Commentaire d’arrêt (CE,2017, Société Les compagnons paveurs).
Commentaire d'arrêt : Commentaire d’arrêt (CE,2017, Société Les compagnons paveurs).. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar mamayou • 25 Octobre 2021 • Commentaire d'arrêt • 2 095 Mots (9 Pages) • 790 Vues
Thème d’exercice: commentaire d’arrêt (document 8-f ; CE, 25 octobre 2017, Société Les compagnons paveurs).
L’arrêt soumis à notre étude a pour sujet la qualification juridique d’un contrat suite à un recours indemnitaire en raison de la résiliation par une société d'économie mixte à l'égard de l'un de ses cocontractants dans le cadre d'une concession d'aménagement, et relate de l’importance du critère organique pour qualifier un contrat administratif.
En l’espèce, une société d’économie mixte titulaire d’une convention d’aménagement résilie un marché de travaux, portant sur des travaux relatifs à l’aménagement des espaces publics et à la viabilisation d’une zone d’aménagement concerté, avec une société privée pour motif d’intérêt général du marché. Afin d’obtenir une indemnité du fait de cette résiliation, la société évincée a décidé de porter l’affaire au contentieux.
Par un jugement rendu le 16 juin 2016, le tribunal administratif de Rennes rejette la demande d’indemnisation de la société dont le cocontractant a résilié le marché de travaux au motif que la juridiction devant laquelle s’était portée la demande n’était pas compétente. La société forme alors un appel à la cour administrative d’appel de Nantes. Cette dernière rejette l’appel par l’ordonnance n°16NT02404 du 17 août 2016. La société décide alors de se pourvoir en Conseil d’État afin de demander l’annulation de l’ordonnance de la cour d’appel. La société soutient en effet que, suite à la résiliation du marché de travaux, la société cocontractante devrait réparer le préjudice engendré par cette résiliation par une indemnité.
La question qu’il sera pertinente de se poser sera la suivante : Un tel contrat passé par une personne privée titulaire d’une concession d’aménagement relève-t-il de la compétence du juge administratif ?
Le Conseil d’État annule l’ordonnance du 17 août 2016 de la cour administrative d’appel de Nantes, et rejette la requête d’appel de la société pourvoyeuse.
Il semble sera nécessaire de traiter en premier lieu la question de la détermination de la nature juridique du contrat (I), puis la question de la juridiction qui a compétence à s’occuper du litige (II).
I – Les critères de détermination de la nature juridique du contrat
En droit administratif, la détermination de la nature juridique d’un contrat a toujours été ambiguë (A), notamment lorsque le contrat concerne deux personnes morales de droit privé ; rattacher le contrat au domaine du droit public peut s’effectuer précisément de trois manières ; par la théorie de l’accessoire, la théorie de l’association transparente, et, celle qui nous intéresse ici, la théorie du mandat (B).
A- L’ambiguïté perpétuelle de la qualification juridique d’un contrat
La qualification juridique d’un contrat est un processus complexe utilisé pour déterminer la catégorie juridique de celui-ci. Il peut relever du droit privé ou du droit public et sa qualification implique le choix de la juridiction compétente en cas de litige.
En droit administratif, la qualification d’un contrat administratif se base sur deux critères cumulatifs ; un critère organique (présence d’une personne publique au contrat), et un critère matériel (présence de clauses exorbitantes du droit commun au sein du contrat)
. Dans le cas du texte soumis à notre étude, les contractants sont deux personnes morales de droit privé : « le contentieux relatif à l’exécution et à la résiliation du marché de travaux conclu entre la société BMA et la société « Les compagnons paveurs », qui sont deux personnes morales de droit privé ». Cela exclu la possibilité de retrouver le critère organique, mais il existe des exceptions.
Dans le cas d’un contrat entre deux personnes morales de droit privé, le contrat est censé, par principe, être privé et relever de la compétence du juge judiciaire. Or il peut en être autrement dans certains cas pour lesquels un rattachement à une personne publique doit nécessairement être effectué (TC, 1969, société Interlait). La loi peut également indiquer que certains contrats conclus entre deux personnes privées relève du droit public mais en-dehors des cas de détermination par la loi, pour déterminer si un contrat peut être qualifié d’administratif, le juge va rechercher l’existence d’un lien organique entre la personne privée contractante et une personne publique.
En substance, le juge va rechercher si, d’une manière ou d’une autre, la personne privée peut être assimilée à une personne publique dans le cadre du contrat en cause.
Il va, pour cela, se servir de différents moyens comme la théorie de l’association transparente, la théorie de l’accessoire, et, concernant le cas de l’arrêt étudié, la théorie du mandat.
La jurisprudence récente fait apparaître une volonté combinée du juge administratif et du Tribunal des conflits de limiter les hypothèses dans lesquelles une personne privée ayant conclu un contrat peut être réputée avoir agi pour le compte d'une personne publique.
La logique générale de cette politique jurisprudentielle est de revenir à une lecture plus restrictive du critère organique du contrat administratif et de limiter les effets potentiellement expansionnistes de la compétence du juge administratif que provoquerait une lecture trop souple de la théorie du « mandat ».
B- La théorie du mandat
«Considérant […] que, dès lors, La société BMA ne peut être regardée comme un mandataire agissant pour le compte de la communauté urbaine […] que, par la suite, le contentieux […] ne relève pas de la compétence du juge administratif »
Le conseil d’État, dans le compte rendu de sa décision, précise l’utilisation de la théorie du mandat qui, lorsqu’elle laisse apparaître l’existence d’un mandat, permet la qualification du contrat entre deux personnes de droit privé de contrat administratif.
Contestée devant la juridiction administrative, le recours en indemnisation formé par le cocontractant est rejeté par le Tribunal administratif comme étant porté devant une juridiction incompétente pour en connaître. Pour confirmer le jugement ainsi rendue, le Conseil d'État fait application de la théorie du mandat « administratif » telle qu'éclairée par la jurisprudence. Celle-ci avait été interprétée comme retenant une conception particulière de la représentation à travers la notion de mandat dit « administratif ». Il s'agit de tenir pour acquis que les travaux ou l'opération assurée par le cocontractant privé concernent directement une personne publique ou la collectivité dans son ensemble qui en sera bénéficiaire. Pour l'établir, le juge a recours à la méthode du faisceau d'indices.
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