Le sacre de Charlemagne : jeu de pouvoir entre le carolingien et la papauté
Dissertation : Le sacre de Charlemagne : jeu de pouvoir entre le carolingien et la papauté. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Laurent Daves • 8 Décembre 2023 • Dissertation • 6 382 Mots (26 Pages) • 180 Vues
Le sacre de charlemagne : jeu de pouvoir entre le carolingien et la papauté
Introduction :
La dynastie carolingienne, et surtout son personnage principal Charlemagne, est très connue pour la renaissance qu’ils ont apportée à l’Europe occidentale. En effet, après la chute de l’Empire romain d’occident, l’Europe entre dans une période sombre. C’est la renaissance carolingienne qui lui permettra d’en sortir. Mais pour que cette nouvelle période faste puisse voir le jour, il a fallu une assistance mutuelle entre le pouvoir spirituel et le pouvoir temporel. Cependant, malgré cet appui réciproque nécessaire, les deux parties veillent avant tout à leurs propres intérêts. En effet, pour la papauté, le roi des Francs doit protéger les intérêts de l’Église tout en lui restant subordonné. Au contraire, le pouvoir séculier s’appuie sur le Pape pour affirmer sa puissance et rassembler les différents peuples qu’il gouverne sous une même bannière : celle de la chrétienté. Le sacre de Charlemagne est un évènement capital qui va bouleverser les rapports précédents. En effet, le Pape accorde au roi le titre d’empereur ce qui lui permet de justifier ses ambitions de protecteur de toute la chrétienté.
Ainsi ces deux entités veulent rassembler la chrétienté, mais chacun veut être à sa tête. Ce conflit va créer un jeu de pouvoir entre la papauté et les Francs tout en les obligeant à rester très proches.
Mais comment s’est déroulé le sacre et quels en ont été les enjeux ? Comment Byzance réagira-t-elle à ce sacre impérial perçu comme une usurpation ? Charlemagne peut-il enfin s’imposer comme unique défenseur de la chrétienté ?
Le proséminaire essayera de répondre à ces différentes questions en se basant principalement sur des sources contemporaines du sacre de Charlemagne. Après un bref contexte historique, nous allons analyser les différences de discours entre les deux entités concernées et ce que chacune veut transmettre par ses écrits. Ensuite, les situations précaires de la papauté et de l’Empire romain d’Orient seront traitées. Finalement, l’analyse se portera sur la question du rôle que joue Charlemagne dans la protection du Pape et si elle s’étend à l’ensemble de la chrétienté, ainsi que sur la dimension divine de la mission qui lui a été attribuée.
Contexte :
Déjà bien avant les Carolingiens, le pape Grégoire le Grand et ses successeurs s’appuient notamment sur les Francs pour mener des Missions d’évangélisations dans toute l’Europe, mais surtout pour se dégager de la tutelle des empereurs d’Orient.
Bien que relativement courte, environ un siècle et demi, la période carolingienne fut très brillante pour le Saint-Siège, du moins au début. En effet, il a pu obtenir son indépendance face aux empereurs byzantins et constituer les riches États pontificaux. Tout d’abord, bien qu’il ait apporté son aide dans des missions d’évangélisation, Charles Martel refuse de protéger Rome des Lombards. À sa mort, son fils, Pépin le Bref, recherche une légitimité auprès du Pape pour assurer son pouvoir. Il est donc l’obligé de la papauté qui elle-même recherche un protecteur. En 754, le pape Étienne II va dans le palais de Ponthion pour voir Pépin. Bien que Ravenne appartienne à Byzance, le roi franc promet au pontife d’apporter son aide pour reprendre la ville tombée aux mains des Lombards trois ans avant. En remerciement, le pontife sacre Pépin et ses Fils. Ils redescendent alors sur Rome et Pépin prend Pavie la capitale lombarde. Le roi Aistulf promet de rendre les territoires conquis. C’est ainsi que le Pape obtient l’ancienne région de l’Empire romain d’Orient Pérouse. C’est la création des États pontificaux. L’empereur byzantin est mécontent, mais il ne va pas dénoncer publiquement cette situation. Il va cependant essayer de manigancer avec les Lombards pour rompre leur alliance avec la papauté puis l’empire tente de convertir les Francs à l’iconoclasme. À la mort du roi des Francs en 768, les Lombards sont réticents à rendre ce que leur ancien roi a promis et l’aristocratie romaine gagne en importance au point d’influencer les élections des nouveaux pontifes.
Voulant continuer dans la lignée de son père, le jeune roi Charles veut garder de bonnes relations avec les nouveaux États pontificaux. Il assiège donc Pavie en 773. En 774, le roi s’engage à donner au Pape toute l’Italie et les îles byzantines de Corse, Sardaigne et Sicile. Finalement, il les garde et se fait couronner roi d’Italie. Le Saint-Siège récupère tout de même les villes de Viterbe et d’Orvieto. Charlemagne veut unifier l’ensemble des différents peuples qu’il gouverne grâce au christianisme. L’universalité de l’Église est importante et il veut que toutes les Églises nationales soient réunies sous l’autorité de Rome. C’est pourquoi une collaboration active naît entre Rome et le royaume des Francs. De plus, le roi combat les prétentions de Constantinople à régenter l’Église. C’est ainsi que Rome se retrouve avec un protecteur très autoritaire et entreprenant qui pourra facilement manipuler le prochain pontife. En effet, après l’avoir poussé sur le siège de Saint-Pierre, il protège Léon III face aux aristocrates romains et soumet ainsi ce dernier. Aix-la-Chapelle prend de l’importance. Charlemagne est même considéré par certains comme l’équivalent d’un empereur ; il possède un empire, est considéré comme le défenseur universel de toute la chrétienté et il est plus puissant que l’empereur d’Orient dont la légitimité est remise en cause, comme nous le verrons. En 799, le Pape se fait enlever. Il parvient tout de même à s’échapper et à s’enfuir en Saxe auprès de Charlemagne. Des conjurés apportent alors une liste de griefs contre le pontife au roi. Le Pape redescend à Rome rejoint par le roi qui se fait attendre pour montrer sa supériorité fin novembre 800. Une enquête est ouverte par les francs, puis Charles préside une assemblée pour juger le Pape et les conjurés. Cependant, il est très ardu de juger le Saint-Siège. Le roi fait alors prononcer un serment purgatoire au pape pour le laver de tout soupçon. Le Pape, humilié, peut donc consacrer Charlemagne empereur. Bien qu’aucune élection n’ait été faite, en soi, le roi possédait déjà tous les attributs d’un véritable empereur.
Le matin de Noël 800, Charlemagne assiste à une messe donnée par Léon III en son honneur à la basilique Saint-Pierre du Vatican. Le roi est accompagné de sa famille et est dans son plus grand apparat. Tout d’abord, l’empereur s’agenouille devant la tombe de Saint-Pierre pour chanter son oraison. Le Pape le couronne directement d’un diadème, puis le bénit. Ensuite, il fait acclamer le nouvel empereur par la foule trois fois. Traditionnellement, le nouveau dirigeant est acclamé par la foule avant le couronnement et non pas après. Vient ensuite la proskynèse : le Pape se prosterne devant l’empereur. La cérémonie s’achève avec les Laudes et les invocations.
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