Commentaire de l’arrêt KONE (CE, 3 juillet 1996): refus général d’extradition à des fins politiques en raison d’un PFRLR dégagé par le Conseil d’état
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Commentaire de l’arrêt KONE (CE, 3 juillet 1996)
L’arrêt Koné est relatif au refus général d’extradition à des fins politiques en raison d’un PFRLR dégagé par le Conseil d’état.
L’origine de l’affaire portée devant le Conseil d’Etat repose sur un décret du 17 mars 1995 accordant l’extradition de M. Koné aux autorités maliennes l’accusant de « complicité d’atteinte aux biens publics et enrichissement illicite ».
Après la chute du régime Traoré, M. Koné a été affecté au bureau parisien de la banque du développement du Mali, ce qui explique sa présence en France. M. Koné a ensuite demandé la reconnaissance de sa qualité de réfugié, ce qui lui a été refusé par les autorités Françaises.
Il a donc été arrêté le 19 avril 1994 et une demande d’extradition a été transmise au gouvernement français le 27 avril. La première chambre d’accusation de la Cour d’appel de Paris a donné un avis partiellement favorable, confirmé par la Cour de cassation. Par la suite, l’affaire est portée devant l’assemblée du contentieux du Conseil d’Etat.
Le Conseil d’Etat va alors tenter de combler une lacune juridique, assez fréquente en matière d’extradition, et observée dans des accords bilatéraux de coopération signés par la France en matière de justice.
Ce silence concerne l’absence de disposition imposant le rejet des demandes d’extradition faites dans un but politique. Le Conseil d’Etat observe que l’accord de coopération en matière de justice du 9 mars 1962 conclu entre la France et le Mali ne comporte aucune disposition concernant l’extradition demandée dans un but politique.
Pour résoudre ce problème récurrent, le Conseil d’Etat va alors user d’un procédé qu’il n’a pratiquement jamais utilisé, puisqu’il est habituellement réservé au Conseil constitutionnel : le Principe fondamental…
Le Conseil d’Etat dégage alors un PFRLR selon lequel l’Etat doit toujours refuser l’extradition d’un étranger lorsqu’elle est demandée dans un but politique. Ce PFRLR contient donc une règle constitutionnelle explicite que l’Etat français doit respecter : l’obligation de rejeter la demande d’extradition d’un individu alors que celle-ci repose sur un motif politique.
Au regard de la solution du CE, il faut se demander quelle est l’incidence du PFRLR édicté sur le droit positif français et notamment sur la question du juge compétent pour dégager les PFRLR et sur la hiérarchie des normes.
La détermination d’un PFRLR par le juge administratif est en effet exceptionnelle (I) et la légitimité de celui-ci pourrait être contestée (II)
L’exceptionnelle détermination d’un PFRLR par le juge administratif suprême
Dans cet arrêt KONE, le juge administratif a constaté un silence récurrent des conventions internationales en matière d’extradition (A) et a donc dégagé un PFRLR pour y remédier (B)
A- La nécessité de remédier à une lacune récurrente des conventions bilatérales en matière d’extradition
L’arrêt est rendu au visa de la loi française du 11 mars 1927 qui pose l’interdiction des extraditions à caractère politique.
Cette loi s’impose à toutes les conventions antérieures et son article 1er, al 2 dispose qu’elle s’applique « aux points qui n’auraient pas été réglementés par les traités ».
Par contre, si l’on suit le même raisonnement, une convention postérieure à la loi de 1927 doit prévaloir sur celle-ci. Et même si la convention comporte un silence, celui-ci prévaut face à l’existence de la loi de 1927 concernant l’extradition demandée dans un but politique.
En l’espèce, la convention de 1962 conclue entre la France et le Mali doit donc prévaloir sur la loi de 1927.
De plus, depuis l’arrêt Nicolo de 1989, le CE a précisé que selon l’article 55 de la Constitution, les conventions ont une autorité supérieure aux lois. Ainsi, l’article 44 de l’accord Franco-Malien prévaut sur l’article 5-2 de la loi française de 1927 et ce même en l’absence de stipulation en matière d’extradition demandée dans un but politique.
Ainsi, même un silence de la convention de 1962 ne permet pas l’application directe de la loi de 1927.
En même temps qu’une question de droit, l’affaire Koné pose donc un problème de fond : comment faire pour empêcher une extradition demandée dans un but politique si le droit positif ne donne aucune solution.
Le CE pense qu’il est habilité à combler le silence du droit positif. D’ailleurs, il s’agit d’une des fonctions de la justice administrative qui a souvent dégagé des principes généraux du droit pour combler les lacunes de la loi.
En outre, la question n’est pas nouvelle puisque le gouvernement avait déjà interrogé le Conseil d’Etat concernant le refus d’extrader un individu pour une infraction présentant un caractère politique. Le gouvernement se demandait si cette solution peut être considérée comme un principe à valeur constitutionnelle.
Le CE avait alors répondu qu’il existait bien un principe à valeur constitutionnelle en la matière qui devrait être confirmer par le Conseil constitutionnel lui-même.
Mais le CE n’a pas attendu de décision du Conseil constitutionnel et a pris les devants en dégageant un PFRLR.
B-Le silence de la convention franco-malienne en matière d’extradition comblé par un PFRLR
Dans ses conclusions, le commissaire du gouvernement, maître des requêtes au Conseil d’Etat, Jean-Marie Delarue affirme que « la naissance d’un nouveau principe général du droit applicable dans le droit de l’extradition ne pose aujourd’hui aucun problème de principe ».
Le commissaire n’avait pas qualifié ce principe général du droit de PFRLR. Pourtant, l’assemblée du contentieux qualifie le principe dégagé concernant la prohibition de l’extradition dans un but politique de PFRLR.
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