La voie de fait (arrêt du 4 Juillet 1991).
Commentaire d'arrêt : La voie de fait (arrêt du 4 Juillet 1991).. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Nadia Rkina • 15 Novembre 2016 • Commentaire d'arrêt • 1 539 Mots (7 Pages) • 3 879 Vues
Droit Administratif
Dans un arrêt du 4 Juillet 1991, le Tribunal des Conflits aborde le délicat sujet de la voie de fait dans l'éxécution d'un acte administratif et du conflit de compétence entre le jude administratif et le juge judiciaire. En effet, la répartition des compétences entre les ordres juridictionnels est fondamentale en Droit français ainsi que la notion de voie de fait dégagée par le Tribunal des Conflits, l'arrêt Boris Vian apportera une réponse sur ce sujet.
En l'espèce, en vertu d'une convention temporaire, une commune a mis à la disposition de l'Association Boris Vian des locaux dépendant du domaine public, afin qu'elle organise les activités socio-culturelles de la population locale. La commune dénonce cette convention et invoque vainement l'expulsion de l'association, qui continue à occuper les locaux de manière abusive pendant des années. La commune enlève donc une partie des meubles de l'association et procède à la destruction du mobilier restant.
L'association Boris Vian décide alors de saisir le Tribunal de Grande Instance, car la somme des dégâts relatifs au mobilier détruit de l'association est sans doute supérieure à 10 000 euros. Le préfet de Seine-et-Marne présente un déclinatoire le 28 novembre 1989, tendant à voir déclarer la juridiction de l'ordre judiciaire incompétente au motif que le litige porte sur l'occupation de locaux dépendant du domaine public et que la faute éventuellement commise par la commune ne peut être constitutive d'une voie de fait, pendant que l'affaire allait en appel. La cour d'appel de Paris rend un arrêt le 5 octobre 1990 selon lequel elle rejette le déclinatoire de compétence. En l'espèce le préfet élève le conflit devant le Tribunal des Conflits le 18 octobre 1990.
Cet arrêt nous amène à nous demander : dans quelles conditions une expulsion forcée par la destruction de mobilier, faite par l'administration peut être qualifiée de voie de fait ? En d'autres termes, la problématique exposée au Tribunal des Conflits est de savoir dans quelles conditions le juge administratif ne peut plus statuer sur un litige concernant l'administration, au profit du juge judiciaire.
Le Tribunal des Conflits étend la notion de propriété , car il répond qu’une mesure de l’administration, conduisant à l’extinction du droit de propriété par la destruction du mobilier, constitue une voie de fait. Il estime que le juge administratif est compétent sur le fait de l'expulsion sur un domaine public mais, que seul le juge judiciaire peut statuer sur le voie de fait quant à la destruction du mobilier de l'association, qui revient à l'extinction du droit de propriété.
Il convient d'aborder dans un premier temps les difficultés relatives à cet arrêt quant à l'identification de l'autorité judiciaire compétente en l'espèce (I) et ensuite l'évolution de la voie de fait ainsi que ses conséquences (II).
I) La voie de fait affirmée et le conflit des autorités juridiques
Dans cet arrêt, l'autorité administrative est l'autorité en capacité à juger en premier lieu suivant les articles 1 et 2 developpés, cependant dans l'arrêt Boris Vian le juge judiciaire est aussi amené à statuer.
A) L'expulsion et la résiliation relevant de la compétence de l'autorité administrative
L'arrêt rendu par le Tribunal des Conflits affirme que la résiliation de la convention temporaire selon laquelle la commune met à disposition des locaux publics pour l'association Boris Vian, ainsi que la demande d'expulsion envers cette dernière relèvent de la compétence du juge administratif. En effet, cela ne porte d'aucune manière atteinte à la propriété ou à une liberté fondamentale quelconque comme le cite l'arrêt : "La résiliation ultérieure de cette convention et l'expulsion de l'association n'ont pas, par elles-mêmes, porté atteinte à la propriété ou à une liberté fondamentale de cette dernière". Le Tribunal des Conflits affirme donc que sans voie de fait sur ce moyen, l'autorité compétente sur ce litige est l'autorité administrative et que c'est de bon droit que le conflit a été élevé.
Malgré la capacité de l'autorité administrative à statuer de prime abord, la notion de voie de fait amène le juge judiciaire à statuer sur le litige en question.
B) L'extinction du droit de propriété due à la destruction du mobilier et la notion de voie de fait relevant de l'autorité judiciaire
Comme vu dans le (A), la première autorité compétente en la matière est l'autorité administrative, cependant l'acte de destruction du mobilier par l'administration "dans les circonstances de l'espèce, et en dehors de toute urgence, constitue une voie de fait". Ainsi, le Tribunal des Conflits retient que selon ce second chef, le conflit a été à tort élevé car il appartient au domaine de compétences du juge judiciaire. On peut retenir un arrêt important du Conseil d'Etat en matière de voie de fait qui est l'arrêt Carlier du 18 novembre 1949 où l'on considère la voie de fait comme "un acte manifestement insusceptible de se rattacher à l'exercice d'un pouvoir appartenant à l'administration". En d'autres termes la voie de fait est particulière dans le fait qu'elle doit être jugée par l'autorité judiciaire, en l'espèce dans l'arrêt Vian il s'agit d'une atteinte à une liberté individuelle par l'extinction de droit à la propriété lors de la destruction du mobilier de l'association Boris Vian, ce pourquoi l'autorité judiciaire obtient le pouvoir de statuer sur ce conflit alors que de prime abord il s'agit d'un litige relatif à la compétence de l'autorité administrative.
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