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Les langues comme produits culturels

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Par   •  23 Juin 2018  •  Commentaire de texte  •  811 Mots (4 Pages)  •  546 Vues

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Les langues comme produits culturels

- Les langues ne sont pas des nomenclatures, c’est à dire des répertoires de mots correspondant à des choses. L’idée naïve selon laquelle une langue serait un « calque de la réalité » ne résiste pas à un examen approfondi. Ainsi par exemple, dans l’étude d’une langue étrangère, on « découvre » souvent des unités de sens qui n’ont pas leurs stricts correspondants au sein de la langue d’origine (Cf. Mutton et sheep en anglais).

- Si une langue ne renvoie pas directement á une réalité physique, il faut identifier une médiation. Celle-ci n’est pas autre chose que la culture au sens strict d’organisation matérielle et mentale de l’expérience : « Il n’y a pas de relation naturelle, immédiate et directe entre l’homme et le monde, ni entre l’homme et l’homme. Il faut un intermédiaire, cet appareil symbolique, qui a rendu possible la pensée et le langage […]. Le langage se réalise toujours dans une langue, dans une structure linguistique définie et particulière, inséparable d’une société définie et particulière ».

- Une langue, comme produit culturel, atteste et implique tout à la fois une certaine conception du monde. Autrement dit, les significations que chaque langue distingue et organise en un système renvoient à un ensemble de représentation, de valeurs et de choix qui caractérisent une culture. Toute signification est d’emblée différentielle, c’est à dire qu’elle est délimitée par un contexte de langue lui-même explicable par une culture déterminée. Ainsi, l’invasion normande de l’Angleterre par les normands, en introduisant l’usage culinaire du mouton, allait faire apparaître à côté du mot saxon sheep, le mot mutton, désignant la viande de boucherie. C’est bien un nouvel élément culturel (en l’occurrence une tradition culturelle exogène) qui allait « redécouper » les significations. On comprend dès lors que Martinet puisse affirmer : « En fait, à chaque langue correspond une organisation particulière des données de l’expérience ».

- Les exemples montrant l’implication d’une conception du monde dans toute langue sont très divers :

               a) L’importance culturelle d’une réalité, et sa valorisation linguistique : la pluralité des termes dont usent les Eskimos pour désigner la neige (pluralité liée aux multiples usages de la neige).

               b) Les modes de vie spécifiques qui sous-tendent une langue. Le mot breakfast n’évoque pas du tout la même réalité culinaire que l’expression « petit-déjeuner ». Ainsi, la traduction terme à terme reste toujours incomplète, car elle ne peut établir la correspondance entre langues d’abstraction.

               c) L’organisation spécifique de l’expérience sensorielle.

Martinet : «... Là où le français a le choix entre bleu, vert et gris pour traduire ses sensations, un Breton ou un Gallois devra se contenter du seul mot glas qui recouvre les 3 domaines du bleu, du vert et du gris (…) la façon dont nous analysons le spectre ne correspond pas à une réalité physique universellement valable, mais à une tradition culturelle transmise par la langue que nous parlons depuis l’enfance ».

               d) Les représentations sous-jacentes à un univers linguistique donné (connotation). C’est dans le domaine de la poésie que peut s’éprouver le mieux la spécificité de tout un univers mental et symbolique culturellement déterminé. La traduction d’un poème est très difficile car le monde d’images, de croyances collectives, de réactions affectives qu’il véhicule est solidaire de tout un mode de vie spécifique. Traduction trahison, selon le mot célèbre.

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