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Commentaire d'arrêt Tribunal administratif Cergy-Pontoise, 8 novembre 2019, n° 1912597

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Par   •  18 Mars 2021  •  Commentaire d'arrêt  •  2 214 Mots (9 Pages)  •  1 049 Vues

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Tribunal administratif Cergy-Pontoise, 8 novembre 2019, n° 1912597 (larges extraits)

TD DROIT ADMINISTRATIF

Thème 1 : la police administrative (séance 1)

COMMENTAIRE JUGEMENT TA CERGY-PONTOISE, 08/11/2019, N° 1912597

Le Conseil d’Etat dans un arrêt du 2 décembre 1932, Ville de Melin, attribut le pouvoir de police générale, au niveau communal, au maire. Le pouvoir de police générale se distingue du pouvoir de police spécial. Cette distinction relève du principe de séparation des autorités administratives et judiciaires qui a pour conséquence que la direction et le contentieux de la police judiciaire relèvent de l’autorité judiciaire. L’administration et le juge administratif n’ont de pouvoir que sur la police administrative et ne doivent pas intervenir dans le fonctionnement du service public judiciaire. Cette distinction relève, selon deux arrêts de principes, d’un critère finaliste (CE, sect., 11 mai 1951, Consorts Baud, et TC, 7 juin 1951, Dame Noualek). Cependant, le Conseil d’Etat, le 18 avril 1902, dans son arrêt Commune de Néris-les-Bains, considère que si l’autorité de police spéciale a agi, l’autorité de police générale peut agir sur le même objet lorsqu’elle vise à aggraver les mesures de police spéciales et que les circonstances locales le justifient.

Cette situation est illustrée par un arrêt rendu par le tribunal administratif le 08 novembre 2019. 

En l’espèce, le 13 juin 2019, le maire de Gennevilliers a pris un arrêté interdisant l’utilisation du glyphosate et de produits phytopharmaceutiques à l’exception des produits à faible risque ou des produits qui n’ont pas fait l’objet de classement, autorisés en agriculture biologique et de biocontrôle, pour l’entretien de certains espaces définis à son article 2. Le 18 juillet 2019, le préfet des Hauts-de-Seine, a demandé au maire de retirer son arrêté. Cette demande a été rejeté le 4 septembre 2019 par le maire de Gennevilliers et le maire de la commune de Sceaux.

Dès lors, le préfet des Hauts-de-Seine demande au juge des référés la suspension de l’arrêté du 13 juin 2019 en invoquant l’article L. 554-1 du Code de justice administrative qui se réfère à l’article L2133-1-6 du Code général des collectivités territorial qui consacre en son alinéa 3 de la compétence du préfet pour demander une suspension dès lors qu’il est possible de créer un doute sérieux quant à la légalité de l’acte.

Le tribunal administratif alors saisi du litige devait répondre au problème de droit suivant : le maire d’une commune peut-il interpréter la notion de danger grave ou imminant ou de circonstance particulière de sorte à prendre des mesures relevant de son pouvoir de police général ?

Le tribunal administratif, dans sa solution, retient que « S’il appartient au maire, responsable de l’ordre public sur le territoire de sa commune, de prendre les mesures de police générale nécessaires au bon ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques, il ne saurait s’immiscer dans l’exercice de cette police spéciale qu’en cas de danger grave ou imminent ou de circonstances locales particulières ». Autrement, dit, le tribunal justifie l’immixtion du maire dans le pouvoir de police spécial au regard du danger grave que constitue l’utilisation de produits phytopharmaceutiques envers les populations. Ainsi, le tribunal administratif a rejeté la requête du préfet des Hauts de Seine.

Dès lors, en quoi le tribunal administratif de Cergy-Pontoise consacre-t-il la compétence du maire pour user de son pouvoir de police générale pour s’immiscer dans l’exercice de la police spécial s’il justifie d’un danger grave ou imminent ou des circonstances particulières ?

En principe, on distingue les autorités titulaires du pouvoir de police générale des autorités détentrice d’un pouvoir de police spécial de sorte que le domaine de réglementation de l’utilisation des produits phytopharmaceutiques est conféré au ministre de l’Agriculture (I). Par exception, le tribunal administratif a consacré, après de nombreuses décisions en contradiction, la possibilité de prendre des mesures au niveau local pour le pouvoir de police générale appartenant au maire -au respect de certaines conditions (II).

  1. La compétence exclusive du pouvoir de police spécial en matière de réglementation de l’utilisation des produits phytopharmaceutiques : une solution classique

Le partage de compétence des deux types de pouvoir de police sont régis par des textes législatifs (A) afin d’éviter que l’autorité administrative détentrice du pouvoir de police générale s’immisce dans l’exercice du pouvoir de police spéciale (B).

  1. Un pouvoir discrétionnaire relevant de dispositions législatives

En effet, le tribunal administratif rappel dans cet arrêt que l’article R. 253-45 du Code rural et de la pêche maritime dispose que « l’autorité administrative mentionnée à l’article L.253-7 est le ministre chargé de l’agriculture ». Autrement dit, dans les domaines énoncés par ce dernier article, seul le ministre chargé de l’agriculture peut prendre des mesures afin de sauvegarder, en l’espèce, la protection des habitants au regard de l’utilisation de glyphosate et de de produit phytopharmaceutiques. Le champ d’action de ces autorités compétentes sont limités puisqu’elles ne peuvent agir uniquement en vue de leur domaine conféré.

        Dès lors, l’autorité compétente a pour obligation de prendre des mesures préventives et nécessaires aux objectifs de préserver la santé publique et l’environnement. En principe, la police administrative a pour finalité d’assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publique (article L2212-2 CGCT). A cela s’ajoute par ailleurs le principe de précaution (CE, sect., 22 février 2002, Société Pétroles Shell) en matière environnementale. Afin de préserver ces finalités, l’autorité administrative concilie la protection de l’ordre public tout en prenant en compte les libertés publiques tel que le CE, dans un arrêt rendu en 2000, considère que « cela n’exonère pas l’autorité investie du pouvoir de police de prendre en compte la liberté du commerce et de l’industrie et les règles de concurrence » (CE, sect, avis, 22 novembre 2000, société L et P Publicité SARL). C’est pour cela qu’en l’espèce, le juge administratif a vérifié la conciliation entre la préservation de la santé publique et l’environnement avec le classement des produits considérés comme « à risque » de sorte à ne pas limiter la liberté de production en agriculture biologique et de biocontrôle. En ce sens, toutes mesures prises par l’autorité administrative sont subordonnées au principe de proportionnalité de sorte que « la liberté est la règle, la restriction de police l’exception » (CE, 10 aout 1917, Baldy).  

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