Espaces de concurrence et circuits de scolarisation

Espaces de concurrence et circuits de scolarisation

Quelques mots sur les auteurs :

Sylvain Broccolichi est maître de conférences en sociologies à l’ IUFM du Nord Pas de Calais. Il a fait une thèse sur le fonctionnement de l’école, les pratiques usuelles et production d’inégalités : la genèse des dispositions scolaires avec comme directeur de thèse Pierre Bourdieu.

La plupart de ses recherches ont comporté des démarches de repérage et d’élucidation de variations de réussite scolaire (incluant le cas limite du décrochage et de la déscolarisation) dans le double sens de variations dans le temps et dans l’espace (social et scolaire), en accordant une place importante à la question des inégalités et des (dés)avantages sociaux. L’objectivation comparative est articulée avec la prise en compte des points vue des acteurs (élèves, parents, professionnels scolaires, cadres administratifs, décideurs...) dans le cadre d’enquêtes de terrain. Plus récemment il a davantage étudié :


- les ségrégations scolaires, leur genèse, leurs effets, leurs liens avec les morphologies urbaines et les politiques éducatives (compensatoires notamment).


- Le rôle de premier plan accordé aux évaluations et régulations dans les rhétoriques modernistes et ce qu’il en reste dans les pratiques de différents acteurs et institutions.

Agnès van Zanten est directrice de recherche au CNRS et travaille à l'Observatoire Sociologique du Changement. Après avoir fait des études au Venezuela et à l'Université Stanford aux Etats-Unis, elle a préparé un doctorat à l'Université Paris V. Entrée au CNRS en 1989, elle a été chargée de recherche dans l'équipe de sociologie de l'éducation à Paris V avant de réjoindre l'OSC en 1999. 

Elle s'intéresse à la sociologie de l'éducation et plus particulièrement aux politiques et aux dynamiques éducatives locales. Auteur de nombreux ouvrages et articles, elle dirige actuellement deux projets de recherche sur "La formation des élites du secondaire au supérieur" et sur "Le rôle de la connaissance dans l'élaboration et la régulation des politiques d'éducation et de santé". Elle enseigne dans le Master "Politiques et sociétés comparées" de Sciences Po et donne de nombreuses conférences autour de ses recherches en France et à l'étranger.

Introduction:

Précédemment nous avons pu voir avec l’exposé sur le contournement de la carte scolaire qu’on assistait à un développement d’une logique de marché dans l’institution scolaire. La compétition entre établissement est un phénomène qui s’accentue dans nombre de systèmes scolaires que ce soit en France ou à l’étranger notamment en Angleterre ou aux Etats-Unis. Avec Lorène et Natacha, nous avons pu voir que malgré le fait qu’en France le libre choix ne soit pas favorisé mais au contraire limité par la carte scolaire, les établissements français étaient soumis d’une manière croissante à une forme de concurrence locale non seulement entre écoles privées et publiques mais aussi au sein du public avec le contournement de la carte scolaire. Dès lors on peut se demander comment le système éducatif français pourtant défini par un projet éducatif, celui de former des citoyens en leur apportant une culture commune et une capacité critique à tous, soutenu par une politique d’égalité des chances favorise l’émergence d’un marché et comment les établissements tentent-elles d’y faire face ? Etant donné que ce soit l’éducation nationale qui définit le programme enseigné l’école n’est-elle pas prestataire d’un service public homogène ? N’est-elle pas unique ? Comment alors expliquer la genèse du marché scolaire, sa concurrence et quelles sont les réponses apportées par les établissements ?

I. Existence d’un marché scolaire

A. Faits constatés, exposition du problème

1. Nature, fonctionnement du marché et de la concurrence scolaire

Notion de marché scolaire

Tout d’abord, il est intéressant de noter que la notion de marché est avant tout un concept emprunté à l’économie. Dès lors les sociologues l’emploient dans la sociologie scolaire dans le choix d’un usage métaphorique ou ils font le choix de le formaliser dans le cadre hétérodoxe d’une sociologie économique en ayant recours à la notion de marché de qualité. La notion de marché de qualité permet aux sociologues de contourner la relation entre marché et prix, jouant un rôle de régulateur, qui sont des concepts inséparables.

Sylvain Broccolichi et Agnès van Zanten conçoivent l’établissement comme producteurs de services éducatifs et les élèves comme clients.

Notion d’espaces de concurrence

La notion de concurrence scolaire regroupe alors les rapports qu’entretiennent entre elles les établissements producteurs de services éducatifs, en vue d’attirer les clients qui ne sont autres que les élèves.

Van Zanten conçoit les établissements comme des acteurs collectifs qui agissent en fonction des uns et des autres. Ils orientent leurs actions en fonction de celles des autres établissements. Ils sont mis en concurrence avec les établissements environnants. La circulation d’information, les réseaux de coopération et d’entraide et les formes d’interdépendance participent à la construction de cet espace, d’où la notion de circuit de la scolarisation.

Chaque collège est mis en concurrence par des établissements faisant parti d’un espace très précis, bien délimité. Cet espace dépend donc d’une part de sa localisation, de ses caractéristiques mais aussi des ressources qu’il est susceptible de mobiliser. En effet, car dans la majorité des cas les élèves qui choisissent de fuir leur collège de secteur ne le font que rarement au delà d’un certain périmètre trop important.

Les établissements entrent en compétition entre elles pour maintenir le niveau d’effectif optimal pour le bon fonctionnement de l’organisation scolaire ou tout simplement s’assurer de l’effectif minimal permettant la survie de l’organisation. En effet, on assiste à une population vieillissante, donc moins d’entrées en collèges, des mouvements démographiques dans certaines régions, et enfin on a aussi des fuites délibérées des élèves du public vers le privé.

2. Une

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