Commentaire Edmond Rostand, Cyrano de Bergerac

Edmond Rostand, Cyrano de Bergerac (1897)

Commentaire

La beauté du cœur l’emporte sur celle du physique, malheureusement pour Cyrano de Bergerac, œuvre très populaire du théâtre français publiée en 1897 et qui a rendu son auteur célèbre, il n’en est rien. Aussi légendaire pour sa laideur qu’épris de sa cousine Roxane, il n’a d’autre choix qu’aider Christian, un autre prétendant, à séduire la belle en lui soufflant les bons mots. La scène 10 de l’acte III nous plonge dans cette déclaration au balcon où se côtoie un mélange des genres inédits.

Derrière cette scène digne d’une comédie Shakespearienne se cache en réalité une comédie cruelle.

Pour commencer, et comme le montre le champ lexicale de l’amour et de la séduction, le texte est une déclaration d’amour spontanée et sincère de Cyrano. En effet le mot « baiser », répété à plusieurs reprise dans une anaphore prend à l’aide  de métaphore, plusieurs formes. Il est successivement «  aveu », « promesse » et « serment ». Également le mot « cœur » au vers dix huit pour exprimer l’intensité des sentiments de Cyrano envers Roxane. Ces sentiments forts passent aussi par l’oxymore « cet instant d’infini » vers seize. Enfin Cyrano se compare à Buckingham, ce qui lui permet d’associer Roxane a une reine dans la comparaison du vers vingt cinq.

Tout cela concourt à la charmer

De plus cette déclaration passionnée s’avère efficace. A partir du vers vingt six Roxane lui appartient. Elle poursuit sa comparaison en le flattant sur son physique, insinuant que celui-ci serai semblable a celui de Buckingham. Elle succombe et incite Christian à la rejoindre, qu’elle croit l’investigateur, à venir la baiser, dans la métaphore « montez cueillir cette fleur », on comprend ici qu’elle désire qu’il l’enlace. Tout comme « ce gout de cœur … », « ce bruit d’abeille… » et « cet instant d’infini !... » . Elle reprend ici les propres dire ce qui tend à prouver qu’elle est sous son emprise, de plus les point de suspension qui termine chaque citations sont aussi une forme d’invitation.  L’effet souhaité est exaucé, Roxane est sous le charme comme le confirme la didascalie il l’enlace et se penche sur ces lèvres ».

En outre, l’amour qui l’anime est pur et complètement désintéressé. En effet il ne retire aucun bénéfice de cette supercherie autre que rendre heureuse la femme qu’il aime en lui offrant l’homme qu’elle désire. D’autant plus lorsque le procédé fonctionne. La preuve d’amour délivrée par Cyrano reste sourde malgré tout, signe d’un amour absolu. Cette situation rend le personnage d’autant plus attachant que le mérite revient à un autre. Cette déclaration ne touche pas seulement Roxane, Cyrano éprouve une joie immense d’obtenir l’effet escompté, comme le montre la didascalie « s’exaltant », bien que celle-ci se fasse par procuration

Par ailleurs, un double sens se cache derrière cette scène tragique. Une scène est comme jouée à l’intérieur même de la pièce. En effet Rostand tourne cette scène mythique du balcon en farce. Ce qui d’ordinaire n’implique que deux personnages s’en voit attribuer trois. La scène prend alors une tournure comique, aux limites de l’ironie. Des personnages tels que Roméo et Juliette sont tournées en dérision, Roméo s’avère être vide et Juliette niaise. Le spectateur rie de Roxane, superficielle, et tombée amoureuse e paroles vide de sens, et de son ignorance. Cyrano compare Christian à un animal dans une animalisation, et là où il est censé être le personnage principal se retrouve relayé au second plan. Il est tourné au ridicule par le metteur en scène. Il bafouille.

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