Commentaire d'arrêt Arcelor
Commentaire d'arrêt : Commentaire d'arrêt Arcelor. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar loulilev • 11 Février 2024 • Commentaire d'arrêt • 3 395 Mots (14 Pages) • 140 Vues
TD n°5 admin
Dans son arrêt Société Arcelor Atlantique du 8 février 2007, le conseil d’Etat traite de la possibilité d’un contrôle de constitutionnalité des directives communautaires.
En l’espèce, dans le cadre du protocole de Kyoto, une directive de l’Union Européenne du 13 octobre 2003 établi un système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre pour les pays de la Communauté européenne. Cette directive a été transposée par la suite par une ordonnance du 15 avril 2004 portant création de ce système en droit interne et ratifiée par une loi du 9 décembre 2004. Un décret du 19 aout 2004 intègre dans son annexe l’annexe I de la directive ajoutant aux entreprises ne pouvant plus entrainer d’émissions de gaz à effet de serre celles produisant et transformant des métaux ferreux et notamment la production de fonte et d’acier comme le fait la société Arcelor.
La société Arcelor demande l’abrogation de l’article 1er du décret du 19 aout 2004. Le Président de la République, le Premier ministre et le ministre de l’écologie et du développement durable ne réponde pas à sa demande, ce qui vaut rejet. La société demande donc l’annulation de cette décision implicite au Conseil d’Etat. Elle demande aussi l’abrogation de l’article 1er du décret du 19 aout 2004 en ce qu’il est inconstitutionnel, méconnaissant le droit de propriété et la liberté d’entreprendre. La société affirme que le décret lui rend applicable le système de quotas prévu par la directive alors que ce n’est pas le cas pour les industries du plastique et de l’aluminium étant dans une situation très proche de la sienne, menant à une méconnaissance du principe constitutionnel d’égalité. La société soutient également l’illégalité du décret et le fait qu’il entraine une méconnaissance du principe de sécurité juridique. Enfin, elle demande au Conseil d’Etat de surseoir à statuer dans l’attente de la déclaration de validité de la directive en question par le tribunal de première instance des Communautés européennes.
Une société peut-elle demander l’abrogation d’un règlement transposant une directive communautaire étant devenu illégale du fait de circonstances de droit ou de faits postérieurs ?
Le décret du 19 aout 2004 transposant directement une directive communautaire est-il conforme à la Constitution ? pour répondre à cette question, le juge doit préalablement déterminer si il revient au Conseil d’Etat de vérifier la compatibilité d’un décret portant transposition d’une directive communautaire avec la Constitution. pour répondre à cette question, le juge doit se demander si il peut contrôler la constitutionnalité d’une directive communautaire. Il doit ainsi déterminer les critères permettant un contrôle par rapport à la Constitution des directives communautaire.
Le Conseil d’Etat refuse d’abroger l’article 1er du décret du 19 octobre 2004 en ce qu’il serait illégal. Il affirme qu’il doit juger un recours portant sur l’illégalité d’un acte qu’il l’ait été dès sa date de signature ou du fait de circonstances postérieures (Alitalia 1989). Il retient que le décret reprend la directive de 2003, le gouvernement a donc respecté à la lettre la directive et ne l’a pas interprété. Pour répondre à la question de la potentielle inconstitutionnalité du décret et donc de la directive communautaire, le Conseil d’Etat cherche les principes d’égalité et droit de propriété et la liberté d’entreprendre dans le droit communautaire. En effet, il retient une obligation de transposition présente dans la Constitution (article 88-1) qui serait en contradiction avec la supériorité des traités sur les lois et donc les actes réglementaires (article 55) si il venait à annuler le décret. Il fait donc le contrôle de constitutionnalité du décret et par extension de la directive à partir de principes équivalents en droit communautaire. Il retient que la directive ne méconnait pas le droit de propriété et la liberté d’entreprendre et que le décret n’est pas inconstitutionnel. Enfin, il affirme qu’il ne peut déterminer si le décret porte atteinte au principe d’égalité doublement protégé. En effet, la jurisprudence de la Cour de Justice des Communautés Européennes (CJCE) permet que des personnes dans des situations comparables sont traitées de manière différente à condition que cela soit objectivement justifié. Or en l’espèce, les industries du plastique et de l’aluminium ne se trouve pas affectées par les quotas imposés par le décret ce qui crée bien un traitement différent alors que les entreprises sont dans des situations comparables. Face à la difficulté sérieuse pour déterminer si cette différence est objectivement justifiée, le Conseil d’Etat sursoit à statuer et pose une question préjudicielle à la CJCE pour qu’elle détermine si cette situation répond au principe d’égalité protégé par le droit communautaire.
Si le Conseil d’Etat fait face à un conflit du fait de l’incompatibilité des obligations reposant sur le juge administratif qu’il doit nécessairement concilier(I), le mécanisme développé par ce dernier donne une place importante mais nécessaire au juge communautaire (II)
- Une incompatibilité des obligations du juge administratif nécessitant une conciliation
Une incompatibilité de la suprématie interne de la constitution avec la vision communautaire
Les modalités de transposition des directives communautaires prévues par le Conseil d’Etat mènent à un conflit entre le droit communautaire et la Constitution en droit interne (A). le conseil d’Etat dans cet arrêt se charge donc de pallier à ce conflit en organisant un mécanisme de double translation (B).
A° Des modalités de transposition des directives à l’origine d’un conflit.
Dans son considérant de principe, le Conseil d’Etat soutient que « la suprématie ainsi conférée aux engagements internationaux ne saurait s’imposer dans l’ordre interne aux principes à valeur constitutionnelle ». Pour affirmer ce principe, il s’appuie sur l’article 55 de la Constitution garantissant la supériorité des normes internationales sur les lois mais qui a contrario, ne prévoit aucunement une supériorité de ces normes sur la Constitution. En ce sens, le Conseil d’Etat semble reprendre une de ses jurisprudences antérieures. En effet, dans son arrêt Sarran du 30 octobre 1998, il affirme la suprématie de la Constitution dans l’ordre interne (sans pour autant affirmer explicitement une supériorité de la Constitution sur les normes internationales). En suivant la logique de cette jurisprudence, il pourrait sembler logique qu’un décret inconstitutionnel soit simplement annulé.
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