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Le Parlement et l’élection des parlementaires

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Par   •  17 Novembre 2023  •  Cours  •  5 590 Mots (23 Pages)  •  191 Vues

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Diplôme de Sciences Po Toulouse – 1e année

DROIT CONSTITUTIONNEL

Cours de Cédric GROULIER

2023-2024 semestre 1

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Thème 8
Le Parlement et l’élection des parlementaires

1

Fait rare en régime parlementaire, la présentation du Parlement par le texte constitutionnel (Titre IV de la Constitution) intervient après celle de l'exécutif.

On note une nette rationalisation du fonctionnement du régime parlementaire, qui repose sur un encadrement plus strict des prérogatives du Parlement. Pour Michel Debré, il s’agissait d’instaurer enfin un « vrai » régime parlementaire en France, les Troisième et Quatrième Républiques ne méritant pas, à ses yeux, cette qualification (cf. l’omnipotence parlementaire, notamment sous la Quatrième République).

Selon l’art. 24 al. 2 de la Constitution, le Parlement « comprend l'Assemblée nationale et le Sénat » : la Cinquième République est donc fidèle au bicamérisme.

La Constitution renvoie très largement à des lois organiques pour définir le mode de désignation des deux chambres, la durée des mandats parlementaires et les règles statutaires applicables aux députés et sénateurs (art. 25). Elle fixe toutefois certains principes-cadres, not. en matière de protection des parlementaires dans l'exercice de leurs fonctions et d'organisation du travail des assemblées. Mais de manière générale, le principe de séparation des pouvoirs explique les particularismes du statut des parlementaires et la relative liberté d'organisation interne du Parlement.

  1. Un bicamérisme inégalitaire

Sans doute parce que le bicamérisme avait montré certains mérites sous les deux Républiques précédentes, les constituants de 1958 ne retiennent pas le principe d'une assemblée unique. Ils instaurent donc deux assemblées nettement différenciées, tant au niveau du mode de désignation de leurs membres que de leur rôle dans les institutions. D'un point de vue technique, on parle de bicamérisme inégalitaire, car l'une des deux assemblées détient, sauf exception, plus de pouvoirs que l'autre.

  1. L'Assemblée nationale

  1. La chambre basse

Cette assemblée est l'expression de la démographie de la France : elle représente la population française (classique pour la chambre basse d’un régime parlementaire ; on observe toutefois la même fonction de représentation de la population avec la Chambre des représentants dans le régime présidentiel des Etats-Unis).

577 député.e.s, élu.e.s pour 5 ans.

Elle est dite « chambre basse » en raison de son caractère plus démocratique (près du peuple) que l'autre chambre, plus « aristocratique ». Ses pouvoirs sont toutefois inversement proportionnels à cette qualification, puisque l'Assemblée nationale prédomine au sein du Parlement :

  • seule l'Assemblée nationale peut mettre en cause la responsabilité du gouvernement
  • le gouvernement peut donner le dernier mot à l'Assemblée nationale lors de l'adoption d'une loi
  • l'Assemblée nationale dispose de plus de temps que le Sénat pour l'examen et le vote du budget.

Cette prééminence s'explique par une plus grande légitimité démocratique (suffrage universel direct), ainsi que par son caractère de centre de gravité du régime parlementaire : elle est au cœur du jeu politique avec le gouvernement – de sa composition dépend le visage effectif du régime et le déplacement du pouvoir entre les deux têtes de l'exécutif (concordance ou cohabitation). En contrepartie, elle est la seule cible possible du pouvoir de dissolution présidentiel.

  1. Les élections législatives

Depuis l’inversion du calendrier électoral en 2002, les élections législatives suivent d’un mois l’élection présidentielle.

Suffrage universel direct.

Conditions d'éligibilité :

  • avoir satisfait définitivement aux obligations militaires
  • être âgé.e de 18 ans
  • ne pas tomber sous le coup d'une cause d'inéligibilité (soit une inéligibilité absolue mais temporaire, comme en cas de condamnation pénale ou pour infraction aux règles relatives aux comptes et financements politiques ; soit une inéligibilité relative, s’agissant de l’interdiction faite à certains fonctionnaires d’autorité de présenter leur candidature à la députation dans les circonscriptions où ils ont exercé leurs fonctions).

Il n'y a pas de condition d'attache territoriale, chaque député.e étant député.e. de la nation (selon le principe de la souveraineté nationale, chaque député.e représente la nation toute entière – proscription du mandat impératif, art. 27). Cela explique la pratique des "parachutages" qui n'ont, juridiquement, rien de condamnable.

La candidature est adressée à la préfecture (en cas de doute sur sa régularité, possibilité de saisir la juridiction administrative).

La campagne est régie par des textes organisant not. le temps de parole dans les médias et le remboursement des dépenses de campagne (dans la limite de 50% du plafond autorisé) pour les candidates et candidats ayant obtenu au moins 5% des suffrages exprimés).

Le contentieux de l'élection législative appartient au Conseil constitutionnel (rupture avec la tradition établie en 1789 et présente dans certains régimes parlementaires – v. au Royaume-Uni – et qui voulait que les assemblées soient juges de l'élection de leurs membres). Le Conseil constitutionnel peut être saisi par les électeurs et électrices, et par les candidat.e.s ; il peut réformer ou annuler une élection.

Le mode de scrutin

Le mode de scrutin est déterminé par la loi et non la Constitution, ce qui explique qu'il ait pu subir quelques évolutions au gré des tactiques des majorités au pouvoir :

  • 1958 - 1985 : scrutin uninominal majoritaire à deux tours. Il a permis l'émergence de majorités claires et stables. Mais certaines disparités sont ensuite apparues en raison de l'absence de modification du découpage des circonscriptions électorales opéré en 1958 (ex. : en 1983, la 10ème circonscription des Bouches-du-Rhône comptait 189 384 électeurs, la 2ème de Lozère 26 257 seulement)
  • loi du 10 juillet 1985 : passage à la représentation proportionnelle. Pour faciliter la répartition des sièges, leur nombre a été porté de 491 à 577 (nombre toujours d’actualité). Les électeur.ices étaient invités à voter dans le cadre de circonscriptions qui étaient leurs départements. Des listes identiques pour l’ensemble de la France étaient constituées. Ce mode de scrutin favorisait donc une logique de parti au détriment de la « logique de fief » qui joue généralement dans le scrutin majoritaire. En effet, les suffrages exprimés dans chaque circonscription départementale servaient à attribuer les sièges au niveau national, les député.es élu.es étaient plus clairement ici des député.es de la nation que les député.es élu.es avec le scrutin majoritaire, qui sont presque avant tout perçu.es comme celles ou ceux qui emportent une circonscription.

Les raisons de ce changement de mode de scrutin pour 1986 sont idéologiques (assurer une meilleure représentativité des petits partis), mais aussi tactiques, puisque le président Mitterrand espérait ainsi limiter la portée de la victoire considérée comme inévitable de la Droite aux législatives de 1986 – cela n’a pas empêché la première cohabitation, mais la victoire de la Droite étant modérée, le président s’est senti légitime pour critiquer et gêner la politique gouvernementale. C’est aussi ce changement de mode de scrutin qui a permis au Front national d’obtenir ses premiers sièges à l’Assemblée nationale…

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