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De la suzeraineté à la souveraineté

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Par   •  8 Mai 2022  •  Dissertation  •  1 876 Mots (8 Pages)  •  1 002 Vues

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Sujet : « De la suzeraineté à la souveraineté. »

«La souveraineté du roi par nature n'est pas plus divisible qu'un point en géométrie. »

- Cardin Le Bret, De la Souveraineté du Roy (1632) -

Cette citation n’a pas toujours été exacte, et, d’ailleurs, les différents rois de France n’ont pas toujours été souverain en leur royaume. En effet la monarchie telle qu’on la conçoit généralement est encore empreinte du rayonnement du Grand Siècle (XVIIe s.) et du non moins grand roi qui l’accompagne : Louis XIV. Le pouvoir royal est alors absolu, et la personne du roi quasi-divinisée. A contrario, le système féodal qui régit une partie du Moyen-Age est bien différent de cette monarchie. Dans le premier cas le roi est souverain, dans le second il est suzerain.

Nous pouvons alors nous poser plusieurs questions : quelles sont les différences sensibles entre ces deux entités ? Qu’est-ce qui a poussé les rois à passer de l’une à l’autre ? Comment cette transition (partielle) s’est effectuée ?

Questions auxquelles nous tâcherons de répondre modestement dans les quelques lignes qui suivent, grâce aux historiens, politiciens et écrivains, témoins du passé.

Dans un premier temps nous contextualiserons la situation de la France à l’origine de l’émergence de la féodalité et par conséquent de l’exercice de la suzeraineté. Puis nous nous intéresserons au basculement progressif de celle-ci vers une monarchie de plus en plus puissante, exerçant la souveraineté de l’État en la personne du roi, jusqu’à son apogée avec le règne de Louis XIV.

Nous sommes donc en 840, en plein Haut Moyen-Age et dynastie des Carolingiens, et Louis Ier, fils de l’empereur Charlemagne, meurt. L’espoir d’un empire d’occident durablement unifié est vite dissipé puisqu’il est partagé entre ses trois fils qui se feront la guerre pour s’en accaparer. L’administration du royaume se fait de plus en plus compliquée et la circulation monétaire est difficile. Pour veiller sur ces royaumes, il faut déléguer le pouvoir. Le défi est alors de s’assurer de la loyauté de l’aristocratie que constituent ces seigneurs éparpillés et qui représentent le corps dirigeant de l’armé du royaume (la profession de soldat à cheval – chevalier – étant réservé à l’élite).

Un serment est passé entre le roi et son vassal, où chacun promet assistance à l’autre en cas de besoin à travers le droit d’ost, le suzerain doit aussi justice à son vassal s’il y a litige et protection à son peuple en cas de guerre. Le vassal, lui, doit avoir foi en son seigneur et doit lui rendre hommage, en plus de diverses obligations. Il y a donc un véritable contrat synallagmatique entre ces deux parties.

En rémunération de leur loyauté, des fiefs (nom qui a donné féodalité) sont octroyés à ces aristocrates.

Si ce système va plutôt bien fonctionner dans un premier temps, à la mort des premiers seigneurs ce sont leur descendance qui vont hériter de ces territoires. Les fiefs qui étaient des rémunérations de métier se transforment alors en héritage au sein de dynasties. Les liens qu’entretenaient les ducs et comtes avec le roi s’étiolent parfois et les contacts deviennent anecdotiques en temps de « paix internationale » (le terme de nation étant évidemment anachronique). Les duchés et comtés deviennent alors semi-autonomes, les seigneurs exercent le droit de ban sur leur territoire et octroient à leur tour des fiefs à leur vassaux et ainsi de suite. Par vanité ou par contrainte, ces derniers vont parfois prêter serment à plusieurs seigneurs et ainsi recevoir plusieurs fiefs, seulement il arrive que ces seigneurs rentrent en conflits entre eux et les vassaux étaient alors contraints de ne respecter qu’un seul de leurs serments. De nombreux conflits internes éclatèrent et certains ducs ou comtes devinrent plus puissants et riches que le roi lui-même.

Les causes géographiques et économiques de cet émiettement du pouvoir s’atténueront au XIIe s. avec le développement des échanges en Europe, les ordres seront alors plus faciles à délivrer, la rémunération n’est plus forcément foncière mais aussi monétaire. Les rois firent admettre petit à petit aux seigneurs qu’ils tenaient leurs terres de la couronne et par la même occasion imposèrent leur suzeraineté.

Le pouvoir monarchique commence à se re-centraliser à partir de Philippe Le Bel (1285-1314). À cette époque, Canonistes, en faveur de l’Église, et Légistes, en faveur du roi, réfutent ensemble l’autorité de l’empereur sur le roi, déjà empereur en son royaume (thèse des Légistes). Par la suite, Louis XI (1423- 1483) déclarera « Je suis France. », (formule ensuite reprise par Louis XIV).

Le renforcement de la monarchie se fera à travers différentes luttes féodales, la levée de fonds par les impôts, par la monnaie qui est frappée à l’effigie du roi ainsi que par le contrôle progressif des instituions législative et exécutive le roi édicte les lois et les fait appliquer. Il possède alors les pouvoirs exécutif, législatif et

juridique : « Quod principi placuit legis habet vigorem » : Ce qui plaît au prince a force de loi dira Ulpien (juriste romain du IIe et IIIe siècle ap. JC.). Il lui est même permis de déroger à ses propres lois, « Princeps legibus solutus est » : Le prince est délié des lois, toujours selon Ulpien.

Avec le renouveau économique de l’Europe, l’intérêt naissant pour l’étude des textes juridiques antiques ressuscita le droit romain et avec lui l’idée de souveraineté. En effet même si le roi doit, d’après Charles V le Sage (1338-1380), « seigneurier au commun profit du peuple », il exerce déjà un caractère religieux différent de la suzeraineté de par son sacre. Il est le lieutenant de Dieu, chargé de protéger et conduire son peuple vers le salut moral chrétien, par l’exemple de ses valeurs. C’est à destination de ces princes que seront rédigés des traités politiques en accord avec la morale chrétienne, les miroirs du prince.

C’est aux antipodes des intentions profondément chrétiennes de ces miroirs que Machiavel (1469-1527) va redéfinir la politique des princes, les miroirs ne reflétant plus les besoins de son temps si j’ose dire.

Machiavel est un théoricien politique novateur : ses expériences au sein de la cité-état de Florence, en partie en compagnie des Médicis, ainsi que ses connaissances de la politique romaine, seront un terreau fertile à l’élaboration de deux ouvrages. C’est à travers le prisme de l’efficacité qu’il va écrire simultanément le Discours sur la première décade de Tite-Live (1531) et Le Prince (1532). Le premier explique comment l’empire romain a pu perdurer grâce aux caractéristiques de sa république – respublicas –, à ses institutions mais aussi et surtout grâce à son peuple armé.

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