Ethique et luxe à la carte

Alain Ducasse a présenté sa nouvelle carte aux accents naturels, en limitant de façon drastique la viande au menu, en début de mois au Plaza Athénée. La nouvelle a été bien accueillie malgré les angoisses de certains au sujet d'une éventuelle cuisine végétarienne. On a profité du cas Ducasse pour faire un tour d'horizon des tendances culinaires à goûter de toute urgence, et même s'il n'y a pas de glace versicolore au programme, il y a de belles surprises.

Ducasse rime indéniablement avec palace, mais non content d'être l'un des visages emblématiques de la gastronomie française, le chef a décidé de devenir la figure de proue d'un virage dans la haute cuisine. Son projet de gastronomie éthique répond à une prise de conscience à l'égard de la raréfaction de certaines denrées. Pour pallier le manque de ressources, le Gascon a pris l'irrévérencieuse décision de supprimer, ou presque, la viande de la carte du Plaza Athénée pour nourrir son projet de "naturalité". Si certains ont cru y voir une insulte à l'héritage gustatif français, d'autres saluent déjà cette prise de position osée mais jugée nécessaire.

En effet la question de l'utilité du végétarisme n'est plus un mystère pour personne, toutefois il est plus que délicat de passer de la théorie à la pratique. Non pas que nous encouragions nécessairement une suppression radicale de tout aliment de typé carné dans les plats de nos hôtels prestigieux ou ailleurs, mais le débat est ouvert. Si notre mission n'est pas de trancher, nous avons néanmoins jeté un oeil aux évolutions récentes dans le département gourmet de l'hôtellerie de luxe. En réalité, le chef n'applique pas le végétarisme à proprement parler car le poisson et les fruits de mer sont mis à l'honneur dans le palace parisien. De plus, Ducasse reconnaît laisser une porte ouverte à la viande, mais dans des proportions volontairement amoindries. Il tient à ce que sa présence ne reste qu'anecdotique à la carte de son restaurant.

Ethique et luxe à la carte

La télévision y est peut-être pour quelque chose. Avec la popularité d'une poignée de programmes orientés cuisine, les Français ont découvert par la même occasion des chefs aux ambitions gastronomiques nouvelles, et aux ingrédients non moins inhabituels. Un autre Gascon, Jean-Luc Rabanel, a pour habitude de mitonner de bons petits plats à base de fleurs et de privilégier des ingrédients issus de l'agriculture biologique. Et les esprits les plus réfractaires qui s'y sont frottés ont généralement reconnu être séduits par ces mets du futur. D'ailleurs, rendons à César ce qui appartient à César : la cuisine n'a pas toujours été le temple de la bavette et de la souris d'agneau. D'autres formes de gastronomie ont toujours existé, mais la conjoncture alimentaire actuelle leur permet enfin de réclamer leur part du gâteau.

On se dirige doucement mais sûrement vers une cuisine diét-éthique, qui ne fait aucune concession sur le goût. C'est en tout cas le maître mot des grands, Yannick Alléno en tête de file. Le chef triplement étoilé qui cartonne à l'étranger vient de prendre ses quartiers – d'orange – au Pavillon Ledoyen, à Paris, où il compte bien proposer des plats

...