PUDAL, Retour de flammes, les pompiers des héros fatigués
Fiche de lecture : PUDAL, Retour de flammes, les pompiers des héros fatigués. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar shivapnl • 25 Novembre 2019 • Fiche de lecture • 1 352 Mots (6 Pages) • 583 Vues
TD – Sociologie des institutions
Partie 2 : Les conditions sociales d’entrée en institution
Fiche de lecture
Texte : R. PUDAL, Retour de flammes. Les pompiers, des héros fatigués ? Paris, La Découverte, 2016, chapitre 1 « Devenir pompier corps et âme », pp. 13-33
Romain PUDAL est un sociologue chargé de recherche au CNRS et consacre ses travaux à la sociologie des biens symboliques, d’une part, et à celle des classes populaires d’autre part. Après un service militaire à la Brigade de sapeurs-pompiers de Paris entre 1999 et 2000, il s’engage en 2002 comme pompier volontaire. Il publie alors Retour de flammes. Les pompiers, des héros fatigués ? en 2016 qui s’appuie sur ses quinze années d’engagement. Cet ouvrage est une monographie avec un regard sociologique sur le métier de sapeur-pompier, c’est-à-dire qu’il utilise le mode d’enquête ethnographique et pose une distance critique face à l’objet qu’il étudie. L’intention de l’auteur est de faire entrer le lecteur dans un milieu fermé et secret qu’est le monde des sapeurs-pompiers pour rompre avec les prénotions que les individus peuvent se faire.
L’auteur nous raconte dans le 1er chapitre, sous la forme de récit, son expérience durant son service de 10mois au sein de la Brigade des sapeurs-pompiers de Paris. Il tente de comprendre comment l’institution forme et inculque aux sapeurs-pompiers les qualités attendues, si valorisés et mise en avant par les médias et dans les représentations des individus. Quelles sont les dispositifs utilisés pour permettre l’adhésion des nouvelles recrues ?
On peut remarquer tout d’abord que le monde des pompiers est un milieu très fermé, quasiment « autarcique », c’est-à-dire que les membres de l’institution sont uniquement des pompiers qui accomplissent toutes les tâches quotidiennes en plus de leur travail, et que l’entrée pour les autres individus est quasiment inaccessible. L’entrée dans l’institution de l’auteur lui est difficile d’abord par son incompréhension face à « une sorte de langage vernaculaire » (p.14) qui marque une première rupture entre les sapeurs-pompiers et ceux qui n’en font pas partis. En effet, les sapeurs-pompiers utilisent un langage et un vocabulaire particulier, qu’il définit en nous renvoyant à la fin de son ouvrage dans le glossaire. Les nouvelles « recrues » sont considérés comme des « intrus » par leurs instructeurs, ne les considérant pas comme de « vrais » sapeurs-pompiers, ils n’ont d’ailleurs pas le droit d’arborer leur uniforme ou de parler de leur métier en dehors de l’institution.
Cependant, bien que les recrues ne possèdent pas (encore) le statut légitime de sapeurs-pompiers, l’institution va tout mettre en œuvre pour les faire adhérer aux valeurs et principes de celle-ci, le plus rapidement possible et de façon durable. Effectivement, « Cette institution s’emploie (…) à façonner les âmes tout autant que les corps et la conversion à ses valeurs tient par moments de l’ascèse spirituelle », (p.28) pour plusieurs raisons. En premier lieu car les sapeurs-pompiers, lors des opérations extérieurs, représentent l’institution : ils sont comme dit Goffman, la « façade » de l’institution renvoyée aux individus et va être contrôler par les agents, que sont les officiers mais aussi les pompiers eux-mêmes qui après avoir adhéré aux valeurs, vont opérer également à une sorte d’auto-contrôle.
Les valeurs évoquées de l’institution sont notamment l’altruisme, c’est-à-dire pas de jugement de valeur parmi les individus à secourir ou aider, l’efficience, car « on ne joue pas avec la compétence » (p.31), et la discrétion, mais l’auteur nous dit : « La valeur suprême qui sert de socle au courage et au dévouement serait sans doute la cohésion » (p.27). La cohésion est le pilier pour que les missions se déroulent dans les meilleures conditions possibles puisqu’elles se font en équipe. C’est pourquoi toutes les techniques sont employées pour obtenir cette solidarité entre les pompiers, à travers des épreuves où les réussites personnelles ne sont pas félicitées et que l’échec d’une recrue vaut pour un échec collectif. La « responsabilité collective et réciproque est systématiquement recherchée » (p. 28)
C’est donc à travers de nombreuses épreuves que l’institution tente de « métamorphoser » les jeunes recrues en « brigadous » ou élite prête à rejoindre l’unité opérationnelle. L’auteur évoque un entrainement physique intense mais également et surtout une violence symbolique car sur la plupart du temps, les pompiers sont moins confrontés à des interventions techniques qu’un besoin de recourir à une finesse psychologique dans des situations socialement délicates. Si l’inculcation des valeurs propres à la BSPP se transmet nous dit l’auteur, c’est notamment parce que cet entrainement extrême n’est pas sans but. Etant impossible de reproduire à l’identique les conditions réelles des opérations, la formation met tout en œuvre les imiter au maximum. « Il fallait trouver les moyens de recréer les conditions techniques, mais aussi et surtout psychologiques et physiques liées à ces interventions » (p.24) En plus d’une pression constante, des rituels sont imposés, comme la « revue de chambrée » qui consiste à inspecter les chambres mais aussi les individus sur leur tenus et leur apparence. Tout est mis en place pour tester les pompiers « pour trouver le point de rupture, physique ou psychologique » (p.21)
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