La montée de l'extrême droite sous la Ve République

Exposé : La montée de l'extrême droite sous la Ve République

En mai 2022, après 2 mois de campagne et un premier tour assez surprenant, c’est finalement le candidat de centre-droite Emmanuel Macron et la candidate du parti d’extrême droite Marine le Pen qui arrivent au second tour de l’élection présidentielle. C’est finalement Emmanuel Macron qui remporte cette élection avec 52% des suffrages exprimés mais ce qui est le plus surprenant dans cette élection est la place conséquente accordée à MLP, candidate du Rassemblement National, qui réunit 41% des voies alors qu’il y a presque 50 ans en arrière, le parti rassemblait à peine 5% des suffrages. En l’espace de quelques décennies, l’extrême droite a réussi à s’affirmer et à présenter un programme électoral intelligible qui remporte l’adhésion de nombreux électeurs, en témoigne les élections législatives qui ont permis de confirmer le choix de cette politique avec 91 sièges remportées par le RN, du jamais vue en France depuis la création du FN. L’extrême droite peut être défini comme une famille idéologique de partis, c’est une notion abstraite associée à une partie de la classe politique française, en évolution depuis la Révolution française. Pour l'historienne Ariane Chebel d'Appollonia, « le terme a été appliqué à tant d'opinions ou de programmes politiques différents qu'une signification claire et acceptée par tous reste aléatoire »

Toutefois il est possible de retenir quelques traits récurrents de ce parti, souvent opposé au régime républicain. On parle souvent d’une droite de rejet, rejet des institutions gouvernementales ou constitutionnelles, remise en cause de l'ensemble des institutions civiles, administratives, sociales, économiques et religieuses. Ce parti condamne généralement le matérialisme, le capitalisme, comme le collectivisme, son objectif à long terme est d'instaurer un ordre nouveau, politique, social, économique, parfois culturel et religieux.

Leur discours exprime la nostalgie d’un âge d’or, l’apologie des élites et de la force, la peur du métissage et la censure des mœurs. Ce mouvement politique se définit traditionnellement autour de trois grands axes : l’anticommunisme, l’antilibéralisme économique, et l’exacerbation de la fierté nationale.

Selon Ariane Chebel d'Appollonia, « L'extrême-droite ne peut être perçue qu'en fonction d'une époque et des problèmes posés à un moment particulier de l'histoire, tant il est vrai qu'une force politique est tout autant reflet d'une philosophie politique donnée que témoignage de l'état de la société »

En France, l’extrême droite émerge dans la vie publique avec la Restauration monarchique, elle s’affirme comme une force politique royaliste qui refuse la Charte constitutionnelle de 1814, considérant ce texte comme un affaiblissement voire une trahison de la monarchie. L'extrême-droite va renaître sous une nouvelle forme sous la IIIe République autour du général Boulanger et au début du XXe siècle, l'extrême droite était par exemple représentée par un mouvement comme l'Action française. Le terme est associé aux mouvements de la Seconde Guerre mondiale, tels que le fascisme italien et le nazisme allemand. Ainsi, l’extrême droite est passé par plusieurs étapes idéologiques, après la Seconde Guerre Mondiale on faisait allusion à la droite « radicale », qui s'apparente avec le fascisme. Pendant les années 60 et 70, on parlait de droite « extrême », aux idées plutôt évocatrices comme : le nationalisme, l’anti-démocratie, le racisme, la xénophobie. Aujourd’hui, on parle de parti « anti-système » ou de « populisme » pour désigner leur idéologie politique. De nos jours, on classe couramment à l'extrême droite des partis comme le Rassemblement national ou le parti Reconquête en France, le parti Frères d'Italie en Italie, ou le Parti de la liberté d'Autriche.

Ainsi, l’ascension politique d’Éric Zemmour, l’installation du Rassemblement national comme force politique majeure et la « droitisation » du débat public peuvent sembler singulières aujourd’hui et on peut donc se demander dans quelles mesures l’extrême droite témoigne-t-elle d’une évolution politique considérable depuis sa formation à nos jours.

Ce sujet nous permettra dans une première partie de présenter la genèse d’un mouvement initialement marginalisé et critiqué au XXe siècle (I) mais qui a su opérer une percée historique depuis les années 2000 grâce à plusieurs facteurs que nous étudierons dans une seconde partie (II).

I) Un mouvement initialement marginalisé 

1. La genèse d’un mouvement marginalisé au XXe siècle

En effet, dès le début Ve République, l'extrême droit était un plutôt un mouvement marginalisé, absent de l'échiquier politique. L’idéologie de ce mouvement vise depuis toujours à se nourrir des peurs de la population : la crainte des juifs pendant la période nazie, la crainte d’un remplacement d’une population par une autre… et l’un des exemples les plus révélateurs fut le conflit algérien. Ce dernier a créé un terrain favorable à l’installation d'une extrême droite nationaliste. 

C’est dans le cadre de ce conflit que fut créé l’OAS (Organisation armée secrète) en 1961 et il déploya ses forces en Algérie et en métropole entre 1961 et 1962. Son objectif était la défense de l’Algérie française contre le FLN et la Ve République. Un engagement qui prend plusieurs formes, une propagande très active et recours à des méthodes terroristes : attentat, exécution d’opposants, lutte militaire constante…

L’indépendance de l'Algérie, l'échec des attentats contre de Gaulle, le démantèlement de l'OAS et l’exécution du colonel Bastien-Thiry, qui a organisé contre de Gaulle l’attentat du Petit-Clamart, annoncent la fin de cette extrême droite « Algérie française ». La guerre d'Algérie laisse des traces profondes, expliquant souvent, dans l'extrême droite française, la violence d'une xénophobie hostile aux immigrés venus du Maghreb.

Dans les deux décennies qui suivent l'échec de l'OAS, l'extrême droite traverse une période difficile. En effet, les principaux mouvements d’extrême-droite qui se créent restent très minoritaires, comme le mouvement Occident, dissous en 1968, qui menait des actions de commando contre les gauchistes du Quartier latin.

1. La concrétisation de ses idées par la formation de partis politiques : la création du Front national en tant que force politique majeur

L’article 4 de la Ctit permet la création des partis politiques librement à condition qu’ils concourent à l’expression du suffrage et respectent les principes de la souveraineté nationale et de la démocratie. Ainsi, Jean-Marie Le Pen, ancien lieutenant et combattant en Algérie, qui crée le FN en 1972. 

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