vitaux, mais encore parce que, réfugié dans des questions oiseuses, il ne serait d’aucun secours pour la pratique. Toutefois, il ne suffit pas d’entendre la philosophie selon sa dérive universitaire mais également dans sa perspective logique. C’est le travail attentif des différents arguments qui permet de produire un raisonnement cohérent, lequel rend possible à son tour le fait de vivre en accord avec ce que l’on pense et non l’inverse. C’est pourquoi, la figure du philosophe suscite, de manière ambivalente, admiration et ressentiment : le premier parce qu’il évoque la figure du sage capable de maîtriser son agir et vivre en conformité avec lui-même, le second parce qu’il rappelle l’exigence morale de la vie humaine et la perfection propre à l’homme de ne pas seulement survivre mais vivre, c’est-à-dire suivre un devenir conforme à la dignité attendue d’un agent libre. Cette réalité de l’activité philosophique éclaire sur la dimension de la vie vraiment humaine par rapport à celle des autres vivants. L’homme est le seul être qui se projette dans le temps et envisage la perspective de ‘‘réussir sa vie’’, comme s’il sous-entendait la possibilité d’en rater le but. Ainsi distingue-t-on communément l’être qui cherche à exister, à fixer un but pour réaliser son être, par opposition à celui qui vivrait une vie biologique davantage préoccupée par la satisfaction de plaisirs sensibles et bestiaux et qui subirait son existence, n’en serait pas le principe de commandement. Si la philosophie est cette activité par laquelle on devient apte à raisonner sur les fins, alors sa disqualification par le plus grand nombre paraîtrait infondée. Cependant son manque d’attrait manifeste d’un autre côté son inefficacité et son orgueil à vouloir répondre aux questions existentielles que chacun peut se poser. Conséquemment, faut-il reléguer la philosophie au second plan comme d’une activité facultative et superflue, ou au contraire doiton la considérer en priorité pour accomplir une vie authentiquement humaine ? Il conviendra de se demander si la philosophie est nécessaire à la vie humaine. A partir de quoi nous tâcherons de comprendre si la philosophie peut être une aide à l’accomplissement

de la finalité humaine qu’est le bonheur. Cela nous permettra de nous interroger sur la possibilité de suivre une vie philosophique.

[Comme vous le voyez, l’introduction s’efforce de poser le sens des deux termes qui suscitent l’ambiguïté que sont vivre et philosopher. Premièrement, vivre s’entend comme activité seulement biologique (nutrition, croissance, reproduction) contre une philosophie conçue comme érudition vide de sens ; sens que nous faisons évoluer vers la finalité de l’activité philosophique comme logique (si certains s’embêtent à étudier des textes compliqués c’est pour acquérir une plus grande aisance de raisonnement) face à une vie toujours conçue comme satisfaction des besoins sensibles ; c’est grâce à cette nouvelle distinction d’une activité raisonnante que le sens de vivre va à son tour être reprécisé comme avoir le sentiment d’existence contre une vie qui ne serait que survie, et la philosophie acquiert alors le sens d’une contemplation (theoria) en vue de trouver la meilleure vie possible (praxis). Les enjeux sont indiqués tout au long de l’introduction à chaque problème (si la philosophie est trop éloignée du réel, peut-on en concevoir une plus proche de nos intérêts immédiats ; si la vie humaine se résume à une vie de plaisirs, la réalise-t-on pleinement etc…). L’annonce de plan aurait pu ne pas être mise ici compte-tenu de l’établissement de chaque sous-problème dans chacun des paragraphes, c’est simplement dans un intérêt pédagogique que je l’ai ajoutée et pour vous donner un modèle scolaire d’annonce sous forme d’interrogative indirecte : on envisage une alternative à chaque sous-partie et le fait que les deux puissent être admissibles rationnellement (ici : Faut-il préférer une vie de plaisirs ou une vie intellectuelle (I) ? La philosophie est-elle le meilleur moyen envisageable (II)? La vie philosophique est-elle la fin de toute vie humaine (III)?]

Il convient de comprendre que vivre et philosopher ne s’oppose pas sur le plan de la temporalité mais sur celui d’un ordre de perfection, car il est impossible de philosopher sans être en mesure de vivre d’abord soit avoir une possibilité d’exercice des opérations dans l’ordre matériel. Du point de vue des circonstances, il serait, en effet, absurde d’inciter quelqu’un à pratiquer la philosophie durant une situation de crise ou de détresse. Il y a donc bien un temps propre d’exercice de la philosophie qui la place dans une postériorité chronologique par rapport aux actes vitaux. Ce faisant, la première préoccupation de l’homme est de pouvoir entretenir cette vie qui est la condition de son agir. Il doit d’abord se nourrir, se vêtir et ainsi faire l’épreuve d’une survie avant de pouvoir se consacrer à l’abstraction que peuvent représenter les débats philosophiques. C’est sans doute la raison principale de son émergence tardive dans l’histoire de l’humanité. Les arts qui s’occupent de l’utilité et de l’agrément étaient déjà connus quand on entreprit de chercher une connaissance sans but utilitaire (Aristote, Métaphysique, I, 2). Elles émergent à une époque où les sociétés et les développements techniques ont permis l’avènement d’une vie consacrée à une activité plus ludique et moins déterminée par les préoccupations

matérielles. Ce n’est qu’avec l’assise d’un certain confort que l’homme pourra dans la suite envisager des questions d’un ordre plus originaire et principiel que celles qui trouvent leur résolution dans le sensible. Il n’y aurait alors pas de nécessité à pratiquer la philosophie et l’on peut tout à fait poser son avènement comme un acte purement gratuit mais non essentiel à la vie humaine. Le fait que dans nos sociétés, techniquement

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