Droit des biens commentaire comparé sur l'indivision
Commentaire d'arrêt : Droit des biens commentaire comparé sur l'indivision. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar celinacayne • 30 Avril 2019 • Commentaire d'arrêt • 3 057 Mots (13 Pages) • 669 Vues
Commentaire comparé des 6 arrêts de la troisième chambre civile de la Cour de de cassation.
Les six arrêts commentés apportent des précisions sur la catégorie des actes qu’un indivisaire a le pouvoir de passer seul, sans le consentement de ses coïndivisaires. Plus particulièrement se posait la question des actions en justice qu’il était autorisé à entreprendre sans rassembler la majorité des deux tiers ou l’unanimité de l’indivision. Trois de ces arrêts ont été rendus sous le régime de l’indivision antérieur à la réforme de 2006 et les 3 autres postérieurement à cette réforme. Pour autant, les mêmes problématiques ont conduit à des solutions identiques. S’agissant de la première espèce (Cass.civ.3ème, 9 mars 1982), un indivisaire intente une action possessoire à l’encontre d’un voisin qui a percé une fenêtre sur la cour de l’indivision le pourvoi reprochait à la cour d’appel d’avoir accueilli sa demande alors même que l’indivisaire opérait par une telle action un acte d’administration de l’indivision et qu’il n’était pas prouvé qu’il avait obtenu l’accord des coindivisaires. Dans une seconde espèce (Cass.civ.1ère, 9 juillet 2014), c’est à l’occasion de l’inexécution d’un bail commercial qu’une indivisaire à délivrer un commandement de payer sur le fondement d’une clause résolutoire. Il était également reproché à la cour d’appel d’avoir considéré qu’il s’agissait d’un acte d’administration permettant à l’indivisaire d’agir seul et par conséquent d’avoir résilier le bail comme il le lui était demandé. La troisième espèce (Cass.civ.3ème, 17 avril 1991) portait sur la possibilité pour l’indivisaire d’intenter une action en revendication d’une parcelle et de demander l’expulsion de l’occupant. Un pourvoi avait été formé en vue d’annuler la décision de la cour d’appel de qualifier l’action d’acte d’administration de l’indivision et de rejeter l’action en revendication. La quatrième espèce (Cass.civ.1ère , 4 juillet 2012) visait la qualification par une cour d’appel d’acte de conservation, l’action en expulsion d’occupant sans titre d’un immeuble. Il était également reproché à la cour d’appel de ne pas avoir caractériser le « péril imminent » constitutif d’un acte conservatoire. La cinquième espèce (Cass.com., 11 juin 2003) le pourvoi reprochait à la cour d’appel d’avoir admis (à tort) la déclaration de créance par une société indivisaire en se fondant sur un mandat général d’administration et de gestion de tout indivisaire, alors qu’un pouvoir spécial de représentation en justice ou de déclaration des créances s’avérait nécessaire ». Enfin, dans le dernier arrêt, une commune contestait la décision d’une cour d’appel d’avoir accueilli l’action en paiement d’une indemnité de résiliation prévu au contrat de concession, notamment au motif qu’elle était exercée par une partie des indivisaires concessionnaires ne représentant pas la majorité requise des 2/3 des coindivisaires s’agissant d’un acte d’administration.
Dans l’ensemble de ces espèces, l’indivisaire acteur en justice ne représentait pas la majorité des deux-tiers au moment de la mise en jeu de l’action et a fortiori l’unanimité des indivisaires non plus. C’est donc sur la qualification d’acte conservatoire qu’il fallait se concentrer afin de contrecarrer la règle de majorité imposé par l’indivision. Ainsi les espèces posaient le même problème de droit, à savoir, si les différents actes cités pouvaient entrer dans la catégorie des actes conservatoires et conférer à leur auteur la possibilité de les entreprendre seul, sans accord exprès ou tacite de ses coindivisaires.
La Cour de cassation confirme la possibilité d’agir seul pour l’indivisaire qui entreprend des actes de conservation et procède à un contrôle strict et casuistique de la qualification des différentes actions de l’indivisaire. Ainsi, ont donc été qualifiés d’actes conservatoires, l’exercice d’une action possessoire (Cass.civ.3ème, 9 mars 1982) ou d’une action en revendication (Cass.civ.3ème, 17 avril 1991). Il en a été de même s’agissant de l’action visant à expulser des occupants sans titre (Cass.civ.1ère, 4 juillet 2012), ou à délivrer des commandements de payer visant la clause résolutoire prévue dans un contrat de bail commercial sur un bien indivis (Cass.civ.1ère, 9 juillet 2014). Enfin, la Haute juridiction a également intégré dans cette catégorie les actions visant à déclarer une créance de l'indivision à la procédure collective du débiteur de l'indivision (Cass.com., 11 juin 2003) ou encore à agir en paiement d'une indemnité de résiliation consécutive à la décision d'une commune de ne pas reconduire un contrat de concession Cass.civ.1ère, 10 septembre 2015).
Il en résulte d’une part, une réaffirmation de la conception large de la notion d’acte de conservation de l’indivision (I). D’autre part, le régime des actes conservatoire dans le cadre de l’indivision prime sur les régimes concurrents (II).
- L’affirmation de la conception large de la notion d’acte de conservation de l’indivision
Très rapidement, et dans l’intérêt de l’indivision, il a été admis qu’une l’action unilatérale de l’indivisaire devait être admise (A). Toutefois les limites de cette action ont été enserrées dans la notion d’acte de conservation (B).
- La possible action unilatérale de l’indivisaire
Par principe, l’indivision est une sorte de juxtaposition de propriétés individuelles, ce qui suppose de ce fait, la nécessité de l’assentiment de tous pour réaliser des actes juridiques ou matériels. En ce sens, elle n’est même pas dotée de la personnalité morale, ce qui la contraint à agir par le biais de ses indivisaires. Du fait de l’identité de leurs droits, il appartient aux indivisaires d’assurer en commun la gestion des biens indivis. Toutefois, pour des raisons pratiques, très rapidement s’est posée la question de la possibilité et des conséquences de l’action diligente d’un indivisaire à l’insu et/ou indépendamment de ses coindivisaires. La loi de 1976 sur l’indivision a apporté les premières réponses. Elle a ainsi précisé que certains actes pouvaient être exercés par un indivisaire seul. D’autres requièrent plusieurs consentements. C’est ainsi que les actes conservatoires, peuvent être accomplis par un indivisaire seul, parce qu’ils sont réputés préserver l’intérêt de tous. Dès lors, seront considérés comme conservatoires les actes nécessaires à la conservation des biens, c’est-à-dire les actes destinés à sauver le bien indivis d’un péril. Il s’agit d’une solution que la Cour de cassation a posé dans un arrêt en date du 25 janvier 1983 et qui a été maintes fois réaffirmé. Tel est le cas dans la décision de la troisième chambre civile de la Cour de cassation en date du 17 avril 1991 (doc.3). Selon la Haute juridiction « tout indivisaire peut prendre les mesures nécessaires à la conservation des bien indivis ». Autrement dit, chacun peut, d’autorité agir au nom de l’indivision de manière unilatérale. Cela signifie que son action n’est pas contrôlée par ses coindivisaires, et qu’elle n’a pas été autorisée. Ce comportement autonome a néanmoins fait l’objet de restrictions, en aucun cas il ne s’agissait de conférer un blanc-seing. Dans l’espèce évoquée, l’action en revendication est qualifiée d’acte conservatoire. Cette qualification résulte de l’objet même de l’action en revendication, à savoir, selon le vocabulaire juridique de Cornu « l’action en justice par laquelle on fait établir le droit de propriété sur une bien, en général pour le reprendre d’entre les mains d’un tiers détenteur ». Par cette action il s’agit donc de conserver le droit de propriété originaire que l’on avait sur ce bien !
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