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Le commerce des corps

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Par   •  31 Octobre 2018  •  Dissertation  •  3 079 Mots (13 Pages)  •  891 Vues

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Le commerce des corps

        Selon l’écrivain ougandais Isegawa « La prostitution est un commerce dont l’enveloppe est plus attrayante que le contenu ». En effet, se prostituer s’apparente à un acte de vente ayant pour objet le corps. La personne qui se prostitue, d’une certaine manière, vend son corps au consommateur en lui offrant un service : elle consent à pratiquer des rapports sexuels en l’échange d’une somme d’argent. On reconnait alors ici un échange entre deux corps. Cet échange s’opère par la marchandisation d’un corps et la satisfaction du désir de l’autre. Un tel fait amène à s’interroger sur un sujet auquel la société porte aujourd’hui un intérêt croissant : le commerce des corps.         

        Le commerce se définit d’abord comme une activité : celle de l’achat, de la vente, de l’échange de marchandises ou de valeurs. Lorsque l’on pense au corps, on pense d’abord au corps humain, c’est-à-dire à l’ensemble des parties matérielles constituant l’organisme, siège des fonctions psychologiques. Le mot de Körper fait état d’un double sens : le corps est à la fois un corps physique (biologique, humain) et Physique (la matière, la réalité de tout les objets. Si l’on envisage qu’il puisse exister un commerce des corps (physiques, humains), un premier problème se pose. En effet, le corps est tout d’abord et pour beaucoup considéré comme sacré, un don de Dieu dans certaines religions (pour les chrétiens, le corps est d’ailleurs la propriété de Dieu). Dès lors, le corps est quelque chose dont on doit prendre soin, dont on ne peut user ou tirer profit comme bon nous semble. Pourtant le commerce, lui, est à but lucratif. Le commerce des corps est alors un processus où l’on tire profit de quelque chose dont on ne peut, à priori, normalement pas user à cet escient. Peut-être qu’alors il est nécessaire d’ envisager le commerce sous la perspective de la notion d’échange, de relation, de contact entre différentes réalités, différents corps. Sous cet angle, il est possible d’envisager un commerce sain entre les corps, différents types d’échanges que nous étudierons par la suite. Mais peut-être qu’il y a en réalité aujourd’hui un véritable commerce des corps, un « business » qui se créer autour de ce corps qui deviendrai alors objet de possession. Il est aussi possible de considérer le Corps en tant que concept, un principe d’unité au sein duquel les diversités s’unissent, tissent du lien pour former un ensemble plus grand dont émerge un nouveau niveau de réalité. Dans cette perspective, il sera aussi possible de considérer un commerce des corps au sein même du corps et entre le corps et son environnement.                  

        Une question se pose donc : comment peut-il y avoir commerce des corps alors que le corps est à priori une réalité invendable ?

        En considérant le commerce au sens d'échange, nous verrons qu’il y a par essence un commerce du corps qui répond au lois de la nature (I). Nous verrons alors qu’au sens strict du terme commerce (achat, vente, monétisation) il y a bel et bien aujourd’hui et de manière croissante un commerce des corps qui semble d’ailleurs aller contre l’éthique (II). Nous dépasserons alors la vison du corps humain pour considérer le corps en tant que concept. Nous verrons ainsi que le commerce au sens d’échange, d’alliance est en réalité constitutif du concept de corps. Le commerce des corps vise à former un Corps (III).

        Si l’on considère commerce en tant qu’échange, relation, il y a par essence un commerce des corps qui s’opère dans le cadre des lois de la nature.

        Il y a un commerce des corps qui s’opère de manière naturelle, biologique. La manière dont les gênes ont décidé de s’organiser pour maximiser leur reproduction en est un exemple.  Dans le Gène égoïste, le biologiste membre de la Royal Society Richard Dawkins, renvoie l’idée de Corps à un phénomène évanescent, qui tend à disparaitre. Pour lui, quelle que soit l’échelle sur laquelle nous appliquons notre analyse, l’objet de cette analyse disparaît : le Corps social devient un ensemble d’individus, l’individu un ensemble d’organes, eux mêmes composés de cellules etc. Cette régression marque toutefois selon Dawkins un cran d’arrêt au niveau du gène qui est l’élément immortel, générateur de toute vie. Tout relève alors de la stratégie que les gènes ont décidé d’adopter pour maximiser leur réplication (cette stratégie aurait pu être tout autre que celle du corps). Pourtant le désir, qui s’exprime par la sensualité (qui provient du corps), recherche une relation, un échange, un commerce avec le corps de l’autre. Dawkins nous dira que c’est en réalité nos gênes qui cherchent à travers le corps de l’autre à se reproduire. Il y donc bien par essence un commerce des corps qui découle de la stratégie que les gênes ont adopté pour se reproduire. Ce commerce est double : il y a d’abord une alliance, un relation entre les gènes qui s’unissent pour former un corps mais aussi un échange entre les gênes de deux corps distincts qui cherchent mutuellement à se reproduire.

        La reproduction d’ailleurs, s’inscrit dans une dynamique de commerce entre deux corps. En effet, les corps, animaux notamment, en tant qu’ils sont sexués ont besoin de se reproduire et doivent donc commercer. L’échange entre les corps est une dimension essentielle du corps sexué et c’est justement parce qu’il est sexué que le corps appelle à la rencontre avec d’autres corps (Il est rare que le corps se satisfasse pleinement dans l’acte solitaire). Dans Le corps utopique, Michel Foucault dit que « si l’on aime tant faire l’amour c’est parce que dans l’amour le corps est ici ». Il veut ici dire que le corps en tant qu’il est sexué, ne se réalise vraiment en tant que tel dans le commerce amoureux. En effet la sexualité est liée au désir et le désir d’adresse avant tout à un être cher L’échange entre deux corps sexués n’est alors bien souvent possible que si les corps s’offrent l’un à l’autre, ils doivent se découvrir et donc aussi s’aimer, ressentir des émotions, une attirance envers l’autre, de l’amour. Il semble donc y avoir un commerce des corps en tant qu’ils sont sexués. L’échange qui s’opère à travers l’acte sexuel est d’abord et naturellement celui de la reproduction mais aussi celui du plaisir mutuel.

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