Le Patrimoine

Les pierres ont tant de choses à dire. Les murs ont tant de souvenirs à exhumer. Interroger la propriété immobilière d’une ville s’apparente à un voyage en accéléré dans le temps. L’on y parcourt les siècles en valsant à quatre temps au gré des oscillations du corps social. Les uns qui entrent (les bourgeois) grâce aux autres qui sortent (le clergé et les nobles). L’élan des insurgés d’hier qui pose les acquis du lopin de terre d’aujourd’hui : “La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n’est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment, et sous la condition d’une juste et préalable indemnité”.

Le quadrille du Second Empire qui marque l’arrivée des villes et des grandes compagnies industrielles et bancaires dans le cénacle des biens logés. Le Front populaire qui érige l’État en souverain propriétaire et rêve de nationaliser les biens… De tous temps, l’instinct de propriété a réagi aux moindres soubresauts de l’histoire économique et sociale. Si bien qu’aujourd’hui, encore, l’insidieuse traque de l’État, par ses impôts et taxes, est de nature à bouleverser les règles de l’accession. “Un petit chez soi vaut mieux qu'un grand chez les autres”. Tout populaire qu’il soit, le vieux dicton n’en traduit pas moins la solide mentalité de petits propriétaires qui sommeille en chacun d’entre nous. Et les pierres, quand elles parlent, n’évoquent rien d’autre que notre attachement viscéral à la propriété privée comme s’il s’agissait d’une liberté fondamentale. Et les murs, quand ils brisent le silence, ne disent rien d’autre que “l’immobilité de l’immobilier dissimule trop souvent la mobilité de ce qu’est l’immobilier”.

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