Comment les ressources propres au genre de la comédie-ballet permettent-elles de réinventer le thème traditionnel de la satire des médecins ?
Dissertation : Comment les ressources propres au genre de la comédie-ballet permettent-elles de réinventer le thème traditionnel de la satire des médecins ?. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar ambre.amrani2807 • 25 Avril 2023 • Dissertation • 1 679 Mots (7 Pages) • 280 Vues
Sujet : Dans la biographie qu’il consacre à Molière, Georges Forestier écrit à propos du Malade imaginaire : « Molière et Charpentier transfigurèrent en apothéose, bouffonne et sublime à la fois, la satire conventionnelle des médecins ». Vous expliquerez en quoi cette phrase éclaire les enjeux du Malade imaginaire.
Problématique : comment les ressources propres au genre de la comédie-ballet permettent-elles de€ réinventer le thème traditionnel de la satire des médecins ?
I. Molière procède dans le Malade imaginaire à une satire en règle de la médecine Indices pour vous aider à trouver des arguments et des exemples : pourquoi Molière critique-t-il les médecins ? Que leur reproche-t-il ? quels sont les personnages qui sont la cible de la satire ? quels sont ceux qui énoncent des critiques moqueuses à l’encontre des médecins ?
1. Les médecins sont des charlatans/menteurs qui ne cherchent pas vraiment à soigner mais plutôt à gagner de l’argent. Exemple : III, 3, Béralde dit à Argan que les médecins l’illusionnent en lui faisant croire qu’ils ont le pouvoir de le guérir. Ils lui disent « le roman de la médecine ». I, 1 : Argan fait ses comptes et s’aperçoit que son apothicaire gonfle ses tarifs pour lui soutirer le maximum d’argent. Donc les médecins tirent profit de la maladie de leurs patients pour s’enrichir.
2. Ils manipulent un jargon (voc spécialisé et compliqué en latin) sans rapport direct avec la maladie du patient : ils débitent des paroles toutes faites. Exemple : Consultation des Diafoirus II, 6 : Thomas emploie des formules latines toutes faites et des mots techniques difficiles aux sonorités barbares mais son diagnostic est très hésitant : la rate, le foie, c’est pareil pour lui, il ne distingue pas les différents organes + II, 5 passage où M. Diafoirus vante ainsi les mérites de son fils : « Mais sur toute chose ce qui me plaît chez lui, et en quoi il suit mon exemple, c’est qu’il s’attache aveuglément aux opinions de nos anciens, et que jamais il n’a voulu comprendre ni écouter les raisons et les expériences des prétendues découvertes de notre siècle, touchant la circulation du sang ». Donc le savoir des médecins est archaïque et dépassé et leur jargon, leurs mots savants en latin, dissimulent en fait leur incompétence.
3. Les médecins sont incompétents car leur savoir est purement théorique, ils n’ont aucune connaissance réelle du corps et de son fonctionnement. Les traitements qu’ils proposent pour guérir sont très limités et parfois dangereux : des clystères et des saignées, ou bien des préconisations diététiques assez hésitantes. Exemple : I, 1 : la liste des traitements qu’Argan a reçus se limite à des traitements laxatifs (lavements). A la fin de la consultation II, 6, M. Diafoirus lui prescrit de manger du rôti ou bien du bouilli, au choix, et de mettre un nombre pair de grains de sel dans ses œufs (cela relève de la pure superstition ou de la maniaquerie, ou du trouble obsessionnel compulsif !). Donc les médecins sont dans l’incapacité d’apporter des solutions réelles au malade pour aller mieux. « La plupart des hommes meurent de leurs remèdes plutôt que de leurs maladies », comme le dit Béralde dans la scène 3 de l’acte III. Autre argument possible : Les médecins exercent une domination, une emprise morale sur leurs patients, dont ils veulent contrôler le corps comme certains prêtres veulent contrôler l’âme des fidèles. La médecine apparaît comme une sorte de religion : le patient croit en la médecine et ses pouvoirs comme il croirait en Dieu. Il s’en remet aux médecins comme à des prophètes. Exemple : En III, 3, dans sa conversation avec Béralde, on voit bien toute l’admiration aveugle qu’Argan porte aux médecins, qu’il désigne avec beaucoup de déférence. Son rapport à la médecine s’apparente à une superstition, une croyance aveugle. Voir aussi III, 5, le moment où M. Purgon fait irruption sur la scène, furieux qu’Argan n’ait pas pris son clystère. Il lui lance des malédictions, lui promettant non pas Document réalisé par Mme Anne-Noellia Carrols, professeure agrégée, lycée Cocteau à Miramas les enfers mais les pires maladies, parce qu’il sent que son patient est en train d’échapper à son influence. Il cherche à l’intimider et lui faire peur pour le garder sous sa coupe. A travers des situations cocasses mais aussi par le biais du personnage de Béralde qui est d’une€ certaine façon le porte-parole de Molière, la pièce offre une vision péjorative de la médecine : « Ce ne sont pas les médecins qu’il joue, mais le ridicule de la médecine », comme l’affirme Béralde pour dire que Molière ne s’en prend pas à des individus mais plutôt à une institution, la faculté de médecine, qui diffuse des savoirs archaïques et cautionne des pratiques douteuses.
II. L’originalité du Malade imaginaire est que cette satire donne lieu à un spectacle plein de fantaisie et de variété qui va provoquer chez le spectateur des émotions variées.
1. Molière utilise les ressources de la farce et de la scatologie : il réduit la médecine à des questions de transit intestinal dans une série de sketchs tout droit tirés de la farce : la scatologie vise à ridiculiser les médecins et leurs malades. Comment parler de la médecine sans mettre en scène le corps ? Molière le met au premier plan dans toute sa force comique. Exemple : scènes où Argan s’éclipse précipitamment pour aller aux toilettes, ou bien demande à Toinette d’examiner l’aspect et l’odeur de ses selles (voir étude transversale, I, 1). Sketchs assez grossiers, inspirés du monde de la farce, mais qui font rire à tous les coups. Les désagréments digestifs d’Argan, les traitements laxatifs qu’il reçoit, sont à l’origine d’effets comiques appuyés, avec des sorties de scène précipitées. Ce spectacle bouffon du corps incontrôlable et tyrannique réduit le patient à un pantin soumis à ses entrailles. Dans ces conditions, la pratique médicale n’a rien de noble ni de prestigieux : elle se réduit à des interventions répugnantes mais hilarantes, comme le laisse supposer le nom évocateur de M. Purgon, M. Diafoirus et M. Fleurant. Le patient est roi, mais son trône est une chaise percée et les médecins sont au service de ses boyaux.
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