Lecture linéaire de Ma Bohème de Rimbaud
Commentaire de texte : Lecture linéaire de Ma Bohème de Rimbaud. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Valentine Vidal • 18 Juin 2024 • Commentaire de texte • 2 192 Mots (9 Pages) • 114 Vues
Objet d’étude : La poésie, du XIXe au XXIe siècle
Parcours « Émancipations créatrices » - Arthur Rimbaud, Cahier de Douai
Explication linéaire n° 5
Amorce : A. Rimbaud, né en 1854, écrit ses premiers poèmes à 16 ans : entre mars et octobre 1870, il compose un ensemble de 22 poèmes. Cette même année, Rimbaud fait plusieurs fugues successives pour fuir Charleville : une à Paris, en train (en août) et une autre, plus longue, en Belgique, en octobre. C’est pendant cette période que Rimbaud confie ces poèmes au poète et éditeur Paul Demeny, qu’il avait rencontré à Douai, chez son professeur Georges Izambard. Jamais publié du vivant de Rimbaud, ce recueil, à l’origine dépourvu de titre, fut appelé Cahier(s) de Douai.
Présentation du poème : « Ma Bohême » est le dernier poème des Cahiers. Il s’agit d’un sonnet en alexandrins, composé de rimes embrassées dans les quatrains, mais sur 4 rimes au lieu de deux dans le schéma traditionnel. Rimbaud s’inspire de ses fugues pour présenter son errance qu’il métamorphose en quête poétique et célèbre la liberté que lui permet sa vie itinérante.
Lecture expressive : attention aux variations de ton (phrases exclamatives) et de rythme (ample dans les deux tercets, qui forment une seule phrase complexe ; enjambements aux vers 6-7, 10-11 et 13-14). Le son [ou] est récurrent (assonance).
Mouvements du texte :
- 1er mouvement (2 quatrains) : l’émancipation du jeune poète fugueur épris de liberté en communion avec la nature
- 2e mouvement (2 tercets) : l’expression du bonheur de la création poétique dans un paysage transfiguré
Projet de lecture : Dans quelle mesure ce poème célébrant l’errance et la liberté exprime-t-il une émancipation poétique ?
Titre : Rimbaud parle-t-il de « Bohême » ou de « Bohème » ? Le manuscrit reste d’une lecture difficile. L’accent circonflexe insiste sur l’origine géographique de la Bohême, celle des Bohémiens (peuple de l’actuelle République tchèque vivant librement dans un mode de vie nomade), tandis que l’accent grave évoque plutôt la vie libérée des conventions sociales qu’adoptent les artistes parisiens de la première moitié du XIXe siècle. Les deux termes peuvent néanmoins se lire dans le sonnet qui décrit la vie d’artiste de diverses manières.
Sous-titre : « fantaisie » : en musique, une « fantaisie » est une forme libre ; en littérature, une œuvre d’imagination : ce terme évoque donc ici une errance fictive, un vagabondage rêvé.
Mouvement 1 : L'émancipation du jeune poète fugueur épris de liberté (les 2 quatrains)
Je m'en allais, les poings dans mes poches crevées ; Mon paletot[1] aussi devenait idéal ; J'allais sous le ciel, Muse ! et j'étais ton féal[2] ; Oh ! là là ! que d'amours splendides j'ai rêvées ! Mon unique culotte avait un large trou.
Des rimes. Mon auberge était à la Grande-Ourse.
| 1er quatrain : un récit à la première personne sur l’errance
- L’idéal prend ici une connotation poétique qui rejoint l’idéal baudelairien. Remarque : l’adverbe « aussi » inclut cette transformation du vêtement dans un mouvement d’ensemble. Le choix de l’adjectif « crevées » (et non pas « trouées ») associé par sa sonorité aux poings suggère une colère, une révolte.
Rimbaud tourne-t-il en dérision la grandiloquence de la poésie amoureuse romantique ? Les principaux thèmes de la poésie de Rimbaud sont présent dans ce premier quatrain : la liberté à travers les fugues évoquées de façon allusive, l’aspect novateur de son écriture qui s’inscrit pourtant dans un héritage, la pauvreté à travers sa tenue et la révolte avec les poings serrés. 2e quatrain : un fugueur qui transfigure le réel grâce à la poésie
Avec un déterminant de 1ère personne. Les rimes sont égrenées dans les rimes internes : l’assonance en [ou] sature la fin du vers 8 avec le terme « frou-frou » qui laisse entendre le bruissement rassurant, lié à l’univers féminin des étoffes, des étoiles et qui personnifie la nature. Dans ce deuxième quatrain, le poète poursuit son autoportrait de vagabond rêveur qui sème des rimes sous le ciel. Il pointe également une liberté dans l’exercice de la poésie : évocation d’une réalité prosaïque, présence de tirets, rythme des vers, non-respect des rimes du sonnet traditionnel (4 rimes au lieu de deux : ABBA, CDDC). De la même manière, il montre également aussi, de façon provocatrice, son derrière (cf. culotte trouée). |
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