Les institutions économiques internationales
Dissertations Gratuits : Les institutions économiques internationales. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar dissertation • 28 Octobre 2013 • 3 212 Mots (13 Pages) • 1 100 Vues
Christian Chavagneux*
Les institutions économiques internationales sont engagées depuis le milieu des
années 1990 dans un effort de renouvellement sans précédent. Le club des pays riches,
l’Organisation pour la Coopération et le Développement Économique (OCDE) s’élargit
aux pays émergents, ainsi que la Banque des Règlements Internationaux (BRI), une
ancienne institution, créée en 1930, qui rassemble les représentants des banques
centrales des grands pays. Le Fonds Monétaire International (FMI) se voit confié de
nouvelles ressources pour assurer la stabilité du système financier et la Banque
mondiale s’engage dans une restructuration qui va lui coûter plus d’un milliard de
francs. Cette effervescence souligne l’intérêt que les États du monde entier portent à ces
institutions. Un intérêt que reflètent également les appels répétés à une "nécessaire
régulation de l’économie mondiale" et au rôle que devraient y jouer les organisations
internationales.
Cette attente est le résultat du décalage important né, depuis les années 1960, entre le
rythme de changement du système économique international et celui du système
politique international. Le système économique a connu un ensemble de mutations,
profondes et rapides, qui sont généralement regroupées sous le vocable de
"mondialisation", mais qui correspondent à des évolutions de nature différente :
expansion du commerce international, marchés de plus en plus mondialisés, ouverture
des anciens pays socialistes et développement des pays à industrialisation rapide d’Asie,
libéralisation monétaire et financière, évolution rapide des technologies... De son côté,
le système politique international a fait preuve d’une plus grande rigidité. Il est resté
figé dans les relations entre les Etats-Nations et entre leurs dirigeants qui se présentent
toujours comme les acteurs principaux de l’économie mondiale, mais donnent pourtant
l’impression d’être dépassés par des forces économiques devenues incontrôlables. La
mondialisation devient ainsi une source d’inquiétude qui se traduit par des appels
pressants à une meilleure régulation ou plutôt, selon la mode actuelle, à une meilleure
"gouvernance" de l’économie mondiale. En dépit d’une abondante littérature sur la
question et d’une revue (Global Governance) qui lui est même entièrement consacrée,
* Christian Chavagneux est chargé de mission au Commissariat Général du Plan.
ã Éditions La Découverte, collection Repères, Paris, 1997.
II
le terme reste flou. Néanmoins, son message est clair : c'est celui d'une aspiration à
trouver mieux que la loi du marché et celle de l’Etat-Nation pour réguler le rapport des
individus aux évolutions économiques internationales. Puisqu’il ne s’agit pas, sauf pour
quelques utopistes, de créer un gouvernement mondial, la demande pour une meilleure
"gouvernance" se ramène alors souvent à un appel à un rôle accru des organisations
économiques internationales. Celles-ci n’ont jamais été aussi nombreuses et aussi
visibles qu’aujourd’hui. Les réunions régulières du G7, ou celles du FMI et de la
Banque mondiale, attirent désormais plusieurs centaines de journalistes et retiennent
l’attention générale du public. Pourtant, nombre et visibilité ne sont pas forcément
synonymes d’autorité, c’est-à-dire d’une double capacité à une décision autonome et à
une influence significative sur la détermination des règles du jeu du système
économique international.
Comment appréhender le rôle des institutions économiques internationales ?
Comme le souligne Susan Strange dans son dernier ouvrage, s’interroger sur le rôle
que peuvent jouer les institutions internationales revient à poser deux questions. La
première consiste à se demander si ces institutions sont à même d’exercer une réelle
autorité sur les évolutions de l’économie mondiale. En général, dans leur grande
majorité, les économistes s’arrêtent là. Ce faisant, ils laissent de côté une partie
importante de l’analyse car il faut également se demander dans quel but cette
coopération internationale s’exerce, quels en sont les résultats, au nom de qui cette
autorité est mise en oeuvre et qui en profite ? C’est l’un des apports essentiels des
nouvelles approches d’"économie politique internationale" développées par Susan
Strange que d’avoir mis l’accent sur ce deuxième type de questions le plus souvent
laissé de côté.
Pour répondre à cet ensemble d’interrogations, une approche historique s’avère
indispensable. Le rôle que sont amenées à jouer les institutions économiques
internationales change en
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