La révolution américaine était-elle vraiment une révolution?
Dissertation : La révolution américaine était-elle vraiment une révolution?. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Matheooo • 11 Décembre 2019 • Dissertation • 2 353 Mots (10 Pages) • 695 Vues
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Révolutions, empires et nations
Exercice de dissertation
La révolution américaine était-elle vraiment une révolution ?
« Je crois, pour ma part, que l’idée de révolution ne retrouvera sa grandeur et son efficacité qu’à partir du moment où elle mettra au centre de son élan la passion irréductible de la liberté » écrivait Albert Camus dans son ouvrage L’Homme révolté (1951). Le XVIIIème siècle est marqué par un changement de définition du terme « révolution » : on passe de la révolution comme cycle à la révolution comme rupture. La révolution peut ainsi être définie comme un bouleversement majeur de l’ordre politique et social, qui s’accompagne d’un changement de régime, d’un renouvellement des élites et de l’entrée en politique de nouvelles catégories sociales. Malgré cela, Edmund Burke s’étonnait dans ses Réflexions sur la Révolution de France (1790) que le terme ne prit pas en France le même sens qu’en Angleterre. Si la Glorieuse Révolution de 1688 avait constitué une refondation étatique, elle n’avait pas été la rupture violente avec un régime ancien comme la Révolution française de 1789. La révolution américaine se manifeste par des bouleversement politiques et sociaux à partir de 1763 dans les colonies britanniques d’Amérique du Nord, qui affirmant leur volonté de faire sécession de la Grande-Bretagne par une déclaration d’indépendance donnent lieu à la guerre d’indépendance entre les « États-Unis d’Amérique » et l’Empire de 1775 à 1783. L’adoption par la Chambre des représentants et le Congrès américains en 1789 de la Déclaration des droits, constituée des dix premiers amendements de la Constitution américaine et garantissant les libertés de presse, de parole, de religion, de réunion, le droit de porter des armes et le droit de propriété, rend compte de l’ambition sociale et intellectuelle de la jeune République à l’aune d’une révolution politique aux enjeux multiples. Néanmoins, si elle a constitué véritable une révolution politique inspirante aux conséquences plurielles, la révolution américaine a-t-elle pour autant été l’expérience originale de mutations idéologiques et sociales dont elle se revendique ? Enracinée dans un contexte intellectuel, économique et géopolitique propice aux « révolutions atlantiques », la révolution américaine trouve sa principale source dans un défaut de représentativité au sein du modèle institutionnel en place (I). Les revendications américaines ouvrent la voie, dans le cadre d’un conflit armé aux enjeux multiples, à la conception et la mise en place d’un système politique nouveau basé sur une vision autre de la souveraineté, qui constituent une expérience originale à l’échelle mondiale (II). Si elle inspire idéologiquement autour d’elle, la révolution américaine n’est pas, comme en atteste l’héritage légué aux révolutions qui lui succèderont, l’expérience d’égalité civile, politique et sociale dont elle se veut l’écho (III).
I. Enracinée dans un contexte intellectuel, économique et géopolitique propice aux « révolutions atlantiques » (J. Godechot et R. Palmer), la révolution américaine trouve sa principale source dans un défaut de représentativité au sein du modèle institutionnel en place.
A. Si la pensée des Lumières est constitutive de l’émergence d’une identité américaine, ce sont bel et bien des considérations financières et commerciales qui motivent l’apparition de tensions entre les colons britanniques et l’Empire.
- L’attachement à la Grande-Bretagne était une affaire de classes : tandis que l’élite sociale américaine avait intérêt à rester dans le giron de la métropole, les classes moyennes se sentaient de moins en moins britanniques. La politique impérialiste britannique fait naître un certain patriotisme colonial à l’encontre de la métropole et permet la formation d’une identité américaine.
- Les idées des Lumières telles que la tolérance religieuse, la liberté, l’aspiration au bonheur et à la réussite individuelle ou encore la mobilité sociale sont au cœur de cette identité américaine émergente.
- La mise en place du Sugar Act (1764), du Currency Act (1764) et du Stamp Act (1765) après une guerre de Sept Ans qui s’est avérée être un lourd fardeau budgétaire et financier pour la Grande-Bretagne est source de fortes tensions entre les colons et la métropole.
- L’instauration des Townshend Acts (1767) mène au « massacre de Boston » le 5 mars 1770 puis celle du Tea Act (1773) à la « Boston Tea Party » le 16 décembre 1773.
B. Portées sur la critique d’un défaut de représentation au Parlement mais plus généralement d’un manque de considération par l’Empire, les actions protestataires se politisent et se radicalisent, menant à l’éclatement d’un conflit armé.
- Le conflit prend toutefois une tournure politique du fait que ces décisions sont jugées illégitimes par les colons. En effet, ces derniers considèrent ne pas être suffisamment représentés dans les instances britanniques et notamment au Parlement.
- Les actions entreprises contre le pouvoir prennent des formes de plus en plus radicales. Le boycott et les pétitions sont utilisés à maintes reprises, et de nombreux juristes se joignent publiquement à la cause américaine (James, Défense et démonstration des droits des colonies britanniques).
- De 1664 à 1774, les manifestations et les violences contre les représentants de l’autorité britannique se succèdent (Fils de la liberté). Les acteurs de la contestation politique s’organisent : au début de l’année 1774, les colonies envoient des députés pour former des assemblées inter-coloniales (Stamp Act Congress, Provincial Congress).
- Le Premier Congrès continental, qui créé une assemblée politique indépendante en vue de coordonner l’action des colonies contre la métropole puis se transforme en instrument de gouvernement, et le Congrès continental de Philadelphie marquent le passage de la contestation à la révolution.
- Les revendications du conflit se tournent vers l’indépendance (non plus un simple rééquilibrage représentatif institutionnel) et les formes de ce conflit se militarisent à partir de la Campagne de Boston (1775).
II. Les revendications américaines ouvrent la voie, dans le cadre d’un conflit armé aux enjeux multiples, à la conception et la mise en place d’un système politique nouveau basé sur une vision autre de la souveraineté, qui constituent une expérience originale à l’échelle mondiale.
A. Si l’idée d’indépendance inhérente aux revendications américaines fait basculer la région dans une guerre aux enjeux qui s’internationalisent, elle marque, tout en plongeant le pays dans une instabilité institutionnelle, une véritable révolution politique.
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