Commentaire de texte : Arrêt Lemaistre
Dissertation : Commentaire de texte : Arrêt Lemaistre. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar bibolo • 14 Avril 2013 • 3 631 Mots (15 Pages) • 1 556 Vues
Commentaire de texte : Arrêt Lemaistre
Le XVIème siècle fut à la fois le théâtre de la scission entre catholiques et protestants et la scène de la cristallisation des conflits qui les opposèrent ; mais ce fût aussi le socle d’un mouvement de pacification. Cette solution, qui ne fut pas au goût de tous mais qui mit un terme aux guerres civiles qui ont déchirées la France pendant plus d’un siècle, fût initiée par le Parlement de Paris, avec son célèbre arrêt Lemaistre ; l’édit de Nantes viendra quant à lui sceller définitivement, plus tardivement, le processus de pacification mis en place par Henri IV.
Le texte qu’il nous est donné d’étudier est le célèbre arrêt Lemaistre, du nom du Président Jean Lemaistre, du Parlement de Paris, qui est rendu le 28 juin 1593. Le Parlement de Paris est une des institutions dominantes du paysage institutionnel français de l’Ancien Régime. Issu de la Curia Regis, il est créé au cours du XIIIème siècle et, à partir du XVème siècle, treize autres parlements furent créés, sans pour autant que la prédominance du Parlement de Paris fusse altérée d’aucune façon. Du fait de bénéficier de ce que l’on appelle la justice déléguée, le Parlement rend ses arrêts directement au nom du Roi, il représente ce dernier dans ses prérogatives judiciaires, d’où la portée conséquente de ses arrêts.
Comme nous l’avions soulevé il y a quelques lignes, le XVIème siècle est le théâtre de nombreuses difficultés dans toute l’Europe. En effet, Calvin (1509 – 1575) et Luther (1483 – 1556) poussent, de par la Réforme importante qu’ils entendent mener, à une scission de l’Eglise romaine en vue de fonder le protestantisme. En France donc, les guerres de religion reprennent de plus belle, notamment avec le massacre de la Saint Barthélémy le 24 août 1572, nonobstant aux différentes tentatives de pacification (Colloque de Poissy et l’Edit d’Amboise). C’est donc dans ce contexte on ne peut plus houleux que va s’ouvrir une crise de succession, à la mort d’Henri III, qui est assassiné en 1589 et qui ne laisse pour lui succéder aucun fils. C’est donc le plus proche parent, descendant par les mâles (ligne dite agnatique), Henri de Navarre, cousin du 21ème degré, qui apparaît être le successeur tout désigné. Cependant, ce dernier souffre d’une tare des plus importantes : il est chef du parti protestant. Si les tensions étaient alors d’ores et déjà ancrées, elles vont se retrouver mises en exergue par cette crise de succession. En effet, pendant tout le Moyen Âge, que le roi fût catholique allait de soi, c’était une évidence que nul ne contestait. La crise de succession ouverte en 1589 est donc d’ampleur tout à fait particulière puisque le problème soulevé par la succession au trône d’Henri III n’avait jamais été envisagé jusque là. Ne craignons pas d’être un peu puristes ; à bon escient du moins : les Ligueurs avaient, dès 1588, contraint le Roi à promulguer, avec l’appui des Etats généraux, un édit qualifié d’Edit d’Union qui consacrait implicitement le principe de catholicité. C’est évidemment sur ce texte donc que les Ligueurs vont dans un premier temps s’appuyer pour hisser au trône le vieux Cardinal de bourbon, archevêque de Royan et oncle paternel d’Henri de Navarre. Cependant, il mourût en 1590, avant d’avoir été sacré. Ce bref épisode, bien que relégué au rang de parenthèse historique puisque le problème se posa à nouveau à la mort de ce dernier, illustre avec une certaine acuité l’importance que revêt la règle de catholicité aux yeux des Ligueurs, qui sont prêt à la hisser, au détriments des autres, au sommet de l’ensemble des normes constitutionnelles. En janvier 1593, les Etats généraux sont donc convoqués pour délibérer sur cette question et les Ligueurs proposent, ou plutôt tentent d’imposer, l’infante Claire-Isabelle, qui était la petite fille du roi Henri II par sa mère, Elisabeth de Valois. C’est alors le principe de masculinité qui est remis en cause et la situation paraît étrangement semblable à celle de 1328, la question étant de savoir si la couronne de France pouvait passer sur la tête d’un prince étranger. Les Etats généraux se gardent donc de soutenir l’initiative des Ligueurs et la situation étant alors des plus confuses, cela poussa le Parlement de Paris à rendre un arrêt décisif en matière successorale, ayant vocation à trancher le litige : l’arrêt Lemaistre. Il s’agit d’un arrêt immédiatement exécutoire, souvent qualifié d’arrêt de la loi salique, adressé en forme de remontrances au Duc de Mayenne. Le Parlement, comme nous allons le voir, rappelle donc les principales règles régissant la dévolution de la couronne et consacre surtout le principe de catholicité, tout en indiquant que l’ensemble des règles encadrant la dévolution de la couronne de France sont un ensemble homogène, puisqu’aucune d’entre-elle ne prime sur une autre.
La problématique en réponse à laquelle il nous convient d’organiser notre commentaire s’impose d’elle-même : Par quel procédé le Parlement de Paris, tout en précisant le statut de la couronne de France, met-il un terme à la crise de succession ouverte en 1589 ?
Si le Parlement de Paris, gardien des libertés fondamentales, peut être considéré comme la pierre angulaire de l’édifice constitutionnel de l’Ancien Régime(I), le statut de la couronne de France peut alors être considéré comme la pierre d’achoppement de ce même édifice, puisque c’est en l’espèce l’obscurité entachant le statut de la couronne qui est directement à l’origine de la crise de 1589 et donc, plus ou moins indirectement, de l’arrêt Lemaistre, rendu par le Parlement en 1593 (II).
I. Le Parlement de Paris, pierre angulaire de l’édifice constitutionnel de l’Ancien Régime
Le Parlement de Paris – que l’on appelle d’ailleurs plus communément le Parlement – réfute dans un premier temps les conclusions des Etats généraux de Paris, condamnant ainsi toute transgression aux lois fondamentales (A). Etats généraux de Paris, qui, sous l’influence des Ligueurs, préconisaient une solution consistant à faire primer la règle de catholicité sur les autres règles constitutionnelles régissant la succession au trône. Dans son arrêt Lemaistre donc, le Parlement rappelle les différentes règles de droit public concernant la dévolution de la couronne (B).
A. La condamnation de toute transgression aux lois fondamentales
En guise de préambule au rappel des conclusions données par les Etats généraux de Paris, il convient de rappeler le processus
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