Edmond Rostand, Cyrano de Bergerac, Acte I, scène 4 : La tirade du nez
Commentaire de texte : Edmond Rostand, Cyrano de Bergerac, Acte I, scène 4 : La tirade du nez. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar ambre.lg • 8 Mai 2022 • Commentaire de texte • 3 107 Mots (13 Pages) • 3 078 Vues
Edmond Rostand, Cyrano de Bergerac, Acte I, scène 4 : La tirade du nez
Lecture linéaire corrigée
Remarques préliminaires :
La forme = longue tirade théâtrale (appelée « morceau de bravoure » avec une pointe de sarcasme).
Les registres : comique, burlesque, satirique.
Les principaux procédés d’écriture : mise en abyme, hyperboles, métaphores, gradations, énumérations.
Le thème : le nez de Cyrano décliné en une multitude de versions différentes.
Le titre de la pièce renvoie au nom du personnage éponyme, homme de Lettres du XVIIe siècle qui a réellement existé.
Lecture linéaire :
Cyrano est apparu dans la troisième scène de l’acte I : la curiosité du spectateur est enfin satisfaite car on se rend compte que Cyrano est à la hauteur des portraits que l'on avait tracés de lui : plein de fougue, bretteur, anticonformiste, franc, provocateur. Il va maintenant nous montrer à quel point sa maîtrise du langage est immense. Cette tirade (longue réplique faite par un personnage sans interruption) est un véritable exercice de style.
C’est incontestablement le passage le plus célèbre et le plus populaire de la pièce, même si les événements qui se déroulent n’ont aucune importance dans la suite de la pièce et ne seront plus évoqués. Toutefois, ces affrontements permettent l’approfondissement du portrait de Cyrano qui n’a été dressé qu’à grands traits à la scène 3. On peut donc se demander quels sont les différents enjeux (en particulier comiques) de ce long morceau de bravoure.
Mouvements de la scène :
- mouvement 1 du début au vers 3 : introduction à la tirade, avec apostrophe du vicomte de Valvert.
- mouvement 2 du vers 4 au vers 42 : développement des 20 tonalités, utilisées pour se moquer de son nez.
- mouvement 3 du vers 43 à la fin : conclusion, sous la forme d’une humiliation de Valvert.
Autres projets de lecture possibles : Pourquoi peut-on parler ici d’une scène comique ?
Quelles sont les différentes formes de comique en jeu ici ?
Comment se manifeste l’autodérision de Cyrano ? Dans quel but ?
MOUVEMENT 1 :
Ah non ! c'est un peu court, jeune homme !
On pouvait dire... Oh ! Dieu... bien des choses en somme...
En variant le ton, - par exemple, tenez :
- Début sur le mode exclamatif. Deux interjections, « ah » et « oh » rythment ces trois vers.
- « court » est opposé ici au terme utilisé par Valvert pour qualifier le nez de Cyrano : « long » (jeu de mot).
- « jeune homme » = apostrophe désignant le vicomte. L’adjectif qualificatif insiste sur sa naïveté et sa méconnaissance du danger que représente Cyrano et le risque de se moquer de son nez.
- « on pouvait dire » : imparfait signifiant que le vicomte ne l’a pas fait ð annonce la leçon de rhétorique à venir.
- « bien des choses » préfigure les 20 tonalités à venir ; tout comme « en variant le ton ».
- « tenez » = impératif à valeur d’injonction ðCyrano oblige Valvert à écouter sa tirade.
ð Très courte introduction qui annonce le développement à venir et le dédoublement de Cyrano en metteur en scène et en comédien (mise en abyme).
MOUVEMENT 2 :
- Cette tirade s'adresse à Valvert et est faite par Cyrano ; mais en réalité, il y a toute une galerie d'énonciateurs fictifs à travers lesquels il s'exprime. Chacun de ces personnages est désigné par l'adjectif qualificatif censé évoquer la tonalité et l'intention selon lesquelles il s'exprime : on a ainsi un personnage « amical », « prévenant », « respectueux », mais aussi un « curieux », un « pédant », un « naïf », un « campagnard » …
- L’interlocuteur est diversement interpelé : « Monsieur », « l’ami », « vous », « hé ». « Monsieur » désigne à chaque fois Cyrano lui-même : celui-ci se coule donc volontairement dans le rôle que Valvert a voulu lui faire jouer en vain, celui du moqué (sorte de dédoublement du personnage qui se parle à lui-même).
- Cyrano construit à travers son discours de véritables didascalies qui donnent des indications sur le jeu de scène à adopter : les adjectifs qualificatifs précédant chacune des "railleries" indiquent la tonalité sur laquelle il faut prononcer la remarque qui suit.
Agressif : « Moi, monsieur, si j'avais un tel nez,
Il faudrait sur-le-champ que je me l'amputasse ! »
- On note d’emblée l’humour, avec la cocasserie introduite par l’emploi du subjonctif « amputasse » qui souligne l’hyperbole (amputer = couper un membre, pas seulement le nez !)
- « Agressif » : Cyrano tire une certaine gloire de ce nez qui lui permet de laisser libre cours à sa fureur, lorsque certains tentent de s'en moquer et qui au fond le rend unique.
- NB : système hypothétique introduit par « si » et l’imparfait, qui introduit le conditionnel de la proposition principale.
Amical : « Mais il doit tremper dans votre tasse :
Pour boire, faites-vous fabriquer un hanap ! »
- Rime riche commune avec la tonalité précédente : « amputasse » // « tasse » (rappel du mot entier).
- Image comique du nez trempé provoquant le passage de la « tasse » au « hanap », deux récipients différents.
- Tonalité amicale que l’on retrouve dans
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