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La fausse annonce d’un gain est-elle un vrai quasi-contrat ?

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Par   •  22 Juillet 2023  •  Dissertation  •  2 512 Mots (11 Pages)  •  447 Vues

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Mathis d’Aquino

La fausse annonce d’un gain est-elle un vrai quasi-contrat ?

« Le recours au quasi-contrat s’avère plus drastique que le jeu de la responsabilité civile, plafonné dans ses effets à la simple réparation d’un préjudice », relève le juriste Alain Bénabent à propos de la solution quasi-contractuelle retenue par la Cour de cassation en 2002 pour apprécier la fausse annonce d’un gain. Cette situation correspond à une pratique commerciale abusive et douteuse, très présente notamment à la fin des années 1990. Elle consistait à envoyer des bons de tirage pour des loteries organisées par l’entreprise avec pré-tirage avec, dans la même enveloppe, un bon de commande. L’objectif était que le destinataire souhaitant participer remplisse le bon de participation ainsi que le bon de commande, pensant ainsi avoir plus de chances de gagner. Or, certaines entreprises formulaient leur communication en faisant croire que le client avait gagné. Dès lors, la Cour de cassation s’inscrit dans la lutte contre ces pratiques commerciales trompeuses en souhaitant sanctionner les entreprises en cause par des sanctions assez dissuasives pour stopper ces pratiques. En effet, si la sanction est plus basse que le gain retiré par l’entreprise du fait de ces pratiques, elle n’est pas économiquement incitée à la stoppe, on parle alors de fraude lucrative. La Cour de cassation avait plusieurs solutions pour apprécier ce litige, appliquer les conditions de la responsabilité civile pour faute ou considérer que la fausse promesse s’inscrivait dans un engagement unilatéral voire un contrat de jeu. Or, ces solutions se trouvent être soit insuffisamment efficaces soit injustes au regard de principes comme la liberté contractuelle. La Cour décide donc de créer une solution quasi-contractuelle afin de répondre à ce vide. Par un arrêt de la chambre mixte de la Cour de cassation du 6 septembre 2002, la création d’illusion est consacrée comme un quasi-contrat. Le quasi-contrat est à l’intermédiaire du contrat et de la responsabilité civile car il nait de faits juridiques mais s’exécute comme un acte juridique. Il manque un élément afin de considérer le contrat. En effet, le consentement n’est pas nécessaire – car parfois impossible – afin de considérer le quasi-contrat, il n’y a donc pas de rencontre des volontés mais les quasi-parties sont tenues par les faits juridiques qui ont fait naitre le quasi-contrat. Le Code civil les définit au premier alinéa de l’article 1300 comme « des faits purement volontaires dont il résulte un engagement de celui qui en profite sans y avoir droit, et parfois un engagement de leur auteur envers autrui ».

Classiquement, deux quasi-contrats étaient reconnus par le Code de 1804, la gestion d’affaire et le paiement de l’indu, hérités du droit romain. La Cour de cassation en consacre un troisième par l’arrêt Boudier en 1892, l’enrichissement injustifié. Il sera codifié par le Code civil avec la réforme de 2016 qui en consacre désormais trois, comme en témoigne l’alinéa 2 de l’article 1300 selon lequel le Code régit trois quasi-contrats que sont « la gestion d’affaire, le paiement de l’indu et l’enrichissement injustifié ». Aussi, la réforme ne reprend pas le quasi-contrat prétorien de 2002 sur la fausse annonce d’un gain, critiqué par la doctrine comme un faux quasi-contrat. Toutefois, le Code civil n’infirme pas pour autant la solution, et laisse la porte ouverte à la création d’autres quasi-contrats, ne fixant aucune liste limitative. Pour autant, en écartant implicitement la solution de la Cour, le législateur ne propose aucune solution textuelle pour statuer sur ce genre de situation, faute de mieux.

Dès lors, l’arrêt de 2002 consacre une solution efficace pour lutter contre les pratiques commerciales trompeuses, sans méconnaitre des principes comme la liberté contractuelle. Sa position est à l’intermédiaire entre le régime contractuel et la responsabilité civile, mêlant justice et efficacité dans la recherche d’équilibre de la Cour. Le rejet de cette figure quasi-contractuelle par la doctrine et le législateur ne s’accompagne pas de proposition de solutions visant à combler ce vide législatif.

Aussi, l’étude de la fausse promesse d’un gain comme quasi-contrat vise à se centrer sur cette figure en la comparant à d’autres quasi-contrats afin de mettre en parallèle le régime juridique dégagé par la Cour de cassation avec les autres quasi-contrats codifiés. Il conviendra également d’apprécier la pertinence de la création d’illusion comme quasi-contrat du fait des critiques qui lui sont adressées mais également de l’absence de solution nouvelle. Aussi, dans quelle mesure la création d’illusion est-elle une figure juridique quasi-contractuelle ?

La solution de la Cour de cassation consacre son rôle d’interprétation du droit et de créateur prétorien, nécessaire à l’évolution et à l’adaptation du droit aux situations juridiques concrète qu’elle doit apprécier. Dès lors, son arrêt de 2002 créant une nouvelle figure quasi-contractuelle se révèle à l’équilibre et efficace contre les pratiques commerciales trompeuses. Elle remplit son rôle de protecteur de la partie faible et de sécurité juridique. Sa création quasi-contractuelle et certes imparfaite mais a été injustement rejetée, sans pour autant être remplacée par une solution nouvelle. Enfin, le quasi-contrat est une figure ouverte et sujet à évolution. Bien que la fausse annonce d’un gain ne réponde pas complétement aux critères classiques du quasi-contrat, elle n’en reste pas moins un dans sa finalité, l’empêchement d’un enrichissement sans cause. Aussi, cette figure a été retenue pour son efficacité (I) face aux solutions antérieures inadéquates, pour autant, elle a été injustement écartée par la doctrine et le législateur (II) voire par la Cour elle-même qui refuse d’étendre son domaine d’application.

  1. La figure quasi-contractuelle retenue pour son efficacité

Le litige opposant les associations de consommateur aux entreprises pratiquant des fausses annonces de gain se voit opposer des solutions inadaptées. Les possibilités du droit positif offertes en 2002 étaient inadéquates à la lutte contre ces pratiques trompeuses (A), poussant la Cour a créer une nouvelle solution efficace (B).

  1. L’absence de figure juridique adaptée à la lutte contre les pratiques trompeuses

Les figures juridiques à la disposition de la Cour de cassation ne permettaient pas de répondre de manière juste et efficace au litige concernant les pratiques de fausses annonces. En effet, la responsabilité civile arait été inefficace (1) bien que juste, et la responsabilité contractuelle aurait méconnu le principe d’autonomie de la volonté (2).

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