Dissertation insurrection économiques et sociales dans le premier XIXème
Dissertation : Dissertation insurrection économiques et sociales dans le premier XIXème. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Paul Bitaud • 19 Novembre 2018 • Dissertation • 5 295 Mots (22 Pages) • 659 Vues
« Révoltes sociales et insurrections économiques en Europe (1815-1848) : l’éveil du « Peuple » ? »
« Du travail ou la mort. Nous aimons mieux périr d’une balle que de faim. » C’est la réponse que font parvenir les ouvriers de la soie lyonnais, les canuts, au préfet du Rhône pour lui signifier leur détermination à mener à bien leur combat.
Cette réplique cinglante, adressée à un représentant de la monarchie, illustre bien la réalité violente des insurrections économiques et des révoltes sociales du premier XIXème siècle.
En effet, la Révolution Industrielle, qui voit des pays passer d’une économie principalement agricole à une économie de plus en plus fortement industrialisée, produit ses effets à travers l’Europe, d’abord en Angleterre (plus qu’en Grande-Bretagne), dès le milieu du XVIIIème siècle, puis, à partir des années 1820, en France, en Suisse, ou encore en Belgique. Ces Révolutions Industrielles sont à l’origine de mutations multiformes, qui, en transformant les modes de production, bouleversent aussi profondément les rapports entre les hommes, et suscitent des revendications, notamment au sein d’une classe naissante : la classe ouvrière.
Ces revendications sont particulièrement prégnantes au cours du premier XIXème siècle, et notamment entre 1815, année où la légitimité dynastique des monarchies est restaurée par le Congrès de Vienne, contribuant à brimer encore un peu plus les possibilités d’expression politique des masses et à radicaliser, dans une certaine mesure, les revendications économiques et sociales, et 1848, qui voit se répandre à travers le continent une vague révolutionnaire sans précédent. Ce « printemps des peuples », est communément admis comme le point culminant d’un éveil du peuple, qui se serait construit progressivement en Europe, au cours des premières décennies du XIXème siècle. Le peuple européen, grâce aux révoltes sociales, et aux insurrections de ce début de siècle, serait donc désormais politiquement actif et conscient, même si, dans les faits, ces conflits semblent plutôt déboucher sur les débuts de la formation d’une identité politique, et d’une classe, ouvrière. Simultanément, Marx publie son Manifeste du Parti Communiste, qui, si son retentissement est faible à sa parution, restera l’un des symboles des grandes mobilisations sociales du second XIXème, et illustre la naissance de nouvelles idéologies, dans un contexte de tensions économiques et sociales.
Comment les révoltes sociales et autres insurrections économiques qui éclatent entre 1815 et 1848 ont-elles contribué à la formation des identités politiques en Europe, en particulier au sein d’une classe naissante, la « classe ouvrière » ?
Nous verrons donc que les importantes mutations du premier XIXème siècle ne sont pas sans conséquences, tant politiques que sociales, et suscitent de nombreuses tensions au sein des sociétés européennes. Par ailleurs, celles-ci vont se traduire par d’importants mouvements contestataires, souvent violents, même s’ils sont de natures diverses. Enfin, ces mouvements ne tardent pas à s’exprimer dans un cadre beaucoup plus politique, celui des premiers socialismes, et concourent à la naissance d’une identité politique, en particulier ouvrière.
I) Les importantes mutations du premier XIXème siècle ne sont pas sans conséquences, tant politiques que sociales, et suscitent de nombreuses tensions au sein des sociétés européennes …
Au cours du premier XIXème siècle, plusieurs pays européens connaissent d’importantes mutations, notamment sous l’effet de la Révolution Industrielle, qui s’étend progressivement, dont les conséquences seront importantes pour les sociétés concernées.
Ainsi, les grands bouleversements économiques et sociaux voient la découverte du « paupérisme » et la naissance de la « question sociale », mais les solutions présentées pour y faire face semblent bien faibles, tandis que la « persistance de l’Ancien Régime » brime les possibilités d’expression des principaux intéressés…
A) Les grands bouleversements du système économique et social
En effet, plusieurs pays européens connaissent donc d’importants bouleversements économiques et sociaux entre 1815 et 1848.
Rappelons tout d’abord que ces bouleversements concernent au premier chef les pays dont la révolution industrielle est au moins entamée, c’est-à-dire la Grande-Bretagne (et en particulier l’Angleterre), la France, la Belgique, la Suisse, et, plus tardivement et de manière timide, les Empires Allemands et austro-hongrois.
Il est toutefois clair que partout en Europe, l’industrialisation progresse fortement en cette première moitié du siècle, et la production manufacturière explose, au détriment de la production agricole. On peut le voir de manière très claire en étudiant la production de fonte et de fer brut, matières premières essentielles dans une économie industrialisée, en Europe, dont Paul Bairoch donne une estimation. Ainsi, d’après ses chiffres, celle-ci fait plus que doubler entre 1800 et 1830, et quintuple même entre 1815 et 1850, preuve du développement du secteur industriel en Europe. L’Europe connaît, vers le milieu du siècle, une croissance de l’ordre de 2% l’an, ce qui constitue un bouleversement économique majeur dans la mesure où l’on estime que, sur les deux millénaires précédents, le PIB mondial n’avait été multiplié que par un facteur sept.
Le développement économique de l’Europe, mû par l’industrialisation des économies a aussi des implications sociales importantes, et conduit, par exemple à des modifications profondes dans la répartition de la population active : on voit la multiplication massive d’hommes et de femmes travaillant en usine, un modèle de production qui tranche radicalement avec le travail à domicile qui était autrefois la norme dans le secteur manufacturier, et où le travailleur possédait la plupart du temps son outil de travail. C’est un phénomène qu’il convient toutefois de relativiser, comme l’a montré Noiriel. Autre bouleversement : l’urbanisation croissante des sociétés, sous l’effet d’un exode rural qui, s’il est important, n’en demeure pas moins inégal selon les pays. Quoi qu’il en soit, le peuplement des grandes villes explose: les populations de Londres (première ville à dépasser le million d’habitant) et de Paris font plus que doubler entre 1800 et 1850. Les pays européens connaissent une forte croissance démographique, à la fois cause et conséquence de leur développement. Pour exemple, la population du Royaume uni augmente de 70 % sur la même période (!).
Ces mutations vont avoir de nombreuses répercussions sur les conditions de travail, de rémunération, et plus largement de vie d’une large partie de la population européenne.
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