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Le rire dans Gargantua de Rabelais

Dissertation : Le rire dans Gargantua de Rabelais. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  12 Juin 2023  •  Dissertation  •  1 258 Mots (6 Pages)  •  268 Vues

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Introduction

La thèse exprimée par Michel Butor présente le rire dans Gargantua comme une stratégie littéraire (« un superbe déguisement ») élaborée par Rabelais afin d'assurer l'existence de ce livre, c'est-à-dire de le sauver des griffes de la censure (lexique de la parade : « détourner », « brouiller », « éviter »). On pourrait néanmoins opposer à cette idée le fait que le rire dans Gargantua apparaît aussi, bien souvent, comme un rire spontané, qui surgit de manière irrépressible. Est-ce à dire que ce rire posséderait en lui-même une vertu ?
Gargantua est en effet présenté par Rabelais comme un « livre-silène », un livre qui sous le rire dissimulerait des matières moins « folâtres » qu'il n'y paraît, accréditant la thèse de Michel Butor. Mais le rire dans Gargantua se révèle être aussi un rire de pur divertissement. Or, la liberté insolente de ce rire assure également son aspect subversif.

Le rire comme déguisement

Un « livre-silène »

Dans Gargantua, les deux textes qui précèdent le récit affirment deux projets contradictoires. Dans l'avis aux lecteurs, l'auteur annonce que son livre ne vise qu'à amuser son lecteur : « Vrai est qu'ici peu de perfection / Vous apprendrez, sinon en cas de rire : / Autre argument ne peut mon cœur élire ». Pourtant, on découvre l'affirmation contraire dans le « Prologue de l'auteur ». Les « silènes », ces petites boîtes peintes pour « exciter le monde à rire » mais qui renferment de « fines drogues », servent explicitement de comparant à Gargantua : « C'est pourquoi faut ouvrir le livre : et soigneusement peser ce qui y est déduit. Lors connaîtrez que la drogue dedans contenue est bien d'autre valeur, que ne promettait la boîte. C'est-à-dire que les matières ici traitées ne sont tant folâtres, comme le titre au-dessus prétendait. » La même idée est exprimée par le proverbe « L'habit ne fait point le moine » comme par la célèbre métaphore de l'os à moelle. Le prologue multiplie ainsi les images et les déclarations explicites engageant le lecteur à ne pas se contenter de l'aspect divertissant de ce récit, mais à y rechercher de « très hauts sacrements et mystères horrifiques, tant en ce qui concerne notre religion, qu'aussi l'état politique et vie économique ».

Un livre qui développe de sérieuses critiques

En effet, Gargantua recèle de réelles critiques religieuses et politiques. Le chapitre , par exemple, intitulé « Pourquoi les moines sont refuis du monde, et pourquoi les uns ont le nez plus grand que les autres », remet en cause avec virulence l'utilité des moines, appelés « mâchemerdes » et comparés au singe qui ne fait que « tout conchier et dégâter ». Ils n'ont ni l'utilité du paysan ni celle de l'homme de guerre, du médecin, du docteur évangélique ou du marchand selon Gargantua. Pire, lorsque Grandgousier réplique que les moines prient Dieu pour les hommes, Gargantua lui rétorque qu'ils ne font que « marmonn[er] grand renfort de légendes et psaumes nullement par eux entendus ». De même, la guerre contre Picrochole peut être lue comme une critique virulente de la violence absurde des guerres.

Pourtant, comme le précise Michel Butor, le rire dans Gargantua n'est qu'» en grande partie » un rire de déguisement. Car il est aussi un rire de pur divertissement.

Un rire de pur divertissement

Amuser par le récit de « bons tours »

Plusieurs fois au cours de son récit, Rabelais ne résiste pas au plaisir d'amuser son lecteur en narrant les bons tours que ses personnages se jouent les uns aux autres. Au chapitre xvii, lorsque Gargantua arrive à Paris, il est vite harcelé par les Parisiens et décide de leur payer « sa bienvenue et son proficiat » en les « compissant » « par ris » avant de dérober les cloches de Notre-Dame. Dans le chapitre xii, « Des chevaux factices de Gargantua », Gargantua mène le maître d'hôtel et le fourrier du seigneur Painensac à ses écuries de chevaux de bois, avant de se montrer bon « causeur » en enchaînant pour eux devinettes, plaisanteries et calembours. Car le bon tour est souvent accompagné d'un bon mot.

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