Le Premier ministre, un chef de gouvernement ?
Dissertation : Le Premier ministre, un chef de gouvernement ?. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar abbertrand2 • 19 Mai 2018 • Dissertation • 3 353 Mots (14 Pages) • 5 359 Vues
Dissertation : Le Premier ministre sous la Cinquième République, un chef de Gouvernement ?
Dans sa conférence de presse tenue le 31 janvier 1964, le Président de Gaulle affirmait qu’ « on ne saurait accepter qu’une dyarchie existât au sommet ». Le Général refuse alors de manière exprès qu’une égalité des rôles, entre le Premier ministre et le Président de la République, ait lieu d’être dans le régime, et de ce fait affirme l’existence d’un Premier ministre comme une autorité complémentaire dont le rôle est de coordonner l’action gouvernementale sous les recommandations du Chef de l’Etat.
Les constituants de 1958 ont conservé le modèle parlementaire selon lequel le pouvoir exécutif soit bicéphale, c’est-à-dire composé de deux têtes, à savoir le Président de le République élu au suffrage universel et le Premier ministre nommé par ce dernier. Cette tradition remonte aux débuts de la Troisième République dans lequel le gouvernement avait besoin d’un chef assurant la coordination des services de chaque département ministériel, et cela dès 1876 avec le Président du Conseil Jules Dufaure. Apparaissant tout d’abord comme un primus inter pares (« premier entre ses égaux »), l’autorité du Président du Conseil est consacrée dès 1934, et de manière constitutionnelle dans la Constitution du 27 octobre 1946. Il apparait alors comme un véritable chef du gouvernement ayant des compétences et une autorité propre. Alors que le Président de la République est irresponsable d’un point de vue politique, le gouvernement dépend de l’Assemblée nationale car doit faire l’objet d’un vote de confiance dès la formation de son gouvernement et l’Assemblée peut le renverser par le vote d’une motion de censure. Facteur d’une forte instabilité dès 1920, le fait que le gouvernement dépende des assemblées parlementaires législatives n’accentue que le caractère déséquilibré des institutions.
Dans son discours de Bayeux du 16 juin 1946, Charles de Gaulle affirme que le gouvernement ne doit « procéder que du Chef de l’Etat », idée qui sera reprise par les constituants de 1958 dont Michel Debré. Dès lors, le gouvernement tient à sa tête un chef nommé Premier ministre dont les attributions et pouvoirs sont énumérés à l’article 21, et ne dépend plus de la majorité parlementaire de l’Assemblée nationale car sa formation ne doit plus faire l’objet d’un vote de confiance. Cependant, son existence doit aller de pair avec la majorité parlementaire. En effet, bien que ne dépendant plus de celle-ci, le Premier ministre choisi par le Président de la République doit représenter celle-ci. Ainsi d’une part en période de cohabitation – lorsque la majorité parlementaire est différente de la majorité qui a élu le Président –, la prééminence de Premier ministre est claire et il apparait comme une figure forte de l’exécutif, mais d’autre part en période de présidentialisme majoritaire, c’est-à-dire quand la majorité parlementaire coïncide avec la majorité présidentielle, le Premier ministre apparait comme un pouvoir subordonné au Président.
Mais l’élection au suffrage universel direct du Président de la République, l’apparition du fait majoritaire et de la cohabitation ont modifié la pratique du régime et de ce fait le rôle du Premier ministre, dont l’étendue des pouvoirs est plus ou moins importante. Son rôle de chef de gouvernement est donc plus ou moins fort, et dirige de manière variable la politique de la Nation
Après soixante années passées d’exercice la Constitution, peut-on encore dire que le Premier ministre est l’homme qui se borne à diriger l’action du gouvernement comme le dispose l’article 21 faisant figure de premier homme du gouvernement, ou peut-on dire que le Premier ministre est le véritable chef du gouvernement qui mène la politique de la nation ?
Après avoir été évoqué que le Premier ministre apparait comme une chef du gouvernement dans un contexte de dyarchie entre ce dernier et Chef de l’Etat (I), il sera évoqué que malgré que ses compétences soient constitutionnellement fixées, l’étendue du rôle du Premier ministre est variable selon la conjoncture politique (II).
- Le Premier ministre, un chef de gouvernement aux compétences et au rôle importants dans un bicéphalisme dyarchique
Bien que la Cinquième République ait des caractéristiques d’un régime semi-présidentiel, la Constitution de 1958 dote le pouvoir exécutif de deux têtes : le Président de la République comme Chef de l’Etat et un Premier ministre comme Chef du gouvernement. Dans cet exécutif bicéphale, leurs compétences et leur rôle sont définis dans la Constitution de manière précise : au titre II pour le premier au titre III pour le second. Aucune dyarchie n’existant au sein du pouvoir exécutif, le Président a des compétences plus importantes que le Premier ministre. Ainsi, il s’avère que le Chef de l’Etat a un rôle plus important, laissant tout de même au Premier de pouvoirs propres importants (A). Mais une dyarchie voit le jour et les pouvoirs des deux organes sont dépendants (B).
- Des pouvoirs importants pour un rôle majeur
Si sous les anciennes républiques la prééminence du Premier ministre sur le Président était attestée de fait, comme dans tout régime parlementaire classique, dans le régime de la Cinquième République les constituants ont accru le rôle du Premier ministre en le dotant d’attributions plus importantes. Sa prééminence est attestée de fait (i) mais aussi de droit (ii).
- Une prééminence de droit du Premier ministre sur le gouvernement
D’une part, l’article 21 de la Constitution dispose que « le Premier ministre dirige l'action du Gouvernement ». En ces mots, les constituants de 1958 ont hissé le Premier ministre comme véritable coordinateur de l’action des ministères. Ce rôle diffère du régime précédent, dans lequel il n’était pas précisé que le président du Conseil était seulement à la tête de son cabinet. La Constitution lui met à disposition des moyens techniques que la afin de mettre en œuvre la politique de la nation, déterminée par le gouvernement, comme l’énonce l’article 20 de la Constitution.
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