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Le retour au désert Koltès

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Par   •  13 Mars 2022  •  Commentaire de texte  •  1 787 Mots (8 Pages)  •  2 542 Vues

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BAC BLANC FRANCAIS

Le théatre, sujet B commentaire      

Maëlys                      

MALABOEUF

Cours Thalès

        Apparu en Grèce à la fin du VI e siècle avant J.C, le théatre est un genre littéraire particulier, associant texte et spectacle. D’Eschyle à Plaute, en passant par Sophocle, Euripide, Sénèque, il se développera au fil des siècles pour atteindre son âge d’or au XVIIe grâce à d’illustres dramaturges comme Molière, Racine, ou Corneille. Le siècle suivant permettra à Marivaux mais aussi à Beaumarchais de s’illustrer avec une grande liberté grâce au mouvement des lumières. Le XIXe sera marqué par le drame romantique, avec des dramaturges comme Musset, et le siècle suivant sera révélateur de modernité, grâce aux nouveaux moyens techniques. Bernard-Marie Koltès, auteur dramatique français, écrit en 1988 Le retour au désert , qui raconte le retour de Mathilde avec son fils en France après la Guerre d’Algérie, pour récuperer la maison dont elle a hérité, et parallèlement, régler ses comptes avec son frère Adrien. L’extrait proposé à l’étude (extrait de la scène 2) illustre une violente querelle entre le frère et la soeur.

        Ainsi, en quoi la violence de la querelle est-elle révélatrice d’une opposition ?

        Nous étudierons dans une première partie la violence de l’affrontement, puis dans une seconde, nous analyserons l’affrontement révélateur d’une opposition de caractère et de valeurs.

        En premier lieu, l’extrait nous révèle la violence de l’affrontement : la violence physique, des mots, et la surenchère verbale.

         Ainsi, la parole substitue l’affrontement physique. Les deux protagonistes sont prêts à s’affronter physiquement, mais sont retenus contre leur gré comme nous l’indiquent les didascalies : « Edouard retient sa mère, Aziz retient Adrien » (l.4) ; « Aziz entraine Adrien, Edouard entraîne Mathilde. Mais ils s’échappent et reviennent » (l.23). Le serviteur, Aziz, qui retient Adrien, est pourtant prêt à une bataille sanglante : il l’exprime par l’image violente : « Aziz ramassera les morceaux » (l.1). Les répliques longues, quoique reliées par un enchaînement sur le mot « -Eh bien oui, je te défie.. » ne se présentent pas comme un dialogue, elles semblent avoir leur propre autonomie, et chacune d’elle sont une démonstration de force. Le frère et la soeur n’écoutent pas les arguments de l’un et l’autre, chacun souhaite uniquement être supérieur à l’autre. Ils emploient des stratégies similaires : dévaloriser l’interlocuteur en est une.

        La violence des mots est l’une des stratégies utilisée par les protagonistes pour gagner cet affrontement. Adrien insulte sa soeur, de façon méprisante, la traitant de « pauvre folle » (l.5) ; il la rabaisse : « tu n’es qu’une femme » (l.7). Il emploie un vocabulaire péjoratif pour offenser son adversaire : « on te cracherait au visage » (l.9) ; « bannie de la société » (l.8-9) . Il s’impose comme supérieur à elle par les propos mysogines qu’il tient, renforcée par l’anaphore « à genoux » (l.10 ; l.12 ; l.13) qu’il répète pour appuyer sa domination. Il revient sur des évenements passés (« Il y a peu de temps encore… » l.8) pour rappeler à sa soeur qu’avant, on était puni pour de tels actes : « on t’enfermerait dans une pièce secrète pour faire comme si tu n’existais pas » (l.9-10) ; « notre père t’a forcé à dîner à genoux pendant un an à cause de ton péché » (l.10-11) ; « c’est à genoux que tu devrais… » (l.12 ; l.13). Mathilde  réplique avec plus de subtilité, en insultant l’épouse de son frère et en la désignant de manière péjorative : « ce qui te sert de femme » (l.15). De même, plutôt que de faire référence à un châtiment ou aux évènements passés, elle préfère projeter Adrien et sa descendance dans un avenir de désolation, comme en témoigne le champs lexical de la décomposition : « faillite ; lézarde ; pourriture ». Les mots sont minutieusement choisis pour faire mal.

        Néanmoins, leur puissance destructrice est accentuée par l’impression de surenchère verbale. La force même des termes employés est augmentée par l’accumulation et la saturation des répliques. Ainsi, Adrien pense pouvoir réduire Mathilde à néant en multipliant les termes d’adresse comme « tu », repris onze fois, ou en multipliant les questions rhétoriques : « Tu crois, pauvre folle, que tu peux défier le monde ? » (l.5) ; « Qui penses tu être pour bafouer les bonnes manières … injurier le monde entier ? » (l.6-7) ; « Que viens-tu revendiquer ? » (l.10) ; « Pour qui te prends-tu […] pour sans cesse nous maudire et nous défier ? » (l.13-14) ; « Crois-tu que j’ai besoin de cette maison ? » (l.33) . Il donne également à ses propos une puissance graduelle par l’emploi des verbes : « tu crois » ; « tu peux » ; « tu devrais » . La gradation est également présente dans les multiples définitions qu’il fait d’elle « Tu n’es qu’une femme, une femme sans fortune, une mère célibataire, une fille-mère » (l.7-8) : il l’attaque d’abord sur son statut sexuel (une femme), puis sur son statut social (femme sans fortune), et sur son indignité morale (Mathilde est une fille-mère, une mère célibataire). Cette disqualification culmine par un déni d’existence en bonne et due forme : « …comme si tu n’existais pas. » (l.10). Adrien insiste, joue avec les accumulations, énumérant par une suite de verbes à l’infinitif l’attitude de sa soeur : « bafouer les bonnes manières, critiquer les habitudes des autres, accuser, calomnier, injurier le monde entier ? ». Mathilde, elle aussi, a recours à la répétition, fondant même toute la première partie de son discours sur le verbe « défier ». C’est l’accumulation des codes du verbes : « le jardin […], l’arbre […], le mur […] » qui fait toute l’efficacité et la force de son défi. Elle emploie une anaphore « je te défie […], je défie […] » qui renforce l’idée. Les stratégies semblent similaires sur la forme, mais pas sur le fond.

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