Flaubert Madame de Bovary scène de la servante
Commentaire de texte : Flaubert Madame de Bovary scène de la servante. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Pierroww • 19 Mai 2021 • Commentaire de texte • 2 626 Mots (11 Pages) • 959 Vues
Gustave Flaubert, Madame Bovary (1857)
[Emma, jeune fille romanesque, a épousé un médiocre officier de santé et elle s’ennuie. Les époux Bovary se
sont installés dans un bourg de la campagne normande, à quelque distance de Rouen, Yonville-l’Abbaye. Des comices
agricoles s’y tiennent, en présence, non du préfet, qui n’a pas pu se déplacer, mais d’un conseiller de préfecture, M.
Lieuvain. Réfugiée dans une salle de la mairie avec un gros propriétaire des environs dont elle vient de faire la
connaissance, Emma ne prête qu’une attention distraite à la cérémonie. On distribue des prix aux paysans des environs
pour récompenser leurs différentes spécialités agricoles. Vient le tour d’une vieille servante.]
1. Le béguin est une coiffe de toile attachée par une bride sous le menton.
2. La raideur que donne aux moines et aux religieuses dans les couvents la pratique d’une règle rigoureuse.
3. Leur tranquillité douce et sereine.
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« Catherine-Nicaise-Élisabeth Leroux, de Sassetot-la-Guerrière, pour cinquante-quatre ans
de service dans la même ferme, une médaille d’argent – du prix de vingt-cinq francs ! »
« Où est-elle, Catherine Leroux ? » répéta le Conseiller.
Elle ne se présentait pas, et l’on entendait des voix qui chuchotaient :
— Vas-y !
— Non.
— À gauche !
— N’aie pas peur !
— Ah ! qu’elle est bête !
— Enfin y est-elle ? s’écria Tuvache.
— Oui !… la voilà !
— Qu’elle approche donc !
Alors on vit s’avancer sur l’estrade une petite vieille femme de maintien craintif, et
qui paraissait se ratatiner dans ses pauvres vêtements. Elle avait aux pieds de grosses
galoches de bois, et, le long des hanches, un grand tablier bleu. Son visage maigre,
entouré d’un béguin1 sans bordure, était plus plissé de rides qu’une pomme de reinette
flétrie, et des manches de sa camisole rouge dépassaient deux longues mains, à
articulations noueuses. La poussière des granges, la potasse des lessives et le suint des
laines les avaient si bien encroûtées, éraillées, durcies, qu’elles semblaient sales
quoiqu’elles fussent rincées d’eau claire ; et, à force d’avoir servi, elles restaient
entrouvertes, comme pour présenter d’elles-mêmes l’humble témoignage de tant de
souffrances subies. Quelque chose d’une rigidité monacale2 relevait l’expression de sa
figure. Rien de triste ou d’attendri n’amollissait ce regard pâle. Dans la fréquentation des
animaux, elle avait pris leur mutisme et leur placidité3. C’était la première fois qu’elle se
voyait au milieu d’une compagnie si nombreuse ; et, intérieurement effarouchée par les
drapeaux, par les tambours, par les messieurs en habit noir et par la croix d’honneur du
Conseiller, elle demeurait tout immobile, ne sachant s’il fallait s’avancer ou s’enfuir, ni
pourquoi la foule la poussait et pourquoi les examinateurs lui souriaient. Ainsi se tenait,
devant ces bourgeois épanouis, ce demi-siècle de servitude.
— Approchez, vénérable Catherine-Nicaise-Élisabeth Leroux ! dit M. le Conseiller,
qui avait pris des mains du président la liste des lauréats.
Et tour à tour examinant la feuille de papier, puis la vieille femme, il répétait d’un ton
paternel :
— Approchez, approchez !
— Êtes-vous sourde ? dit Tuvache, en bondissant sur son fauteuil.
Et il se mit à lui crier dans l’oreille :
— Cinquante-quatre ans de service ! Une médaille d’argent ! Vingt-cinq francs !
C’est pour vous.
Puis, quand elle eut sa médaille, elle la considéra. Alors un sourire de béatitude se
répandit sur sa figure, et on l’entendit qui marmottait en s’en allant :
— Je la donnerai au curé de chez nous, pour qu’il me dise des messes.
— Quel fanatisme ! exclama le pharmacien, en se penchant vers le notaire.
Madame Bovary, deuxième partie, chapitre 8.Pour l’oral
lecture linéaire de la page
[Documenter l’introduction et amener le questionnement problématique,
en situant l’oeuvre dans le siècle, le passage dans le roman, et enfin ses enjeux :]
• Considéré, quoiqu’à son corps défendant, comme l’un des maîtres du roman réaliste, Flaubert
n’a pas l’écriture fulgurante de Stendhal : 53 jours pour écrire La Chartreuse de Parme ; 55 mois
pour Madame Bovary (19 sept 51 - 30 avril 56), et 4 mois pour le seul épisode des comices, dont
les brouillons nous racontent
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