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Zone / Apollinaire

Commentaire de texte : Zone / Apollinaire. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  9 Février 2022  •  Commentaire de texte  •  1 989 Mots (8 Pages)  •  803 Vues

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Lecture linéaire : « Zone » (v1 à v24 )

Introduction :

Ce poème qui ouvre le recueil est pourtant le dernier composé par Apollinaire, en 1912.

Bouleversé par sa rupture avec Marie Laurencin, le poète fait le point sur les événements de sa vie et sur le monde qui l’entoure. Ce long poème se présente comme une errance dans le temps et dans l’espace, et réunit les grands thèmes du recueil. Il est aussi un des plus novateurs, un manifeste de « l’esprit nouveau » prôné par Apollinaire.

Forme : poème en vers libres, absence de ponctuation comme dans tout le recueil

Le titre, « Zone » , est polysémique :

-Etymologiquement, il vient du grec « zôné » qui signifie la ceinture. (Cela renvoie à la forme circulaire du poème qui commence et finit à Paris.)

-Au début du XXième, le terme « zone » est employé pour désigner à Paris, les faubourgs d’habitations précaires.

-Ce titre renvoie aussi au thème de l’errance.

-Enfin, le poème est aussi composé de zones juxtaposées, ce qui rappelle la technique du collage, chère aux peintres cubistes.

Pb : En quoi ces vers reflètent-ils la modernité d’Apollinaire ?

Plan : Il est difficile de délimiter des parties dans ces 24 premiers vers qui forment un tout .

On peut néanmoins distinguer :

v1 à 3 : La rejet du monde ancien .

V4 à 10 : l’affirmation paradoxale de la modernité de la religion

v11 à 14 : La poésie dans la ville : la littérature de la modernité.

V15à 24 : Le début de l’errance du poète et sa vision poétique d’une rue de la ville

Etude linéaire

V1 à 3 : Chacun de ces 3 vers est isolé par un blanc typographique, comme pour mieux affirmer le refus du monde ancien.

V1 : Ce poème commence paradoxalement par l’expression « à la fin » qui suggère une conclusion. il faut ici le comprendre comme l’aboutissement d’une longue réflexion.

Autre paradoxe, on peut considérer ce v1 comme un vers de 11 syllabes ou comme un  alexandrin si on fait la diérèse sur « ancien » ; ainsi le poète utilise le vers le plus noble de la tradition poétique, alors qu’il proclame sa lassitude du « monde ancien ».(forme d’humour de la part d’Apollinaire)

Le pronom « tu » désigne le poète qui dialogue avec lui-même, se dédouble . Signe peut-être de sa quête d’identité.

Le v2 crée une rupture par l’image surprenante qu’il propose. La tour Eiffel ancre le poème dans le Paris de la modernité. Inaugurée en 1889 pour l’exposition universelle, elle est la vitrine du savoir faire technologique de la France. Or Apollinaire l’associe grâce à une métaphore filée, à une réalité traditionnelle, ancienne, du monde rural : la tour est comparée à une « bergère »/ les ponts à son « troupeau »/ le bruit, l’agitation, la vie sont évoqués par le verbe « bêle ». on peut peut-être imaginer que l’image de la bergère naît d’un jeu de mots avec les « berges » de la Seine sur lesquelles se trouve la tour, et que les 2 autres images découlent de la première. On peut y voir également une opposition entre la ligne verticale de la tour et les lignes horizontales des ponts. Quant aux arches, elles peuvent rappeler le dos des moutons en troupeau. L’interjection « ô » qui invoque la tour Eiffel, lui donne un caractère sacré.

Le v3 reprend le v1 en écho. Ils sont rigoureusement parallèles mais utilisent un registre de langue différent : v1 « tu es las » : langage soutenu // v3 « tu en as assez » : bcp plus familier , relève de l’oralité. (mélange des registres, récurrent dans tout le recueil). L’expression « monde ancien » au v1 , se voit ici précisée dans la référence à « l’antiquité grecque et romaine » qui est la source de toute la littérature classique, rejetée par le poète.

V4 à 10 : L’affirmation paradoxale de la modernité de la religion :

6 vers marqués par le champ lexical de la religion associé à celui de la modernité.(à relever)

V4et 5 :  Apollinaire continue à surprendre le lecteur en opposant contre toute logique , les automobiles qu’il définit comme « anciennes » à la religion qu’il dit « toute neuve ». L’exception qu’elle représente est mise en valeur par l’adjectif « seule ». C’est d’autant plus paradoxal que la religion chrétienne existe depuis presque 2 millénaires. Le verbe « est restée » souligne une idée de permanence.On peut comprendre peut être que seul le sentiment religieux traverse les siècles.

Le v6 : est relié au précédent par un enjambement et la répétition du groupe verbal « la religion est restée »qui crée un effet d’insistance .L’adjectif « simple » est ici élogieux de même que la comparaison étrange avec « les hangars de Port-Aviation », premier aérodrome près de Paris. Cette comparaison associe une idée abstraite à une réalité concrète. On peut peut-être l’expliquer par le fait que la religion et l’aviation ont en commun l’idée d’élévation, spirituelle pour la première, physique pour la seconde.

Le vers 7 , réaffirme l’exception du christianisme , grâce à la mise en valeur de l’adjectif « seule », en tête de vers. D’une certaine manière, ce vers apporte une explication aux précédents, grâce à un jeu de mots. Si le christianisme est moderne, c’est parce qu’il succède et s’oppose  à l’antiquité rejetée par le poète au v3.

Le v8 est encore plus paradoxal : le poète s’adresse directement au pape Pie X. , par le biais du pronom « vous » et il le caractérise par le superlatif, « l’européen le plus moderne, » placé en tête de vers. L’effet de surprise est total quand on pense que ce pape est parmi les plus réactionnaires. Deux explications possibles : Pie X a béni l’aviateur André Beaumont, vainqueur de la course Paris / Rome. Il participe donc de l’aventure de l’aviation qui fascine Apollinaire. D’autre part, il est le chef de la religion catholique, symbole de la sortie de l’antiquité gréco romaine. On peut surtout y voir une manifestation de l’esprit de provocation d’Apollinaire et de son sens de l’humour.

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