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Une charogne, Baudelaire

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Par   •  10 Septembre 2023  •  Commentaire de texte  •  1 560 Mots (7 Pages)  •  237 Vues

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Le poème que nous allons commenter est extrait de la première section du recueil « Spleen et Idéal ». Il se situe plus précisément après « Le Serpent qui danse » et avant « De profundis clamavi. »

Le sujet poétique se promène avec une compagne quand ils sont interrompus par une vision d’horreur, une charogne, un corps en décomposition qui va donner lieu à un éloge paradoxal.

COMMENTAIRE SEMI-RÉDIGÉ

I- Alliance moderne du beau et de l’insoutenable

A- L’élément perturbateur est en fait central [§1]

Les trois premiers vers annoncent le thème d’une promenade idyllique (v.2 Ce beau matin si doux / Au détour d’un sentier ») et d’un souvenir bucolique (« Rappelez-vous »). Le cadre en effet se prête à l’idylle, à la promenade amoureuse. L’adresse faite à « mon âme » (v.1) donne un accent lyrique de poésie amoureuse et courtoise : il s’agit bien de la femme aimée, compagne du poète et destinataire du poème.

POURTANT, l’expression à la rime «charogne infâme » (v.3) pour désigner l’objet de la vision rencontre « mon âme » qui idéalisait la femme aimée : avec cette rupture, d’emblée, la tonalité lyrique rime donc avec l’infamie de la charogne, ce qui crée un effet d’ironie, nous assistons ainsi à un détournement du thème amoureux vers un motif repoussant.

B- Un éloge a priori paradoxal [§2-9]

Idée : Cette « infâme charogne » va être décrite comme une hypotypose vivante de façon méliorative. Dans son processus de décomposition, la nature participe et l’ensemble de ce tableau a une valeur esthétique.

*Par les antithèses et champs lexicaux

- Cette description est composée grâce à des antithèses : « Le soleil rayonnait sur cette pourriture » (v.9) ou « Et le ciel regardait la carcasse superbe / Comme une fleur s'épanouir. » → Les éléments naturels « ciel et soleil » concourent à la beauté de la scène, s’associent au motif de la décomposition. La carcasse est qualifiée, par un oxymore, de « superbe » : nous sommes donc au comble de la valeur esthétique, presque dans le sublime.

- Cette synthèse est permanente dans ce mouvement grâce aux champs lexicaux de la pourriture et de la décomposition d’une part (« mouches » « putride », « larves », « haillons » « exhalaisons », « puanteur ») et celui de l’harmonie de la nature d’autre part (« Nature » « étrange musique », « eau courante » « vent », « mouvement rythmique » « ciel »). Ces deux champs lexicaux antithétiques participent pleinement à l’éloge paradoxal.

Par les sens

*Sens « péjoratifs »

ODORAT et GOÛT

La charogne est très odorante, notamment aux strophes deux et quatre. Cette puanteur provoque la quasi-évanouissement de la compagne de promenade du poète. Le goût est aussi représenté par la chienne qui se nourrit de la dépouille.

*Sens « mélioratifs »VUE La vue est mise en valeur par le regard du ciel ou encore par la gamme des mouvements à la 6ème § qui appellent ce sens. Enfin, il y a une véritable harmonie, presque une ode naturelle (7ème §), à travers l’expression comparative « étrange musique ».

II- Vanité cyclique

Idée : Baudelaire réalise ici une vanité : natures mortes montrant des crânes. Mais ici, cette vanité est très vivante et nous pouvons voir qu’il y a en fait un cycle de la mort vers la vie.

a) Dans un premier temps, nous assistons à la disparition du caractère humain.

Dès le premier vers, la charogne est désignée par « objet » ce qui s’écarte de l’idée de vivant. Pourtant, la 2ème § qui fait mention de « jambes en l’air », pose à connotation sexuelle, sinistre et provocatrice pour l’occasion, désignerait un corps humain par le « bas » et, surtout, par une partie. De strophe en strophe, nous trouvons ainsi la « pourriture » (v.9), la « carcasse » (v.13), le « ventre putride » (v. ) et enfin « corps » (v.) qui peut aussi bien, à ce stade, désigner la dépouille qu’un nouveau corps composite autour duquel gravitent les mouches.

→ La présence de l’ancienne vie tend donc à disparaître.

b) Mais il y a un retour vers une nouvelle forme de vie

(enrichissement « au centuple » §3 + épanouissement fleur §4 + grouillement §5 + mouvements et multiplications §6 + agriculture)

- La décomposition est un enrichissement : le démembrement (« au centuple ») prend une dimension cosmique avec la « grande Nature » ou encore par le mouvement de multiplication (6ème §).

- Il y a d’ailleurs une présence de vie à travers cette strophe 6 : « Tout cela descendait, montait comme une vague » mime la respiration et nous trouvons ensuite l’élancement, le pétillement ou l’étincelle, le souffle…

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