La violence économique en droit français
Dissertation : La violence économique en droit français. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar ritonlabanane • 7 Avril 2019 • Dissertation • 3 382 Mots (14 Pages) • 1 220 Vues
LA VIOLENCE ECONOMIQUE EN DROIT FRANÇAIS
« Un acte de justice et de douceur a souvent plus de pouvoir sur le cœur des hommes que la violence et la barbarie » Cet extrait de « Le Prince » de Machiavel n’a de lien juridique que par nos idéaux et notre moralité. Néanmoins, dans le fond, cette citation de l’illustre auteur du XVe siècle nous amène à réfléchir sur la place de la violence et de son usage. On peut se questionner sur notre manière d’aborder les rapports entre le droit et la violence. Il est clair que dans notre système juridique la violence ne trouve pas de place, ou bien si elle en trouve elle serait cantonnée au banc des accusés. Dès lors on peut déduire que toute forme de violence est susceptible d’être prévenue, d’être bannie et sanctionnée par le législateur.
D’après cette brève analyse de la violence il apparait que les notions de Droit et de violence apparaissent totalement antinomiques. Pourtant n’est-elle pas connue l’allégorie du glaive que tient Thémis ? Certes, mais rehaussons la balance et innocentons cela. En réalité, si le droit est violence, c'est parce qu'il constitue le remplacement d'une violence illégitime par une autre, présumée justifiée.
Il convient alors de définir ce qu’est la violence. Selon le dictionnaire Larousse c’est un « abus de la force » ; le lexique des termes juridiques (édition Dalloz) définit la violence comme étant un «fait de nature à inspirer une crainte telle que la victime donne son consentement à un acte que, sans cela, elle n’aurait pas accepté. ». Ici on admet de façon très large la définition de la violence. Or, il est aisé de distinguer plusieurs formes de violence. C’est là toute la complexité qu’a le législateur, d’intégrer toutes les formes que peuvent prendre les violences ; dans le but de mieux les appréhender.
Forme moderne de la violence, liée à l'économie de marché, la violence économique se traduit par des comportements qui ont tous pour but d'exercer un contrôle sur une victime en entravant la libre formation de sa volonté, dans le contexte de l'exploitation d'une situation économique donnée. C’est cette forme de violence : la violence économique en droit français ; dont on va développer l’intérêt de ce sujet.
D’après l’ancien article 1111 du Code civil, la violence est une cause de nullité « encore qu'elle ait été exercée par un tiers autre que celui au profit duquel la convention a été faite ». Dans le cas de la violence lors de formation d’un contrat, c’est d’un autre point de vue qu’est perçu la violence. La violence économique apparait alors comme une forme plus moderne de la violence ; l’émergence de ce terme nouveau est à contextualiser. En effet les rédacteurs du Code civil de 1804, n’étaient pas confrontés à cette forme de violence qui ne saurait trouver que peu de place dans une société rurale.
Il conviendra alors d’analyser cette genèse de la violence économique et de développer plus précisément ce qu’elle a apporté en droit français dans sa forme jurisprudentielle. L’utilisation du passé (néanmoins récent) n’est pas un hasard, car l’émergence de cette nouvelle notion est consacrée dans la loi de 2018 qui ratifie l’ordonnance de réforme du droit des obligations (2016). Le contexte est particulier et il place au cœur de nombreuses problématiques le problème de la violence économique dans des situations contractuelles.
C’est pourquoi nous allons nous demander si la violence économique est admise en droit français.
Pour mieux comprendre ce sujet, il faut se demander quel est le sens du terme « admise ». On peut imaginer une pluralité de sens à ce mot. La racine latine peut nous éclairer à en comprendre le sens. Du verbe admettre, admittere, signifie – permettre l’accès-approuver. C’est bien dans ce sens que le sujet sera traité. On se posera les questions de savoir si le terme de violence économique ouvre le champ à une nouvelle action en nullité contractuelle, et, dans quel sens ? De plus par ‘’approuver’’ la question sera de savoir si la législation francaise reconnait la violence économique en droit des contrats. Nous approfondirons la définition de violence économique et sa place en droit français. Au contraire nous excluons le fait de traiter l’admission au sens des mœurs. Cette étude est ici peu pertinente dans le sens où il est assez évident de constater l’évolution de notre société depuis 1804, comme nous l’avons rappelé en amont. De plus cela nous éloignerai du cœur de l’étude que nous allons mener, car il est ici question de jurisprudence et de la réforme du droit des contrats.
Par ces questions auxquelles nous allons répondre, il est important d’en expliquer le sens. En effet l’admission d’une notion ; qui de plus est récente, peu aller du ‘’simple au double’’. Dans cette démonstration il va être important de discuter de ‘’l’admission’’ jurisprudentielle récente de cette notion (I). Apres l’étude du phénomène, en sachant que la construction de ce nouveau terme juridique s’est faite en deux temps ; nous verrons l’admission de la violence économique dans la réforme du droit des contrats (II).
I-La violence économique : un apport récent de la jurisprudence.
Comme nous l’avons vu dans le prélude de notre démonstration le contexte juridique de 1804 n’émettait pas l’idée de la violence économique. C’est pourquoi nous étudierons l’émanation jurisprudentielle récente de la notion de violence économique (A). Puis il va être intéressant d’étudier le fond de ces décisions jurisprudentielles qui dégagent la notion de violence économique. On se demandera si les juges du fond n’ont pas fait une confusion en assimilant la violence à la dépendance économique (B).
- La terme de violence économique, une notion prétorienne récente en quête d’affirmation.
La violence économique désigne la situation dans laquelle un contrat déséquilibré est conclu grâce à l'exploitation, par l'un des contractants, de l'état de dépendance économique dans lequel l'autre se trouve à son égard. Une telle occurrence ne caractérise pas une violence au sens des vices du consentement contractuel. La lecture des quelques arrêts relatifs à la violence économique ne permet d'ailleurs pas d'identifier clairement ce qu'elle recouvre et comment elle fonctionne.
De façon traditionnelle, la violence peut être physique ou morale. On a pu se demander si le cocontractant qui se trouve dans une situation de contrainte ou de dépendance économique pouvait invoquer la nullité du contrat en se fondant sur le vice de violence. La violence économique peut-elle être admise au même titre que la violence physique ou morale ? La Cour de cassation y a apporté un début de réponse. La violence peut être physique et elle peut être morale (c’est le cas du chantage par exemple). Après qu'un arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation en date du 30 mai 2000 eut annoncé que « la contrainte économique se rattache à la violence ». Cet arrêt de 2000 avait pu être vu comme étant une amorce de revirement de jurisprudence. Néanmoins la concrétisation se fera 2 ans plus tard avec l’arrêt « Larousse-Bordas » le 3 avril 2002.
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