La Constitution de 1791
Dissertation : La Constitution de 1791. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Artus Bauduin • 30 Octobre 2023 • Dissertation • 3 580 Mots (15 Pages) • 164 Vues
La Constitution de 1791
I. Le choix de la solution représentative : le primat de la souveraineté nationale et la négation de la souveraineté populaire
A) La Nation : fondement de la légitimité politique, reflet de la société productive.
Article 1, Titre III : « la souveraineté est une, indivisible, inaliénable et imprescriptible. Elle appartient à la nation : aucune section du peuple, ni aucun individu ne peut s’en attribuer l’exercice ».
Article 2, Titre III : « La Nation, de qui seule émanent tous les pouvoirs, ne peut les exercer que par délégation. La Constitution française est représentative : les représentants sont le Corps législatif et le roi ».
Ainsi, la Constitution détermine clairement le titulaire de la souveraineté : la nation, et choisit la solution représentative, puisque ce sont le Corps législatif et le roi, en ce qu’ils sont les représentants de la nation, qui sont délégataires de la souveraineté.
Elle se fait ainsi le reflet de la doctrine philosophique de Sieyès, lequel fait de la Nation le fondement de la légitimité politique, tel qu’il l’explique dans son opuscule Qu’est-ce que le Tiers Etat ?
1ère phase : fondement et définition de la Nation : Il pose le principe selon lequel le Tiers constitue une nation complète, par opposition à la noblesse et au clergé, et lui offre ainsi une autonomie politique, par opposition à une société corporative résultant d’une division en ordres.
Pourquoi le Tiers constitue-t-il à lui seul la Nation ? Car il est l’unique corps productif de la société, il est le groupement de tous ceux qui, par leurs efforts, concourent au bien collectif, là où la noblesse au contraire, par ses privilèges constitue un groupe de parasites, car soustraite à l’obligation de production.
Chapitre 1 : « le Tiers Etat est l’intégralité de la Nation, car seul le Tiers Etat réalise les travaux nécessaires à la subsistance et à la prospérité de la société, au nombre de 4 selon Sieyès : « on peut renfermer dans 4 classes tous les travaux particuliers » :
-l’agriculture : « la première classe sera celle de toutes les familles attachées aux travaux de la campagne ».
-l’industrie : « l’industrie humaine parvient à perfectionner les biens de la nature, et le produit brut double, décuple, centuple de valeur. Tels sont les travaux de la seconde classe ».
-le commerce : « Entre la production et la consommation (…) il s’établit une foule d’agents intermédiaires, utiles tant aux producteurs qu’aux consommateurs. Ce sont les marchands et les négociants ».
-les travaux et soins directement utiles ou agréables à la personne : « Cette 4ème classe embrasse depuis les professions scientifiques et libérales les plus distinguées jusqu’aux services domestiques les moins estimés ».
« Tels sont les travaux qui soutiennent la société. Qui les supporte ? Le Tiers état ».
Soustraite à ces travaux, la noblesse, ou « les privilégiés » « loin d’être utiles à la Nation, ne peuvent que l’affaiblir et lui nuire ». « Une telle classe est assurément étrangère à la nation par sa fainéantise ».
Chapitre 1 : « Le tiers embrasse tout ce qui appartient à la nation, et tout ce qui n’est pas le Tiers ne peut pas se regarder comme étant la nation. Qu’est ce que le Tiers ? TOUT.
Ainsi, conformément à sa conception productiviste, la Nation n’est pas le groupement de tous ceux qui habitent sur un même territoire, mais ne réunit que les individus qui produisent et participent ainsi à l’utilité commune.
Dès lors, Il faut entendre par le Tiers Etat l’ensemble des citoyens qui appartiennent à l’ordre commun. Tout ce qui est privilégié par la loi, de quelque manière qu’il le soit, sort de l’ordre commun, fait exception à la loi commune et par conséquent n’appartient point au Tiers état( …) Une loi commune et une représentation commune, voilà ce qui fait une nation.
« Qu’est ce qu’une Nation ? Un corps d’associés vivant sous une loi commune et représentés par la même législature ».
Or, cette conception économique de la Nation va avoir des conséquences sur les modalités de représentation.
2ème phase : Modalités d’expression de la Nation: le pouvoir est exercé par le moyen de la représentation au niveau législatif, c’est donc l’Assemblée qui incarne la Nation.
S’opposant à la pensée Rouseeau selon laquelle la volonté ne peut être représentée, ce qui implique une démocratie directe, Sieyès soutient le système représentatif pour 2 motifs principaux :
- motif pragmatique tenant au territoire : la démocratie directe ne peut fonctionner que dans un petit Etat faiblement peuple, or, la France, grand pays, le plus peuplé d’Europe, ne peut se permettre ce type de système. La délibération ainsi que le vote direct par les citoyens de toutes les lois ne peuvent avoir lieu dans ce type de pays, qui deviendrait dans ce cas ingouvernable.
- motif éducationnel tenant à la conception productiviste : le système représentatif garantit que les affaires publiques soient gérées par les plus qualifiés des citoyens, partant du principe que l’élection permet de distinguer les meilleurs éléments d’une société. Par ailleurs, puisque les affaires publiques sont exclusivement réglées par les représentants, la masse des autres citoyens dispose se son temps pour accomplir les activités privées nécessaires au développement économique.
Si la Nation ne peut avoir d’autre voix que celle de ses représentants, la nécessité de dégager une volonté politique commune implique que ces-derniers soient réunis en un corps représentatif unitaire.
Aussi, la Constitution de 1791 fait le choix d’une Assemblée unique, composé de 745 députés :
Article 1, Chapitre 1, Titre III : « L’assemblée nationale formant le corps législatif est permanente, et n’est composée que d’une Chambre ».
B) La négation de la souveraineté populaire : restrictions au suffrage et interdiction du mandat impératif
...